Immobilier : comment rendre le logement moins cher ?

Par Mathias Thépot  |   |  1008  mots
La réduction du principal poste de dépenses des ménages semble aujourd'hui être une absolue nécessité sur un plan social... mais aussi sur un plan économique.
Les impacts économiques et sociaux dévastateurs liés à la cherté du logement méritent que l’on s’y attaque. Les acteurs du logement débattent de ce sujet majeur lors du congrès HLM de Lyon qui se déroule du 23 au 25 septembre.

A en croire les experts, tenter de faire baisser les prix des logements privés et sociaux qui sont trop élevés pour les Français relève presque d'une équation insoluble. Pourtant, la réduction du principal poste de dépenses des ménages semble aujourd'hui être une absolue nécessité sur un plan social... mais aussi sur un plan économique. Les prix élevés du logement en France "plombent la compétitivité du pays", déplore ainsi Marie-Noëlle Lienemann, ancienne ministre du Logement, lors du congrès HLM de Lyon qui se tient en ce moment (du 23 au 25 septembre).

"C'est du pouvoir d'achat stérilisé, qui n'est pas alloué au soutien de la production, de l'industrie, des services, et donc à l'emploi", ajoute-t-elle. En Ile-de-France tout particulièrement, "les entreprises rencontrent de plus en plus de difficultés à recruter dans certains métiers car les prix des logements trop élevés font hésiter les salariés à déménager", constate Eric Thuillez, directeur général de l'Union des Entreprises et des Salariés pour le Logement.

Le logement social, une réponse ?

Le secteur du logement social peut, dans ce cadre, apporter des réponses salvatrices car il propose des loyers abordables dans les zones tendues. Cependant ce secteur est, comme le privé, désormais soumis à une nouvelle équation économique. "Le modèle économique de la construction de logements sociaux -basé sur les subventions de l'Etat, les aides d'Action logement, les financements de la Caisse des dépôts et les fonds propres des organismes- est aujourd'hui déséquilibré", explique Alain Cacheux, président de la Fédération nationale des Offices Publics de l'Habitat. En effet, "ces dernières années, la part des fonds propres des organismes mobilisés par unité de construction est passée de 5 à 15% car il y a une diminution progressive des subventions de l'Etat ainsi que des financements", détaille-t-il.

Baisser le coût de revient ?

Dans ce contexte financier tendu, la principale solution est de diminuer le coût de revient des logements. Pour ce faire, d'aucuns jugent qu'il faut s'attaquer au prix trop élevé du foncier, mère de toutes les batailles. "Le prix du foncier a pris 700% de sa valeur en 35 ans !", déplore Marie-Noëlle Lienemann. Pour le député PS Daniel Goldberg, il ne faut pas hésiter à mettre en œuvre des moyens forts pour lutter contre la rétention foncière des particuliers. Ainsi, il propose de taxer les terrains non bâtis "à hauteur de leur valeur vénale lorsque ceux-ci sont situés en territoire tendu et à proximité d'opérations publiques d'investissement" pour construire des logements.

De telles mesures coercitives s'imposent presque... "Nous ne manquons pas de foncier pour des bureaux ou des commerces. Pourtant nous en manquons pour construire des logements !", s'indigne Bernard Coloos, l'un des directeurs de la Fédération française du bâtiment. "Nous sommes devant un problème de régulation, agrémenté d'une fiscalité aberrante, où le nombre de constructions a été divisé par trois alors que le prix du foncier n'a pas diminué", ajoute-t-il.

S'attaquer aux coûts de construction

Au delà du foncier, les acteurs du logement social s'attèlent à réduire les coûts de construction en France, qui "s'ils ne sont pas les plus élevés en Europe, sont ceux qui ont crû le plus rapidement ces dernières années par rapport aux autres pays du Vieux continent", constate Bernard Coloos. Pour les diminuer, la maquette numérique, aussi appelé BIM, qui permet de créer une représentation numérique des caractéristiques physiques et fonctionnelles d'un bâtiment, est souvent évoquée comme la solution miracle... même si elle-même représente un coût important, presque prohibitif, pour les petites entreprises. Elle pourrait du reste permettre "de simplifier et de rationnaliser les coûts globaux de construction qui se répercutent in fine dans les loyers", explique Odile Renaud-Basso, directrice générale adjointe de la Caisse des dépôts.

Agir sur la demande ?

Certes, les pistes pour abaisser le coût de l'offre de logements existent, mais seront-elles suffisantes ? Car, comme aime à le rappeler Marie-Noëlle Lienemann, l'écart entre le stock (33,2 millions de logements en France) et le flux (un peu plus de 300.000 logements mis en chantier lors des douze derniers mois ) est tel qu'il faudra attendre une éternité pour réduire le prix des logements si l'on ne stimule que l'offre. Agir sur la demande semble donc nécessaire dans le secteur social et dans le secteur privé pour que, à court et moyen terme, le pouvoir d'achat des ménages soit sauvegardé.

L'encadrement des loyers aurait notamment pu être salvateur à court terme dans l'environnement économique actuel, mais le nouveau Premier ministre Manuel Valls n'en veut plus. Pourtant cette mesure était l'un des engagements de François Hollande durant sa campagne, et a même été votée il y a quelques mois par le Parlement. Le recul du gouvernement sur l'encadrement des loyers a le don d'irriter Christophe Robert, le délégué général adjoint de la Fondation Abbé Pierre. Pour lui, appliquer ce dispositif n'est en rien, comme cela a été dit, "une attaque des propriétaires et du système économique, mais c'est regarder la société telle qu'elle est aujourd'hui et oser s'y confronter".

Augmenter les APL?

Christophe Robert dénonce également dans le secteur du logement social le décrochage, ces dernières années, des aides personnalisés au logement (APL) par rapport aux loyers des logements conventionnés. Il milite pour une "nouvelle adéquation entre les plafonds APL et les loyers du logement social". Une telle mesure aura certes un coût pour l'Etat, mais celui-ci, en débloquant près de un milliard d'euros pour le logement intermédiaire, et en élargissant le dispositif fiscal d'aide à l'investissement locatif, semble encore disposer de marges de manœuvre.

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