Taxe Gafam : l'administration Biden veut un accord avec les pays européens dans les six mois

Par latribune.fr  |   |  608  mots
(Crédits : Clodagh Kilcoyne)
La Maison-Blanche a annoncé mercredi la suspension provisoire des droits de douane  imposés à quatre pays européens en représailles de leur taxation des géants numériques américains. Un délai qui vise à donner le temps de mettre en place un accord fiscal.

La fiscalité des Gafam (Google, Apple, Facebook, Google, Microsoft), qui génère depuis plusieurs années des controverses entre les États-Unis et les pays tiers, en particulier européens, pourrait bientôt être résolue. L'administration Biden a affiché mercredi sa volonté de trouver un terrain d'entente avec l'Europe, en suspendant provisoirement les droits de douane punitifs imposés à six pays, dont quatre européens : le Royaume-Uni, l'Espagne, l'Autriche et l'Italie. La Turquie et l'Inde sont également concernées.

À l'issue d'un an d'enquête, les services de la représentante américaine au Commerce (USTR) concluent que les taxes de ces pays sont discriminatoires contre les grands champions américains comme Amazon, Google ou Netflix et recommandent donc d'imposer "des tarifs douaniers supplémentaires sur certaines marchandises en provenance de ces pays".

Mais, l'ambassadrice Katherine Tai a décidé de les suspendre "immédiatement" pour une période allant "jusqu'à 180 jours pour donner plus de temps [aux pays] pour conclure les négociations multilatérales en cours sur la fiscalité internationale à l'OCDE et dans le processus du G20".

Les Gafam accumulent les victoires juridiques contre l'UE

La fiscalité des géants du numérique, qui paient des impôts souvent sans rapport avec les revenus et les profits qu'ils dégagent localement, suscite depuis plusieurs années d'âpres débats au sein de l'Union européenne. En mai dernier, Amazon a remporté une victoire lorsque la justice européenne a validé les rabais fiscaux obtenus par le géant du commerce en ligne au Luxembourg. Un camouflet pour la Commission européenne qui y voyait des aides d'État illégales dont elle exigeait le remboursement.

Bruxelles avait déjà perdu face à Apple en juillet 2020 devant cette même juridiction. Les juges avaient alors annulé le remboursement à l'Irlande de 13 milliards d'euros d'avantages fiscaux considérés comme indus par la Commission.

Des initiatives courageuses mais isolées

Face à l'enlisement de la situation, certains Etats ont tenté de faire cavaliers seuls. La France a ainsi adopté en juillet 2019 une taxe de 3% sur le chiffre d'affaires réalisé en France par les géants du numérique dépassant 750 millions d'euros d'activité mondiale.

Cette "taxe Gafa" a rapporté environ 400 millions d'euros en 2019 en France et a été de nouveau prélevée en 2020, malgré les menaces de représailles de l'administration Trump qui avait également fait échec aux négociations dans le cadre de l'OCDE pour réformer la fiscalité internationale de ces entreprises.

La France s'est en revanche ainsi exposée aux représailles de la part des Gafam. En mars dernier, Google a ainsi prévenu les annonceurs qu'il comptait augmenter de 2% à partir de mai le tarif des publicités diffusées sur sa plateforme en France pour compenser le coût de cette taxe. Amazon avait également mis en œuvre dès octobre 2019 une hausse de 3% des tarifs appliqués aux vendeurs hexagonaux sur sa plateforme.

L'Autriche, l'Italie, l'Espagne et le Royaume Unis ont depuis adopté leur propre version de la taxe Gafa, avec les mêmes résultats. Apple a ainsi contre-attaqué en septembre 2020, en augmentant les commissions prélevées sur les développeurs qui vendent des applications sur sa plateforme, en France mais aussi en Italie et au Royaume-Uni.

Les choses pourraient toutefois bientôt bouger sur ce front, comme l'illustre le récent sursis accordé par Washington. Le président Joe Biden souhaite un impôt mondial minimal sur les sociétés, en cours de négociation à l'OCDE, tandis que Bruxelles prépare une proposition de taxe numérique pour s'assurer d'une juste contribution des géants de la tech.