Budget 2013 : les entrepreneurs espèrent toujours faire plier le gouvernement

Par Fabien Piliu  |   |  791  mots
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Ce mardi commence l'examen du projet de loi de finances 2013 à l'Assemblée nationale. Les entrepreneurs attendent avec anxiété le vote de l'article 6 qui relève la fiscalité des plus-values de cession.

Veillée d?armes dans les rangs des entrepreneurs. Si c?est aujourd?hui que débute à l?Assemblée nationale l?examen du projet de loi de finances 2013, ce ne devrait être que mercredi ou jeudi que les députés étudieront l?article 6 qui cristallise les mécontentements du monde patronal.

Peut-on déduire que les aménagements de cet article -qui relève la taxation des plus-values de cession- envisagés par le ministère du Budget ne leur conviennent pas? «C?est en effet le cas. Lors de notre entrevue à Bercy, programmée avec l?ensemble des représentants des entrepreneurs, le gouvernement avait une oreille très peu attentive. Il n?y a pas eu d?échange entre nous. Ses aménagements semblaient déjà préparés avec un seul objectif: résoudre le problème d?un groupe d?entrepreneurs précis qui ont manifesté sur Facebook. L?essentiel des dégâts générés par cet article 6 existent toujours car ces retouches ne prennent pas en compte la diversité des entreprises», explique Olivier Duha, le président de Croissance Plus, l?association qui défend les intérêts des entreprises de croissance, signataire la semaine dernière, comme une vingtaine d?autres organisations, d?un texte intitulé «Etat d?urgence entrepreneurial».

Parmi les aménagements proposés par Bercy, on peut citer la mise en place d?un régime spécifique pour les cessions effectuées en 2012. Un prélèvement forfaitaire libératoire de 24% leur sera appliqué, au lieu de 19% ici. Pour pouvoir continuer à bénéficier du prélèvement forfaitaire libératoire de 19% en cours actuellement, le vendeur devra posséder au moins 10% du capital pendant au moins deux ans et, au moment de la cession, être toujours en possession d'un minimum de 5% des parts. Le texte initial prévoyait de soumettre une grande partie des plus-values de cession de valeurs mobilières au barème de l'impôt sur le revenu, ce qui aurait pu entraîner une taxation jusqu'à 60%, des plus-values. «Ces aménagements conduisent à la création d?une nouvelle usine à gaz avec des multiples dérogations», avance Olivier Duha.

Des recettes hypothétiques

Le gouvernement a-t-il les moyens de se passer du milliard que cette mesure -selon ses calculs- devrait permettre d?engranger? «L'exécutif fait une erreur car il ne touchera jamais ce milliard car le système sera bloqué si cette mesure est votée en l'état. Il n?y aura plus d?investissements ni de cessions. Ce milliard est totalement hypothétique», poursuit Stanislas de Bentzmann, le vice-président de Croissance Plus.
Et si le gouvernement faisait la sourde oreille, en ne proposant pas de nouveaux aménagements? «Il pourrait créer un statut d?investisseur responsable dans le non coté pour ne pas casser la dynamique en cours, pour ne pas réduire à néant l?amorçage déjà insuffisamment développé en France», espère Olivier Duha. Ainsi, le gouvernement n?abrogerait pas l?article 6, ce qui le mettrait dans une position délicate vis-à-vis de sa majorité bien décidée à voter cet article en l?état, tout en permettant aux investisseurs, aux business angels, aux «family investors» de continuer à investir dans des entreprises non cotées, donc peu liquides. «C'est là que le gouvernement fait une erreur. Il n'y a pas d'aller-retour dans le non coté car les entreprises sont par nature peu liquides. Dans la plupart des cas, les investisseurs retombent sur leurs pieds avec un projet qui marche, quand neuf autres ont échoué», explique Olivier Duha.

Tout le monde est sur les rangs

Les autres organisations patronales ne sont pas en reste. Lors de sa conférence de presse mensuelle, Laurence Parisot, la présidente du Medef a fait une nouvelle charge contre les projets fiscaux du gouvernement jugés «confiscatoires». Lundi, la CGPME a remis aux présidents de groupes parlementaires, au rapporteur général, au président de la Commission des Finances ainsi qu'au président de la Commission des Affaires sociales, la liste des 17.000 entrepreneurs signataires de la pétition qu?elle a fait circulé pour protester contre les mesures jugées anti-entrepreneuriales contenues dans le PLF et le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS).

Qu'en pensent les économistes ? Michel Juvet, stratège chez Bordier et Cie voit cette offensive des entrepreneurs d'un mauvais oeil. "Les recettes fiscales sont déjà très élevées en France. Les augmenter est donc très risqué car au-delà d'un certain seuil, on ne peut augmenter les impôts pesant sur les entreprises sans casser la dynmaique entrepreneuriale et fragiliser ainsi la croissance", explique-t-il.