Même les directeurs financiers français n'investiraient pas... en France

Par Christine Lejoux  |   |  469  mots
96% des directeurs financiers français jugent la fiscalité et le coût du travail comme les principaux freins à l'investissement en France. Copyright Reuters
3% seulement d'entre eux estiment le pays attractif en matière d'investissement, selon un sondage de Deloitte. Les directeurs financiers français dénoncent le poids de la fiscalité et le coût du travail.

Il n'y a pas que les entreprises et les fonds étrangers qui n'ont plus envie d'investir en France. Interrogés par le cabinet Deloitte sur la zone géographique où il sera le plus intéressant d'investir, au cours des six prochains mois, 43% des directeurs financiers français citent l'Asie. Avec 3% seulement d'opinions favorables, la France arrive en toute dernière position, derrière l'Afrique (13%)! Près d'un quart des directeurs financiers des 500 plus grandes entreprises françaises sondés par Deloitte estime même qu'il n'y aura pas pire pays que la France pour investir, au cours du prochain semestre.

Ce que les «DAF» (directeurs administratifs et financiers) français reprochent à l'Hexagone? En premier lieu sa fiscalité et son coût du travail, cités par 96% des responsables financiers comme un frein à l'investissement en France, par rapport aux autres pays de la zone euro. «Ce qui est impressionnant, c'est le caractère massif des réponses», juge Katia Ruet, directeur chez Deloitte.

La fiscalité et la rigidité du droit du travail en tête de leurs préoccupations

Résultat, ce que les directeurs financiers souhaitent des pouvoirs publics, c'est bien moins de défendre le «Made in France», si cher au ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, que de réduire le poids de la fiscalité et des charges sociales, et d'assouplir le droit du travail. Ces deux derniers points arrivent en tête de leurs exigences, avec des proportions respectives de 81% et de 67%, très loin devant la promotion du «Made in France» (10%). Des chiffres qui devraient faire réfléchir le gouvernement, à l'heure où il se murmure que le rapport Gallois sur un «choc de compétitivité», promis pour le 5 novembre, pourrait être enterré.

Les prêts bancaires jugés peu attractifs

Les directeurs financiers français n'en ont pas seulement après les pouvoirs publics. Les banques sont, elles aussi, dans leur collimateur, au moment où 53% d'entre eux s'inquiètent de la raréfaction de la liquidité. Plus d'un tiers (36%) des DAF de France jugent que les prêts bancaires seront la source de financement la moins attractive, au cours des six prochains mois. Et ce, en raison de la future réglementation dite de Bâle III, qui, en obligeant les banques à détenir davantage de fonds propres en face de leurs engagements, les conduira à accorder moins de crédits, ou bien à des taux plus élevés. Les directeurs financiers entendent donc faire la part belle aux obligations (dans 26% des cas) et aux placements privés auprès d'investisseurs institutionnels (17%) pour se financer, dans les prochains mois.

Dans ce contexte, pas étonnant que les directeurs financiers aient le blues. Ils sont 40% à se dire moins optimistes qu'il y a six mois au sujet de la conjoncture économique française, et 16% à s'avouer… beaucoup moins optimistes.