Fleur Pellerin, en charge des PME, préserve le numérique

Par Sandrine Cassini et Fabien Piliu  |   |  814  mots
Fleur Pellerin
La jeune conseillère à la Cour des comptes est l'une des principales figures de la société civile nommée au gouvernement. Allégements fiscaux pour les PME, crédit d'impôt recherche et réforme du statut des jeunes entreprises innovantes sont au programme.

A priori, elle n?avait pas le profil du ministrable. Mais Fleur Pellerin, 38 ans, a été nommée ministre déléguée chargée des PME, de l'innovation et de l'économie numérique, rattachée au nouveau ministre du redressement productif, Arnaud Montebourg. Elle avait un handicap : la conseillère à la Cour des comptes ne s?était jamais frotté au suffrage universel. Et François Hollande avait dit qu?il privilégierait les « politiques ». Le nouveau président de la république, qui avait promis la « parité » et la « diversité », lui a donc donné sa chance. Ainsi, François Hollande préserve au moins la notion de numérique au sein du gouvernement. Beaucoup d?observateurs craignaient la disparition pure et simple de la notion. Cela pourrait donc ressembler à un lot de consolation pour le secteur, qui pouvait se prévaloir auparavant d?un ministre de l?industrie et du numérique.

Mais Fleur Pellerin devrait faire oublier cette relégation aux industriels. L?association des logiciels (AFDEL) a dès cette nomination dégainé le communiqué louangeur : « La nomination à cette responsabilité de Fleur Pellerin, qui a démontré une vraie connaissance des dossiers et une compréhension des enjeux , représente un signe très positif ». Piquante, fonceuse, la conseillère numérique de François Hollande pendant la campagne, a gagné le respect d?un secteur, auquel elle ne connaissait pas grand-chose. Sur-diplomée (bac à 16 ans, Essec, Sciences Po, ENA), cette coréenne adoptée à 6 mois a commencé sa carrière à la Cour des comptes, avant d?intégrer en 2007 Tilder, une agence de conseil en communication, plutôt chronophage. Pour être plus présente auprès de sa fille, elle démissionnera moins de deux ans plus tard. En 2007, elle entre au club XXIème, qui réunit l?élite des minorités visibles. Elle le préside depuis février 2010.

Les principaux chantiers

PME : les chantiers de la ministre sont nombreux. Fortement réclamée par les chefs d?entreprises, la simplification administrative et réglementaire a déjà été lancée mais elle n?est pas encore réellement opérationnelle. Promise par le candidat Hollande, la réduction à 30 jours des délais de paiement, contre 60 aujourd?hui, sera également une mission à mener rapidement, tout comme la mise en place de la médiation des marchés publics, également souhaitée par l?Elysée.

En collaboration avec le tout nouveau ministre délégué au Budget, Jérome Cahuzac, Fleur Pellerin devra également mener la modulation de l?impôt sur les sociétés (IS) qui, selon les calculs du Parti socialiste, permettrait d?alléger la charge fiscale des PME de 3 milliards d?euros par an. Cette collaboration interministérielle devrait se prolonger sur les dossiers de la banque publique d?investissement, du livret d?épargne industrie, du contrat de générations entre les jeunes et les seniors. Ses relations avec Marylise Lebranchu, ministre chargée de la Réforme de l'Etat, de la décentralisation et de la fonction publique, devront également être étroites, le président de la République ayant d?ores et déjà annoncé que le pouvoir économique des régions serait nettement renforcé.

Innovation : Fleur Pellerin devrait se pencher dans un premier temps sur une nouvelle réforme du crédit impôt recherche (CIR). Allégé et simplifié en 2007, celui-ci devrait être recentré sur les PME. Des économies seraient-elles retirées de cette modification du dispositif ? Ce serait heureux car François Hollande voit d?un ?il bienveillant la création d?un crédit impôt innovation qui intégrerait un certain nombre de dépenses qui ne sont pas aujourd?hui éligibles au CIR. C?est le cas notamment des dépenses réalisées dans le cadre du prototypage.

Restera à convaincre Jérome Cahuzac du bien fondé de cette mesure dans un contexte budgétaire délicat. Le coût du crédit d?impôt innovation est estimé à deux milliards d?euros par an selon Bercy. La restauration du statut de jeune entreprise innovante (JEI), fortement raboté sur l?autel de l?austérité, est également prévue.

Numérique : François Hollande a fait de la formation l?un des principaux vecteurs pour résoudre la « grave pénurie de développeurs » qui pénalisent le secteur. Autre axe destiné à donner un coup de pouce à un secteur considéré comme fortement créateur d?emplois : la modernisation de l?Etat. Le nouveau président de la république a aussi promis la création d?un "habeas corpus numérique", qui garantisse les droits et les libertés numériques de chacun. Le Conseil National du Numérique (CNNum), créé par Nicolas Sarkozy, devrait a minima évoluer, et s?ouvrir à d?autres acteurs comme les ayants-droits ou la société civile.