Le Royaume-Uni envisage un impôt sur les Gafa dès 2020

Par latribune.fr  |   |  833  mots
En pleine négociations sur le Brexit, Londres et Bruxelles s'accordent tout de même sur un point : la nécessité de taxer les Gafa à plus ou moins court terme. (Crédits : Pascal Rossignol)
Londres a annoncé, lundi 29 octobre, l'instauration de son propre impôt sur les revenus réalisés au Royaume-Uni par les géants du numérique comme Google, Facebook ou encore Amazon. Une décision qui intervient alors que l'Union européenne s'attèle également à la même tache.

En instance de divorce avec l'Union européenne, le Royaume-Uni a annoncé, lundi 29 octobre, la mise en place prochaine d'une taxe sur les revenus des géants du numérique et d'internet qui exercent une activité dans le pays, les fameux GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft). Annoncée par le ministre des finances anglais Philip Hammond, cette nouvelle imposition conçue de manière à cibler les géants établis du numérique plutôt que les startups, comme l'indique le Trésor britannique dans le tweet ci-dessous, entrera en vigueur en avril 2020Les sociétés qui ont des résultats bénéficiaires seront taxées à hauteur de 2% sur le chiffre d'affaires généré par les utilisateurs britanniques. Le gouvernement espère en tirer au moins 400 millions de livres (450 millions d'euros) par an.

"Il n'est clairement pas soutenable, ni équitable, que des plates-formes numériques puissent générer des bénéfices substantiels au Royaume-Uni sans payer de taxes ici en lien avec ces activités", a déclaré le ministre des Finances Philip Hammond qui présentait son projet de budget aux Communes.

L'Union européenne mène aussi la charge

La Grande-Bretagne est en pointe dans les efforts internationaux pour réformer la fiscalité des entreprises mais les progrès sont beaucoup trop lents, a déploré Philip Hammond. Compte tenu de la domination des géants technologiques américains, l'administration du président Donald Trump risque de ne pas apprécier la proposition au moment où la Grande-Bretagne doit négocier de nouveaux accords commerciaux. Si une solution internationale se fait jour, Londres envisagera de l'adopter plutôt que de mettre en oeuvre la nouvelle taxe, a précisé Philip Hammond. Amazon et Facebook n'ont pas souhaité faire de commentaire sur l'annonce britannique qui a contribué à faire décrocher leur cours de Bourse à Wall Street.

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Dans cette volonté de taxer les GAFAM, l'Union européenne (UE) n'est pas en reste. Face aux députés européens puis devant des citoyens à Strasbourg, le ministre de l'Économie et des Finances Bruno Le Maire a plaidé, mardi 23 octobre pour le prélèvement d'une partie du chiffre d'affaires des géants de l'internet. La proposition actuellement en débat, présentée en mars par la Commission européenne, vise essentiellement les géants américains et envisage une taxe à hauteur de 3% du chiffre d'affaires des Gafam ce qui pourrait rapporter 5 milliards d'euros de recettes à l'échelle européenne, dont 500 millions d'euros en France. Elle s'appliquerait à la publicité en ligne, à l'intermédiation par plates-formes numériques et aux revenus générés par la vente de données, au-dessus d'un seuil établi à 50 millions d'euros de recettes annuelles. Quelque 200 entreprises seraient concernées et, comme pour la taxe britannique, les startups seraient exclues.

Les poids lourds de l'industrie s'inquiètent

Des patrons d'entreprises numériques européennes comme Spotify, Booking.com ou Zalando ont exprimé leur "grave préoccupation" face à la taxe sur les géants du numérique que l'UE tente de mettre en place, dans une lettre aux ministres des Finances européens rendue publique ce mardi. Cette mesure "causerait un préjudice matériel à la croissance économique et à l'innovation, à l'investissement et à l'emploi dans toute l'Europe", écrivent les dirigeants de 16 entreprises.

Selon eux, la taxe proposée "a été conçue pour les grandes entreprises très rentables, mais elle aura un impact disproportionné sur les entreprises européennes, ce qui entraînera un traitement injuste". La proposition actuellement en débat, présentée en mars par la Commission européenne, vise pourtant essentiellement les Gafam. La France, qui en est à l'origine, espère que les autres pays européens l'approuveront d'ici la fin de l'année. Mais plusieurs nations restent opposées à ce projet, comme l'Irlande, où plusieurs géants du numérique ont installé leur tête de pont européenne.

"La plupart des jeunes entreprises et des nouvelles entreprises comptent sur leurs revenus pour croître et se développer", expliquent les dirigeants européens dans leur courrier, également signé par les patrons du site de voyage en ligne eDreams ou Rovio, l'éditeur finlandais d'Angry Birds. La taxe proposée "priverait ces mêmes entreprises d'une source essentielle de capital à réinvestir dans leur croissance", ajoutent-ils. En outre, la proposition de Bruxelles soulève selon eux "des questions juridiques, techniques et politiques multiples et graves". Sous la pression de Paris, les ministres européens doivent à nouveau débattre de cette taxe lors d'une prochaine réunion à Bruxelles le mardi 6 novembre.

(Avec Reuters)