Hollande va-t-il vraiment matraquer les classes moyennes ?

Par Ivan Best  |   |  762  mots
François Hollande affirme ne mettre que les "riches" à contribution Copyright Reuters
Selon l'UMP, les classes moyennes sont directement visées par le programme fiscal de François Hollande. Mais le projet du candidat PS consiste surtout à remettre en cause des niches : l'angle d'attaque du camp sarkozyste s'en trouve affaibli.

L?UMP, qui a réussi à faire reculer François Hollande sur sa réforme du quotient familial, peut-elle le mettre en difficulté sur l?ensemble de son programme fiscal, utilisant le thème du matraquage des classes moyennes? C?est ce que tentent Laurent Wauquiez et Gilles Carrez, en diffusant un chiffrage de l?impact individuel des "mesures Hollande".

Le candidat PS est une cible facile, dans la mesure où il a diffusé, dès le 26 janvier, le détail des mesures fiscales qu?il envisage de faire approuver par le parlement, s'il parvient au pouvoir. Ce que n?a pas encore fait le candidat de l?UMP. Un programme précis devrait être présenté la semaine prochaine. Mais toutes les hausses d?impôt à venir seront-elles détaillées par Nicolas Sarkozy ?

Selon l?UMP, les ménages devraient payer pas moins de 15,1 milliards d?euros d?impôts supplémentaires, en cas de victoire socialiste. Le chiffrage des proches de François Hollande n?est pas si éloigné : 11,8 milliards seraient payés par les ménages aisés au titre du "redressement des finances publiques", auxquels seraient ajoutés 2,5 milliards d?euros de hausse des cotisations vieillesse, à la fin du quinquennat, pour financer le maintien de la retraite à 60 ans des "carrières longues".

C?est sur la catégorie des Français appelée à payer la facture que les adversaires divergent : selon François Hollande, seuls les plus aisés sont visés, alors que l?UMP évoque une facture frappant les classes moyennes. Qu?en est-il ? Les principales recettes nouvelles attendues par le candidat socialiste toucheraient assurément les plus favorisés : alignement de la taxation des revenus du capital sur celle du travail (4,5 milliards d?euros), relèvement du barème de l?ISF (2,3 milliards), moindres allègements sur les successions (1,6 milliard), tranche supplémentaire d?impôt à 45% (0,7 milliard, sans parler du taux exceptionnel de 75% sur les très riches)?
Mais cette présentation n?épuise pas le sujet. Les sarkozystes insistent sur d?autres mesures, moins mises en avant par le PS, qui pourraient toucher les classes moyennes.

Ainsi, l?UMP évalue à 120 euros annuels l?impact de la hausse de cotisations retraite (+0,5 point à l?issue du quinquennat), pour un salarié payé 1.500 euros nets par mois ? on est loin de riches. Le parti majoritaire chiffre à 550 euros annuels ce que paierait en plus un smicard travaillant 39 heures par semaine, au titre de la suppression des exonérations pour heures supplémentaires. Là aussi, des salariés modestes seraient incontestablement concernés, les proches de François Hollande ne peuvent le nier, même si Gilles Carrez et Laurent Wauquiez ont sans doute eu la main un peu lourde dans leur évaluation. De même, s?agissant de la remise en cause de l?abattement sur les successions, qui serait ramené à 100.000 euros par enfant (contre 160.000 aujourd?hui) : il en coûterait 8.000 euros de plus par enfant, dans le cas d'un héritage de 300.000 euros (un pavillon de banlieue, selon Valérie Pécresse...). 
En revanche, concernant  l?assujettissement de l?intéressement aux prélèvements sociaux, l?UMP peine à convaincre : il revient aux employeurs de payer les cotisations, et non aux ménages.

En tout état de cause, et c?est là où réside l?habileté du projet socialiste, seules des niches, plus ou moins grandes, sont visées : si les hausses d?impôts annoncées par François Hollande ne concernent pas seulement les riches, aucune taxation générale n?est en vue. Certes,  faire payer plus de cotisations sociales aux travailleurs indépendants, comme le prévoit le candidat socialiste, aboutit à taxer bien au-delà de la clientèle des riches, mais l?argument selon lequel ces indépendants bénéficient d?un régime très favorable, alors qu?ils ont droit aux mêmes prestations que tout le monde, est difficilement parable.
Sur le thème des impôts et des taxes, 34% des Français jugent que le candidat le plus crédible est François Hollande, contre 24% citant Nicolas Sarkozy, selon un sondage BVA rendu public le 26 mars. Comment interpréter ce chiffre ? Les sondés s?attendent sans nul doute à devoir payer plus quel que soit le candidat élu.
Si François Hollande a détaillé la facture qu?il va présenter aux ménages comme aux entreprises, Nicolas Sarkozy prévoit, lui, aussi, d?augmenter les prélèvements obligatoires (+25 milliards d?euros), selon le programme de stabilité transmis en début d?année à Bruxelles.