Le fichage des allocataires sociaux refait surface

Par Clarisse Jay  |   |  474  mots
Reuters. Le ministre du Travail Xavier Bertrand a confirmé la mise en place d'un fichier des allocataires sociaux à la fin de l'année.
Ce projet qui date de 2007 fait à nouveau polémique. Le gouvernement veut le mettre en place à la fin de l'année. Mais les plus gros fraudeurs sociaux seraient en fait les employeurs et les professionnels de santé.

Comment faire du neuf avec du vieux... Il aura suffit que le ministre des Transports Thierry Mariani indique par voie de presse ce week end vouloir mettre en place un "fichier généralisé des allocataires sociaux" pour que le sujet refasse polémique comme au premier jour. Surtout après que le ministre du Travail Xavier Bertrand a confirmé son entrée en vigueur à la fin 2011.

Pourtant, le répertoire national commun de la protection sociale (RNCPS), qui recensera tous les bénéficiaires de prestations sociales, a été créé par la loi de financement de la Sécurité sociale de 2007 et sa mise en place encadrée depuis un décret de 2009 et avalisée par la Cnil. Ce que s'est sentie obligée de rappeler dans un communiqué la ministre des Solidarités et de la cohésion sociale, Roselyne Bachelot, précisant qu'au-delà de la "lutte contre toutes les formes de fraude à la Sécurité sociale", ce répertoire "destiné à fiabiliser les informations déclarées par les allocataires va permettre d'avoir une photographie complète de la situation d'un assuré". Bref, outre la seule traque des fraudeurs, le RNCPS vise aussi éviter les doublons et simplifier les démarches, a tenu à rassurer Xavier Bertrand.

Fraude rare

Une façon de désamorcer la polémique. Car ce projet de fichage passe d'autant plus mal en ce moment que la précarité progresse et que les efforts du gouvernement pour réduire le déficit public  fait craindre de nouvelles coupes dans les budgets sociaux. Surtout, à regarder les chiffres, n'est pas le plus fraudeur celui que l'on croit. Le PS a ainsi dénoncé lundi "une insupportable manoeuvre accusatoire". Sur les 458 millions d'euros de fraudes à la Sécurité sociale détectés en 2010, les fraudes aux prestations (RSA, allocation logement...) pèsent certes environ 55%, mais celles aux prélèvements (les employeurs ne déclarant pas) arrivent derrière avec 185 millions. Et on reste loin de la fraude aux impôts (2,5 milliards d'euros). Par ailleurs, la fraude réelle est estimée à 20 milliards d'euros dont 8 à 15 milliards sur les prélèvements.

Quant à la fraude à l'assurance maladie (156 millions d'euros détectés en 2010), elle provient en grande majorité, selon un rapport de la Délégation nationale à la lutte contre la fraude dévoilé par Les Echos, des professionnels de santé : 71 millions des hôpitaux et des cliniques (déclaration de séjours plus longs que la réalité), 13 millions des infirmiers libéraux (surfacturations) et 7 millions des ambulanciers. Même les fraudes aux arrêts de travail le sont parfois avec la complicité des employeurs. Selon le directeur de la répression de la fraude à l'Assurance maladie cité par Les Echos, Pierre Fender, la fraude à l'Assurance maladie reste rare, et est "probablement inférieure à 1% du montant des prestations versées".