Immobilier : les locataires sont le « cadet des soucis » des agences immobilières

Par latribune.fr  |   |  805  mots
Près de 4 agences immobilières sur 10 (38%) ne fournissent pas d'informations détaillées sur le bien en location aux locataires candidats, note l'UFC-Que Choisir.
Malgré de nouvelles réglementations, les pratiques des agences immobilières vis-à-vis des locataires restent peu satisfaisantes, selon l'association de consommateurs UFC-Que Choisir.

Dans une enquête, l'association de consommateurs UFC-Que Choisir s'indigne des pratiques des agences immobilières.

"Les services des agences immobilières sont très chers, en-dessous de tout et, en plus, elles violent la loi. Cela fait beaucoup pour une profession qui est dans notre collimateur, compte tenu de l'enjeu de l'accès au logement en France", a estimé Alain Bazot, président de l'UFC-Que Choisir, en présentant l'étude.

Au terme d'une enquête de terrain auprès de 1.246 agences immobilières, réparties dans 76 départements, l'association de défense des consommateurs dit avoir constaté que la transparence était "aux oubliettes" et dénonce la persistance d'"excès à tous les étages". Au vu de ce constat "catastrophique", l'UFC-Que Choisir "met en demeure" 392 de ces agences "de se conformer à leurs obligations légales et réglementaires", faute de quoi elle envisagera des recours judiciaires.

Un service fort limité

Selon l'UFC-Que Choisir, "le service au candidat locataire est fort limité" car près de 4 agences sur 10 (38%) n'ont pas fourni d'informations détaillées sur le bien en location.

"On peut s'interroger sur la valeur ajoutée des agences et l'opportunité de passer par elles", estime Alain Bazot. "Vous avez cent fois plus d'informations sur un site tel que Airbnb pour une location de vacances de quelques jours ! Avec une agence immobilière, il faudrait louer quasiment les yeux fermés, pour un budget considérable, un bien pendant plusieurs années", dit-il aussi.

Plus grave, les agents immobiliers exigent régulièrement des locataires candidats, lors de la constitution de leur dossier, des "documents interdits", c'est-à-dire des pièces administratives qu'ils ne sont pas autorisés à demander. Ainsi, en 2015, "81% des agences enquêtées n'ont pas hésité à demander au moins un document interdit", principalement le RIB (relevé d'identité bancaire), contre 62% lors d'une enquête de 2011.

Les locataires sont « le cadet des soucis » des agences immobilières

Au final, les candidats locataires sont "le cadet des soucis des agences immobilières, ils leur paient des honoraires très élevés et c'est à peu près tout", s'indigne Alain Bazot. "Elles sont quasi exclusivement au service du propriétaire". Parmi les agences visitées, plus d'une sur trois (35% contre 28% en 2011), n'affichait pas systématiquement le diagnostic de performance énergétique (DPE) des logements à louer. Or, le coût du chauffage est déterminant pour le budget du locataire, souligne l'UFC. De même, moins d'une agence sur cinq (18%) respecte "l'information détaillée" sur les honoraires de location, qui doit distinguer les frais d'agence de l'état des lieux. Ce dernier peut soit être réalisé par un huissier "pour un coût moindre", soit être établi sans frais, d'un commun accord, par le propriétaire et le locataire.

Les honoraires en hausse dans les zones non tendues

Aussi plus d'un quart (26% contre 21% en 2011) des agences n'affichent toujours "aucune information en vitrine" sur leurs honoraires, alors que c'est une obligation légale qui date de 25 ans, s'insurge l'association. Enfin, si 9 agences immobilières sur 10 (94% précisément) respectent les plafonds légaux d'honoraires de location facturés au locataire, l'ambition du législateur, qui était de les diviser par deux avec la loi Alur du 24 mars 2014, portée par l'ex-ministre du Logement, Cécile Duflot, "se solde par un échec". Ils n'ont baissé "que de 20%" en zone très tendue et de 10% en zone tendue. Enfin, en zone détendue, ces plafonds ont même permis aux agences d'augmenter leurs tarifs de 5%, s'indigne l'association. L'UFC demande à la ministre du Logement Emmanuelle Cosse d'abaisser ces plafonds légaux et aux directions départementales de la protection des populations (DDPP) d'intensifier leurs contrôles.

La Fnaim se dit prête à agir, Foncia se dit outré du ton de l'UFC

A la Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim), qui compte quelque 11.000 professionnels adhérents (dont 92% d'agents immobiliers), le président Jean-François Buet se dit "prêt à agir s'il s'avère que des agences affiliées ne respectent pas la loi". La fédération "dispense des formations et informe régulièrement ses adhérents sur les évolutions législatives et réglementaires", précise-t-il à l'AFP. Elle a aussi créé un Comité d'éthique et de déontologie qui a prononcé 75 sanctions, dont 25 radiations, depuis 2004. "La majorité des agences font leur travail correctement, mais le métier est de plus en plus compliqué et chronophage, en raison d'un grand nombre de nouvelles obligations", estime Jean-François Buet. De son côté, François Davy, président du réseau Foncia, fustige le "ton outrancier" de l'UFC et souligne que "bien plus d'abus sont commis" dans les locations entre particuliers, qui représentent 70% du total.

"S'il y a des manquements à la législation, je le regrette, mais elles sont minoritaires", assure-t-il aussi.

(Avec AFP)