La guéguerre au sein du patronat s'intensifie

Par Fabien Piliu  |   |  768  mots
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Le Medef et la CGPME continuent de se bouder. Et les coups bas pleuvent. Résultat, le patronat a toutes les chances d'aborder en ordre dispersé la conférence sociale que prépare le gouvernement.

Reçus ce mardi après-midi à Matignon pour préparer la grande conférence sociale prévue avant la mi-juillet à l'Elysée, le Medef et la CGPME n'ont pas fait front commun devant Jean-Marc Ayrault, le Premier ministre et Michel Sapin, le ministre du Travail, Arnaud Montebourg, le ministre du Redressement productif, Marylise Lebranchu à la Fonction publique et Marisol Touraine aux Affaires sociales. De son côté, l'UPA, qui défend les intérêts des artisans, elle ne peut que compter les points.

Le sujet de discorde ? Les deux organisations patronales n?ont toujours pas réglé le sévère différend qui les oppose depuis la mi-mars. Le 15 mars, la très puissante Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM) annonçait dans la foulée de la réunion de son bureau directeur la suspension du paiement sa cotisation annuelle à la CGPME dont le montant devait s?élever à 150.000 euros. Soit environ 10% des ressources financières annuelles de la Confédération.

La représentativité divise

L?UIMM se serait désolidarisé de son partenaire historique qu?était la CGPME pour la faire revenir sur ses positions à propos de la représentativité patronale. Alors que le Medef et l?UIMM ne souhaitent pas modifier les règles en vigueur, basées sur le nombre de cotisants, la CGPME suggère de recourir à des élections. La réaction de la CGPME ? L?UIMM a tout simplement été radiée de la Confédération. Hasard ou coïncidence, cette décision de l?UIMM intervint quelques jours après que Laurence Parisot, la présidente du Medef, a déclaré souhaitable et urgent un rapprochement entre les organisations patronales les plus importantes. Le Mouvement et la CGPME en clair. Des déclarations qui n?ont pas du tout été appréciées par la CGPME, mise devant le fait accompli.
Depuis, le dialogue est rompu. Les responsables du Medef et de la CGPME ne se sont pas rencontrés. Selon nos informations, les deux lettres adressées par Jean-François Roubaud, le président de la CGPME, à Laurence Parisot sont restées sans réponse.

Le 3 avril, le Conseil d'Etat, saisi à l'initiative de la CGPME, a dans une décision du 28 mars 2012 que s'est procurée La Tribune, annulé la décision prise le 29 juillet 2009 par le président du conseil d'administration du Pôle emploi, à l'époque Christian Charpy. Cette décision portait sur la répartition des cinq sièges patronaux (3 pour le Medef, 1 pour l'UPA et 1 pour la CGPME) dans 12 instances paritaires régionales (IPR) de l'institution. La CGPME avait estimé que cette répartition ne prenait pas assez en compte sa représentativité. Autrement dit, celle-ci avantageait le Medef.

On oublie de s'inviter !

Depuis, les coups bas pleuvent. Selon nos informations, le 14 mai, à l?initiative du Medef, le Comité de liaison des décideurs économiques (Clide), composé du Medef, de la CGPME, de la FNSEA, de l?UNAPL et de l?UPA, s?est réuni. La CGPME ne fut pas conviée... Pour mémoire, le Clide existe depuis 1979. Les membres de cette instance dressent une liste commune pour les élections prud'homales. Cette liste a pour but de proposer des candidats uniques pour représenter l?ensemble des employeurs. Sauf que cette fois-ci, ce ne fut pas les élections prud'homales qui furent évoquées mais la représentativité patronale !

Le 31 mai, Laurence Parisot exigeait dans un communiqué la « PME attitude », citant deux études dont l?une d?entre elles, réalisée par KPMG, fut présentée le matin même par la CGPME dans le cadre de Planète PME, les « universités d?été » de la Confédération. Si l?événement fut bien cité dans le communiqué, le commanditaire de cette étude, à savoir la CGPME, fut ignoré. A son grand dépit.

Les entreprises et leurs salariés en sortiront-ils gagnant ?

Cette mauvaise ambiance au sein du patronat ne serait qu'un épiphénomène si elle se résumait à un simple conflit entre fortes personnalités dans un environnement économique favorable pour les entreprises et leurs salariés. Mais ce n'est pas le cas. Alors que les entreprises seront directement concernées par les sujets abordés lors de cette conférence sociale, à savoir le l'emploi, via le "contrat de génération", le pouvoir d'achat à travers le Smic et salaires ainsi que la protection sociale dont dépendent les retraites, la dépendance et la santé, il aurait été peut-être judicieux de s'accorder, quitte à signer une paix des braves temporaire.