Al Qaïda en grande partie financée par les enlèvements de ressortissants français ?

Par latribune.fr  |   |  516  mots
Le 30 octobre dernier, François Hollande accueillait les quatre otages libérés, retenus au Niger. La France participerait indirectement au financement d'Al-Qaeda, via le versement des rançons.(AFP)
Les pays européens, et la France au premier rang, joueraient un rôle indirect dans le financement des groupes terroristes via le versement de rançons en vue de libérer leurs otages, pointe une étude du New York Times, parue le 29 juillet.

58 millions de dollars. Ce serait le total des rançons versées par la France pour la libération de ressortissants français enlevés au Maghreb et au Moyen-Orient selon une enquête du New York Times, parue le 29 juillet. Celle-ci s'appuie sur des documents internes à l'organisation terroriste qu'un reporter de l'agence AP a pu se procurer au Mali.

Des paiements français pour des otages étrangers

Dans le détail, quelque 40,4 millions de dollars auraient ainsi été versés entre 2010 et 2013 pour la libération des quatre otages par "une entreprise contrôlée par l'Etat" français et 17,7 millions de dollars en échange de trois otages en 2011, dont un togolais et un malgache.

Pour des raisons stratégiques, le Quai d'Orsay nie régulièrement le versement des rançons.  Laurent Fabius, le ministre des Affaires étrangères le réaffirmait encore dans une interview le 27 avril concernant des otages en Syrie:

"l'État français ne [verse] aucun argent"

>> Comment le Quai d'Orsay protège ses expatriés en temps de crise

Aide au développement?

Si des versements ont bien été réalisés, l'argent aurait été transmis par le biais de réseaux intermédiaires et masqué par exemple sous forme de financements d'aide au développement, rapporte le New York Times. En outre des entreprises publiques seraient également dans la boucle.

Quoi qu'il en soit, de tous les pays étudiés, c'est la France qui serait la première pourvoyeuse de fonds. Loin derrière d'autres pays européens se seraient révélés moins généreux: 12 millions de dollars pour la Suisse et 3,2 millions pour l'Autriche.

Le "business" des enlèvements

Les enlèvements sont désormais devenus une tactique à part entière pour le financement propre d'Al-Qaïda. Les rançons obtenues ont fini par constituer un véritable revenu pour les entités terroristes.

10 millions d'euros par otage?

Et le "business" des kidnappings semble prospérer. Le montant des rançons par personne enlevée aurait tourné autour de 200.000 dollars en 2003 pour atteindre jusqu'à 10 millions en 2013, toujours d'après le New York Times.

Un spécialiste du financement d'Aqmi (Al Qaïda au Maghreb islamique) affirmait à la Tribune en janvier 2013 que la libération d'un otage était chiffrée à environ 2 millions d'euros en moyenne.

>> Pour tarir le financement d'Aqmi, "il ne faut plus payer de rançon"

Au total, quelque 125 millions de dollars auraient ainsi été engrangé par le groupe terroriste depuis 2008. Juste pour l'année 2013, 66 millions de dollars auraient été versés, souligne le New York Times.

Un tiers d'otages français

Les négociateurs, précise le New York Times, estiment que les branches d'Al-Qaïda ciblent les otages au regard de leur nationalité, ayant désormais déterminé quels étaient les payeurs.

Ces cinq dernières années, parmi les cinquante-trois otages retenus par Al-Qaïda, un tiers sont Français. Par contraste, les Etats-Unis et le Royaume-Uni ont affiché un refus net de verser toute rançon et le nombre de leurs otages en ressort diminué.