Le plan social de Bouygues Telecom jugé «justifié» par un rapport d'experts

Par Delphine Cuny  |   |  594  mots
Le siège de Bouygues Telecom à Issy-les-Moulineaux, près de Paris. Copyright Reuters
Le rapport d'expertise demandé par le comité d'entreprise conclut que la situation financière dégradée de l'opérateur justifie une réorganisation des effectifs. Et que le plan de départs volontaires portant sur 556 suppressions d'emploi pourrait ne pas suffire.

Deux mois après l'annonce par Bouygues Télécom d'un plan de départs volontaires portant sur 556 emplois sur un effectif de 9.800 personnes, le premier plan social de l'histoire du groupe Bouygues, les discussions avec les partenaires sociaux ont commencé lundi. Un comité central d'entreprise s'est tenu mercredi pour étudier le rapport d'expertise du cabinet Ellipce demandé par le CE. Or «le rapport dit que le plan de départs volontaires est justifié et qu'il faut s'attendre à un deuxième plan dans un avenir prochain» confie, accablé, un syndicaliste de Bouygues Telecom. La direction du troisième opérateur mobile français, dont les bénéfices ont chuté de 55% au premier semestre, ne cache pas d'ailleurs en privé son soulagement devant les conclusions de ce rapport confidentiel, transmis la semaine dernière aux élus. «La situation financière de l'entreprise s'est rapidement et durablement dégradée», considère ce rapport d'une centaine de pages.

Les rachats d'actions pointés du doigt
Plus exactement, «le rapport conclut que la situation justifie tout à fait la réorganisation des effectifs prônée par la direction et que ce redéploiement des métiers ne suffira probablement pas», précise le délégué syndical central de Force Ouvrière, Bernard Allain. «Le cabinet a fait des projections et estime que rien ne sera stabilisé sur le marché avant 2014. L'intérêt du rapport est qu'il pose des questions sur le modèle économique à long terme dans notre secteur. Free a introduit un nouveau modèle commercial qui change complètement la notion d'investissement. L'entreprise Bouygues Telecom doit se métamorphoser», observe le délégué FO. «Les problèmes de liquidité ne sont pas seulement imputables à l'arrivée de Free», considère son homologue de la CFDT. «Le groupe Bouygues a jeté l'argent par les fenêtres, il a utilisé l'an dernier 1,25 milliard d'euros pour une opération de Bourse, des rachats d'actions, et il annonce un PDV pour un plan d'économies de 300 millions d'euros», s'insurge ainsi Azzam Ahdab, délégué syndical central de ce syndicat, premier dans la branche télécoms mais troisième derrière la CFTC et FO chez Bouygues Telecom.

Les premières propositions de la direction «inacceptables»
«Le plan de 556 suppressions d'emplois concernera la direction des réseaux, celle des systèmes d'information, le marketing et les fonctions support», indique un syndicaliste. «On touche directement à l'investissement et aux projets, c'est inquiétant pour l'avenir», s'alarme un autre: «la direction ne veut pas affoler les investisseurs ni les clients, mais qui nous dit qu'il n'y aura une autre vague, ou des licenciements l'année prochaine?» Comme indiqué par la direction lors du comité central du 3 juillet (voir le communiqué), ni les centres d'appels (les 1.500 «chargés de clientèle») ni les boutiques (2.000 salariés), donc le «front office», ne sont concernés par le plan. Les lettres vont être envoyées aux personnes éligibles le 20 octobre. En attendant, partenaires sociaux et direction sont entrés en négociations. Or «les premières propositions de la direction sont a minima et inacceptables: moins d'un mois de salaire par année d'ancienneté en supra-conventionnel, il vaut mieux se faire licencier. En l'état, les syndicats ne donneront pas d'avis favorable et la direction n'aura pas de volontaires», fait valoir un représentant syndical. Les différentes organisations demandent entre 1 mois et demi et 2 mois et demi en plus des indemnités conventionnelles. Les choses pourraient toutefois aller vite et les négociations aboutir à un accord la semaine prochaine.