Moscovici ne ferme pas la porte à une "CSG compétitivité"

Par Ivan Best et Philippe Mabille  |   |  720  mots
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Louis Gallois, le nouveau Commissaire général à l'investissement, et les économistes présents aux rencontres économiques d'Aix préconisent un « choc d'offre » sous la forme d'un transfert des cotisations sociales sur la CSG. Pierre Moscovici souligne que cela ne figure pas dans le projet Hollande... Mais si un consensus peut se dégager en ce sens, à l'issue de la conférence sociale...

 A la veille de la conférence sociale, qui devrait aborder ce sujet de la compétitivité des entreprises, économistes et patrons ont imposé ce week-end le thème d'un nécessaire « choc d'offre » lors des 12èmes rencontres d'Aix, sous l'égide du Cercle des économistes. Nouvellement nommé commissaire général à l'investissement, -chargé, donc de gérer les 35 milliards d'euros du grand emprunt- Louis Gallois, en a fait le c?ur de son intervention. Il faut baisser massivement les cotisations salariales payées par les entreprises, afin de réduire le coût du travail. « je crois qu'il faut faire un choc de compétitivité, qui doit toucher le secteur exposé », a-t-il expliqué. « Pour toucher le secteur exposé, il faut que ce choc soit assez massif et qu'il porte sur les cotisations sociales, concernant des salaires relativement élevés. Il s'agit de transférer 30 à 50 milliards pour avoir un effet significatif ». Et de souligner : « on a besoin je crois de créer un choc de confiance dans le pays. Il va falloir à un moment ou à un autre qu'on se rende compte qu'on ne peut pas se contenter de demi-mesures, il faut créer une onde de choc en faveur des entreprises. »

Moscovici favorable si une solution consensuelle se dégage
Transférer les cotisations sociales sur quoi ? La TVA étant exclue par François Hollande, reste la CSG. Le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici n'a pas totalement fermé la porte à une telle réforme, ce dimanche. « Ce n'est pas dans la projet », a -t-il d'abord dit devant la presse. Pour ensuite préciser : « la conférence sociale va aborder la question de la compétitivité. Nous étudierons les propositions en ce sens, les études des économistes qui y sont favorables, afin de voir si, à l'issue de nos travaux, une solution consensuelle peut se dégager ».
De fait, la plupart des économistes approuvent cette orientation. Un expert proche de François Hollande, Philippe Aghion, défend ardemment auprès du chef de l'Etat l'idée d'un « choc d'offre ». Il suggère de transférer sur la CSG l'ensemble des cotisations patronales finançant la maladie et la famille, soit, à terme, 18,1 points de cotisation. Un transfert énorme, représentant près de 110 milliards d'euros -un point de cotisations sociales représente quelque 6 milliards- qui serait largement échelonné. Dans un premier temps, il s'agirait d'augmenter de seulement trois points la CSG, soit 33 milliards d'euros (ou 1,65 point de PIB), un chiffre se situant, donc, dans la fourchette citée par Louis Gallois. « Nous préconisons des réformes structurelles à moyen-long terme, mais à court terme, il est important de relâcher la pression compétitive vis-à-vis de l'Allemagne » souligne Gilbert Cette, co-auteur avec Philippe Aghion, Elie Cohen et Mathilde Lemoine, d'un rapport du Conseil d'analyse économique, qui faisait une proposition similaire dès juin 2011.

Trois points de CSG supplémentaires contre 5,5 points de baisse des cotisations
Comment éviter une perte de pouvoir d'achat des salariés ? La proposition de Philippe Aghion consiste à requalifier les contrats de travail, de sorte que les salariés touchent l'ensemble de leur salaire et des cotisations, qu'elles soient dites salariales ou patronales. L'objectif est de baisser le coût du travail, sans diminuer le salaire net.
Comment parvenir à un tel... miracle ? Si l'on augmente la CSG de trois points (soit 33 milliards d'euros), il est possible de diminuer les cotisations salariales de 5,5 points, pour un rendement global équivalent. Le gain est évident, sur la feuille de paie. Reste à savoir comment le partager entre l'employeur et le salarié.
Les miracles n'existant pas en matière de finances publiques, qui paie ? Si le salaire net est inchangé et les cotisations diminuent, au profit, principalement, des employeurs, qui verraient le coût global du travail diminuer, ce sont les revenus du capital (épargne, placements, revenus fonciers) et les retraites qui paieraient la différence.
Ainsi, les prélèvements sociaux sur les revenus de l'épargne passeraient de 15,5% aujourd'hui à 18,5%. S'agissant des retraités, la hausse serait échelonnée, de façon à ce que les pensions soient gelées, mais ne diminuent pas (du moins en euros courants).
Selon Gilbert Cette, il est possible de transférer sur la CSG les 18,1 points de cotisation famille et maladie en l'espace de quatre ans. Il en résulterait une baisse du coût du travail de 5%.