Immobilier  : comment réformer la fiscalité du foncier  ?

Par Mathias Thépot  |   |  748  mots
Comment mobiliser le foncier disponible pour construire plus ?
Un rapport sur la mobilisation du foncier privé en faveur du logement milite pour réformer en profondeur la fiscalité du foncier. Il propose de supprimer les taxes sur les transactions et d'augmenter d'autant les taxes sur la détention de l'immobilier, c'est-à-dire les taxes foncières.

Ce sera certainement le principal sujet de la dernière année de mandat du gouvernement en matière de logement : optimiser la mobilisation des fonciers publics et privés afin de fluidifier le marché de la construction de logements. On constate déjà plusieurs actions allant dans ce sens.

De son côté, le délégué interministériel à la mixité sociale dans l'habitat, Thierry Repentin, s'occupe d'accélérer la mobilisation du foncier public avec une certaine efficacité - 70 terrains publics ont été vendus en 2015. En parallèle, deux rapports sur la mobilisation du foncier privé en faveur du logement sont parus à moins d'un mois d'intervalle : un rapport parlementaire datant du 16 février dernier du député PS Daniel Goldberg - qui recommande notamment de mettre au même niveau constitutionnel le droit de propriété et le droit au logement - et un autre demandé par le gouvernement au président de l'Observatoire régional du foncier en Île-de-France, Dominique Figeat, et qui a été présenté ce lundi.

Rétention du foncier

Dans ces rapports, de multiples propositions sur la nécessité de donner davantage de transparence aux transactions et aux prix sur les marchés fonciers français ont été formulées. Le but étant toujours de lutter contre la rétention foncière, afin d'apporter de la fluidité sur ce marché et donc plus de capacité à construire pour répondre à la demande de logement.

Mais parmi ses 30 propositions, le rapport Figeat milite aussi pour une refonte de la fiscalité du foncier bâti et non bâti. Car au-delà des sujets relatifs à la transparence, « il est illusoire de penser que nous pouvons agir efficacement face aux comportements de rétention du foncier sans traiter le sujet de la fiscalité », a indiqué Dominique Figeat au moment de remettre son rapport aux ministres du Logement Emmanuelle Cosse et du Budget Christian Eckert.

Moderniser la fiscalité

Si son rapport propose un moratoire sur la fiscalité à court terme, il juge en revanche nécessaire de construire à terme une nouvelle fiscalité foncière plus moderne et plus efficace. Ainsi Dominique Figeat propose trois grandes pistes fiscales, dont la première est un préalable indispensable aux deux autres: réviser les valeurs locatives qui servent à calculer les taxes foncières, et dont les bases n'ont pas été modifiées depuis plus de 40 ans. Des expérimentations allant dans ce sens sont, certes, déjà engagées dans 5 départements pour ce qui concerne les locaux d'habitations. Mais il reste à mener ce même processus pour les terrains constructibles.

Une fois cette réforme menée, il sera alors possible de modifier la politique fiscale immobilière en France. Le rapport Figeat propose ainsi de transférer la fiscalité actuelle assise sur les transactions -  les droits de mutation à titre onéreux (DMTO)  - vers une fiscalité assise sur la détention des biens et des terrains, soit concrètement les taxes foncières sur le bâti et le non bâti. Une telle mesure favoriserait, selon le rapport « la liquidité du marché immobilier et améliorerait l'allocation sur les marchés immobiliers et fonciers ».

Pour une super taxe foncière

Ce transfert des DMTO sur la taxe foncière, qui reviendrait donc à créer une "super taxe foncière", remettrait cependant à plat le système de financement des collectivités territoriales. Il faudrait donc bien s'assurer que les départements qui perçoivent 80 % des DMTO ne soient pas perdants si une telle refonte était mise en oeuvre.

Concernant la taxation des plus-values de cessions des terrains à bâtir, des marges de manœuvre sont en revanche possibles à court terme. Et si le rapport Figeat relaie l'idée émise par les professionnels de l'immobilier d'inverser le barème d'abattement des plus-values, en le rendant dégressif et donc hyper avantageux à court terme, il privilégie clairement une autre proposition : supprimer les abattements pour durée de détention en intégrant un dispositif qui prendrait en compte l'inflation, ainsi qu'un niveau d'imposition plafond. Ceci permettrait concrètement de limiter l'imposition des plus-values lorsque celles-ci ne sont pas déconnectées de la hausse du côut de la vie.

Ces mesures permettraient aussi, selon le rapport, de contourner les avis du conseil constitutionnel qui avait déclaré contraire à la constitution les deux tentatives du gouvernement en 2013 et en 2014 de supprimer les abattements pour durée de détention sur les plus-values de cessions des terrains à bâtir.