Retraites des parlementaires : le système reste encore avantageux

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  922  mots
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Bien que réformé en 2010, le régime de retraite des parlementaires reste très avantageux. A l'Assemblée, le fameux et très décrié système de la "double cotisation" a quasiment disparu depuis trois ans. Mais les nouvelles règles restent attractives puisqu'elles permettent à un député, après un premier mandat de cinq ans, de pouvoir percevoir une pension égale à 1.200 euros mensuels. Au Sénat, la double cotisation n'existe plus également. Mais un très avantageux système complémentaire par points et un régime de base fonctionnant en partie en capitalisation permet à un sénateur de percevoir une pension moyenne de 4.382 euros.

C'est l'un des sujets favoris au Café du Commerce : le régime de retraite des parlementaires. Mythe, fantasme... Il se raconte beaucoup de choses (parfois fausses) sur ce régime il est vrai hyper spécial. Alors que se profile bientôt une nouvelle réforme des retraites et que la tendance est à l'alignement des conditions de départ à la retraite, quel que soit le régime, il est intéressant de se pencher sur la réalité du régime des parlementaires français.


Assemblée nationale, la double cotisation supprimée... ou presque

La caisse de pensions des députés, créée par une résolution de la Chambre des députés du 23 décembre 1904, est alimentée par une cotisation prélevée sur l'indemnité parlementaire et par une subvention inscrite au budget de l'Assemblée. Ce régime a connu plusieurs évolutions. La dernière réforme date du 3 novembre 2010 : le Bureau de l'Assemblée nationale a alors pris plusieurs décisions tendant à aligner le système des pensions sur celui de la fonction publique et à mettre fin à certaines particularités, notamment, et c'est peu connu, au fameux régime de la « double cotisation » qui a fait beaucoup jaser.

Jusqu'en novembre 2010, les députés pouvaient cotiser doublement à leur caisse de retraite lors des trois premiers mandats (de 5 ans), puis 1,5 fois sur le suivant. Cela permettait donc au parlementaire de cotiser 22,5 ans pour une retraite complète, contre plus de 40 ans aujourd'hui pour un salarié « ordinaire ». Ce système permettait à un député de toucher une allocation vieillesse de 1.500 euros net pour cinq ans de mandat et de... 6.000 euros après 20 ans de mandat. Depuis novembre 2010, ce dispositif de double cotisation a disparu... ou presque. Désormais, les députés peuvent (c'est facultatif) cotiser « que » 1,5 fois sur les deux premiers mandats, 1,33 sur le suivant, puis 1,25 sur ceux d'après. Cette réforme a fait baisser la pension de 30%. Il n'en reste pas moins qu'un député est encore assuré de toucher une pension de près de 1.200 euros après un premier mandat de cinq ans.... Soit un montant quasi équivalent à celui de la pension médiane touchée par les Français (environ 1.300 euros) après une carrière complète.

En revanche, il faut reconnaître que la réforme de 2010 s'aligne totalement sur le régime général pour ce qui est de l'âge légal de départ à la retraite (qui passe de 60 à 62 ans), le taux de cotisation (qui passera de 7,85% à 10,55%, soit le taux de cotisation actuel du secteur privé, d'ici à 2020), et le nombre d'annuités requises (progressivement porté à 41,5 annuités pour une retraite à taux plein). A noter aussi, avantage non négligeable, que les députés ne sont pas soumis à un dispositif de décote en cas d'année manquante : la pension est calculée au prorata du nombre d'années effectuées. Alors que dans le privé, la pension sera amputée d'une décote de 5% par année manquante (dans la limite de 5 ans).

Le Sénat et sa pension moyenne de 4.382 euros

La Caisse des Retraites des Anciens Sénateurs est née d'une résolution votée par le Sénat le 28 janvier 1905. Le droit à pension des membres du Parlement est destiné à pallier la rupture subie dans leur carrière professionnelle du fait de leur élection, et à leur garantir un revenu de retraite.

Lors de sa réunion du 15 décembre 2010, le Bureau du Sénat a décidé d'harmoniser les règles applicables aux Sénateurs avec celles de droit commun, conformément à la loi du 9 novembre 2010 portant sur la réforme des retraites. Comme à l'Assemblée nationale, l'âge possible du départ à la retraite remonte donc progressivement de 60 à 62 ans et la durée de cotisation s'élèvera aussi par étape pour atteindre 41 ans et six mois à compter du 1er janvier 2015 (comme dans le régime général). En revanche, l'ancien système de « cotisations doubles » a été totalement supprimé. Il est replacé par un très intéressant régime de retraite complémentaire par points. Ainsi la pension mensuelle moyenne nette de retraite d'un Sénateur, hors majoration pour enfants, était au 1er avril 2013 de... 4.382 ?. Un mandat de sénateur de six ans offre une pension mensuelle de 1.932 euros ; deux mandats, 3.096 euro. Ainsi la pension mensuelle moyenne nette de retraite d'un Sénateur, hors majoration pour enfants, était au 1er avril 2013 de... 4.382 ?. A noter que le "régime de base" de retraite des snateurs  fonctionne en partie par capitalisation. Les cotisations ne couvant que 43% des dépenses, le reste est donc financé par les intérêts des placements effectués par le Sénat. En 2009, la trésorerie affichait un excédent de... 581 millions d'euros. 


Bref, qu'il s'agisse des députés ou des sénateurs, des réformes sont progressivement menées pour aligner leurs conditions de départ à la retraite sur celles du régime général. Mais il reste tout de même encore de très avantageuses dispositions particulières. Au Parlement, on justifie ces « avantages » par le fait que les régimes des députés et des sénateurs sont totalement autonomes. En d'autres termes, un parlementaire qui part à la retraite et qui a exercé une profession avant (ou après) son ou ses mandat(s), n'a pas le droit d'évoquer les années où il était député ou sénateur pour sa reconstitution de carrière.