Comment la DGSE accède à l'ensemble des réseaux d'Orange

Par latribune.fr  |   |  543  mots
La collecte "libre de tout contrôle" concerne aussi bien des Français que des étrangers car les données "sont partagées avec des alliés étrangers comme le GCHQ". (DR)
Un accès "total, hors de tout contrôle" aux réseaux d'Orange et aux flux de données qui y circulent. Selon une note extraite des archives de la NSA par Edward Snowden, la DGSE, service de contre-espionnage français jouit d'un accès très privilégié au réseau de l'ancien France Télécom.

En novembre dernier, Stéphane Richard, PDG d'Orange, avait déclaré que sa société voulait être exemplaire en matière de protection des données de ses clients. C'était, explicait-il, l'une des priorités du groupe.

Mais selon un document des services secrets techniques britanniques (GCHQ) extrait des archives de la NSA par Edward Snowden, les services de renseignement français disposent depuis des décennies d'un "accès total, indiscriminé et hors de tout contrôle" aux réseaux d'Orange et aux flux de données qui y transitent.

"Strict respect des lois"

C'est ce que révèle jeudi Le Monde. Si le document cite un opérateur de télécommunication français, sans préciser lequel, le quotidien identifie l'ancien France Télécom grâce à "l'ancienneté de leurs liens et la description des savoir-faire spécifiques de l'entreprise".

Interrogé par Reuters, l'opérateur affirme que cette coopération s'effectue en toute légalité :

Orange, comme tous les opérateurs, a des relations avec les services de l'Etat en charge de la sécurité et des Français. Ces relations se font dans le strict respect des lois et en toute légalité, sous la responsabilité de l'Etat et du contrôle des juges.

Partage "avec des alliés étrangers"

Selon le document de la GCHQ, la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et l'opérateur historique français, dont l'Etat possède toujours 27%, "travaillent ensemble pour améliorer les capacités nationales d'interception sur les réseaux de communication et collaborent pour casser les cryptages de données qui circulent dans les réseaux".

La collecte "libre de tout contrôle" concerne aussi bien des Français que des étrangers car les données "sont partagées avec des alliés étrangers comme le GCHQ", ajoute Le Monde. Cette coopération entre la DGSE et Orange serait portée par des personnes habilitées secret-défense au sein de l'opérateur et pérennisée depuis au moins 30 ans par des ingénieurs qui feraient la navette entre les deux institutions.

Ce lien est en effet géré par "un très petit nombre de personnes", habilitées au secret-défense "au sein de trois services" :

  • La direction des réseaux, qui gère les stations d'atterrissement, où accostent les câbles sous-marins France Télécom-Orange touchant la France. et par lesquels transitent les flux massifs de données collectées ;
  • La direction internationale d'Orange, qui gère les filiales de téléphonie mobile ;
  • La direction sécurité, "chasse gardée des anciens de la direction technique de la DGSE", et "principal interlocuteur des services secrets".

"Délégation de service public"

Une source au plus haut sommet de l'Etat citée par Le Monde indique que si la puissance publique est devenue minoritaire au sein d'Orange, le plus ancien opérateur français est considéré comme une "délégation de service public".

Sébastien Crozier, président du syndicat CFE-CGC d'Orange, estime dans Le Monde que le recueil massif de données par les Etats "n'obéit à aucune loi" et que les opérateurs, quelle que soit leur taille, n'ont "pas les moyens de résister".