La vérité sur les chiffres de l'immobilier

Par Mathias Thépot  |   |  873  mots
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Que ce soit en matière de prix, de transactions ou de taux de crédits, la multitude de données, parfois contradictoires, publiées par les professionnels de l'immobilier entretient un flou sur les véritables tendances de marché. Tentative de tri.

Face au flux d'informations propagé par les professionnels de l'immobilier et repris régulièrement par les médias, il devient difficile d'avoir une vision claire des tendances de marché. Que ce soit en matière de prix, de nombre de transactions, ou de taux de crédits, ces informations peuvent se contredire du jour au lendemain sans explication évidente.

Dernier exemple en date : deux réseaux d'agences immobilières, Guy Hoquet et Century 21 ont publié des prévisions divergentes. Alors que le premier anticipe une baisse généralisée des prix de l'immobilier dans l'ancien en 2013 allant jusqu'à 10% dans les zones les moins tendues de France, Century 21 est convaincu que les prix devraient se stabiliser, voire remonter légèrement au second semestre 2013. "La baisse annuelle ne devrait être, sur l'ensemble de 2013, que de 1?% à 3?%", estime ainsi son président, Laurent Vimont. Il est vrai que les agents immobiliers ont en fait parfois intérêt à accentuer le trait sur des baisses de prix à venir. Ce, pour inciter les vendeurs à réduire le leur et inciter faciliter les transactions.

"Il faut faire accepter l'idée aux vendeurs qu'ils doivent baisser leur prix pour fluidifier le marché", poursuit Laurent Vimont. Et pourquoi pas "provoquer une prophétie auto-réalisatrice où l'on verrait les vendeurs accepter une baisse des prix plus importante qu'escomptée", ajoute-t-il.
En réalité, les données les plus fiables sur l'évolution des prix sont les chiffres des notaires certifiés par l'Insee, mais ils sont publiés avec deux mois de retard.

Combien de transactions en 2013 ? 

De même en matière de transactions, la Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim) ou Century 21 se prêtent au jeu des pronostics, en transposant ce qu'ils constatent dans leur réseau à l'échelle nationale. Une marge d'erreur existe donc, puisque les agents immobiliers ne représentent pas plus de 50% du marché des transactions en France.

Là aussi, les chiffres des notaires font foi mais sont communiqués avec du retard : alors que la Fnaim et Century 21 présentaient un bilan chiffré des transactions en 2012 en France en janvier, les notaires ont attendu début avril pour publier leurs données. Ce laps de temps est dû d'un côté aux formalités administratives qui séparent le compromis de vente -sur lequel les agences immobilières s'appuient- et la signature définitive chez le notaire ; et de l'autre à la lenteur relative des remontées d'informations des notaires. Cependant les choses évoluent. Les notaires de certains départements, comme Paris et les Hauts-de-Seine, font désormais parvenir leurs données plus rapidement et les communiquent au moment de la signature du compromis de vente.

Les taux de crédits vont-ils remonter? 

Concernant les taux d'intérêt de crédits immobiliers, la cacophonie devient totale. Plusieurs courtiers ont ainsi annoncé ces derniers mois une remontée des taux à venir, alors que l'organisme de référence Crédit Logement publiait les mois suivant une nouvelle baisse.
Les courtiers ont en fait la conviction que les taux de crédits immobiliers réagissent à des conditions macro-économiques de marché. Résultat, chacun a son analyse sur la future situation de l'économie européenne qui impactera les taux et livre ses prévisions. "Il y a donc un décalage de 1 à 3 mois", entre les annonces des courtiers et le verdict de Crédit Logement, indique Philippe Taboret, directeur général adjoint du courtier leader du marché Cafpi. D'autant que de plus en plus de courtiers veulent avoir leur part du gâteau dans les médias. "Ceux qui parlent très souvent n'ont pas beaucoup de recul. Il faut savoir lisser toutes ces informations", estime Philippe Taboret.
En outre, tous les courtiers n'ont pas le même positionnement territorial ou commercial. Certains ont pignon sur rue, d'autres sont exclusivement en ligne, ils ne visent donc pas le même type de clients qui n'empruntent pas au même taux. Leur vision globale marché peut donc parfois s'avérer biaisée.

Un marché très complexe

Mais si tous ces opérateurs publient des chiffres différents, c'est avant tout parce que le marché est aujourd'hui d'une complexité inouïe. Dans les zones tendues, l'offre et la demande ne s'ajustent pas, la peur de réaliser une mauvaise opération prend le dessus sur la rationalité économique. "La complexité du marché aujourd'hui est réelle, nous sommes dans une période de rupture où le marché se cherche", indique la chambre des notaires de Paris. L'hétérogénéité du marché français amène à se poser une autre question : est-il bien pertinent de publier des données nationales, tous types de logements confondus ? Car les prix à Paris ne se comportent absolument pas comme ceux de Clermont-Ferrand ; et les prix au mètre carré des maisons ne varient pas de la même manière que ceux des appartements, qui eux-mêmes diffèrent en fonction des surfaces. 

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