Mission Lescure : la fin d'Hadopi ?

Par Sandrine Cassini  |   |  585  mots
Pierre Lescure Copyright AFP
Cinéma, télé, presse, livre : l'ancien PDG de Canal Plus compte aborder toutes les problématiques de l'industrie culturelle. Un premier bras de fer s'esquisse sur le piratage des œuvres sur Internet.

Quel sort réserve Pierre Lescure, en charge d?une mission sur « l?exception culturelle » française, à l?Hadopi ? La lettre de mission signée de la main d?Aurélie Filippetti donne quelques éléments sur l?état d?esprit dans lequel se trouve la ministre de la Culture. « Vous vous attacherez à formuler des propositions de dispositifs d?action publique permettant [?] de lutter contre la contrefaçon commerciale », indique le courrier. Sciemment, le ministère indique que c?est désormais la « contrefaçon commerciale » qui est visée. Autrement dit, plus question de viser les particuliers, confirme-t-on au sein du gouvernement, qui se serait assuré que le chargé de mission partage bien cette vision des choses.

La grande époque des décodeurs pirates de Canal Plus

Qu?en pense l?intéressé ? L?ancien PDG de Canal Plus, dont la nomination à la tête de la mission avait réjoui les ayants droit et inquiété le petit monde du Net, a affirmé publiquement au micro de BFM qu?il ne « fallait pas supprimer Hadopi ». Mais en privé, ce proche des milieux du cinéma et de la télévision ne se prive pas de rappeler qu?à la grande époque des décodeurs pirates de Canal Plus, il préférait poursuivre les vrais fraudeurs qui faisaient du commerce illégal plutôt que les usagers, qui avaient des circonstances atténuantes et auxquels il se contentait de froncer les sourcils... Sentant les promesses gouvernementales sur le maintien d?Hadopi se fissurer, le monde du cinéma et de la musique est prêt à remonter au créneau. « La réponse graduée, qui a un objectif pédagogique, doit être maintenue. Elle est destinée à se terminer, mais seulement lorsqu?il y aura une offre légale. D?ailleurs, elle peut exister en dehors, sans qu?il y ait forcément une autorité indépendante. Si elle est supprimée, [le gouvernement] aura toute la profession à dos ! », s?emporte Pascal Rogard, à la tête de la puissante Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques (SACD). Et de rappeler que la suppression de l?Hadopi ne signifie pas la suppression du délit de contrefaçon. Ainsi, les ayants droit pourront toujours poursuivre les internautes qui piratent, sauf qu?ils ne prendront plus la peine de passer par la case « pédagogie » de l?Hadopi.

Du cinéma au livre, en passant par la TV, la photo et la presse

Mais le cadre de la mission de Pierre Lescure dépasse largement le piratage des ?uvres sur le Net. L?ancien journaliste a prévu de s?attaquer aussi bien au cinéma, au livre, à la télévision, à la photo, dont la révolution numérique a réduit les revenus à la portion congrue, et à la presse. Sur ce dernier thème, il va s?appuyer largement sur les travaux menés par les éditeurs de presse nationale, régionale et les magazines. Ces derniers ont envoyé un projet de loi au gouvernement, demandant une rémunération des contenus référencés par les moteurs de recherche, comme l?ont révélé Les Echos. Autres sujets qui seront abordés, la fiscalité du numérique, et la chronologie des médias, sur laquelle Canal Plus se montre très rigide, mais que beaucoup, comme la SACD, souhaiteraient assouplir. D?ores et déjà, Pierre Lescure a demandé un état des lieux à l?équipe de mission nouvellement constituée.