Retraite : le projet sur la pénibilité fait hurler le patronat

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  644  mots
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Dans le cadre de la future réforme des retraites, le gouvernement planche sur l'instauration d'un "compte individuel pénibilité" qui permettrait aux salariés exposés à des métiers pénibles d'acquérir des droits pour: partir à la retraite de façon anticipée, ou passer à temps partiel, ou suivre une formation pour changer de métier. Le côut de ce dispositif complexe pourrait atteindre 2,1 milliards d'euros. Il serait financé, notamment, par une contribution des entreprises. Les organisations patronales sont vent debout.

Le gouvernement planche actuellement, dans le cadre de la future réforme des retraites, sur l'instauration pour chaque salarié d'un « compte individuel pénibilité » qui permettrait aux salariés exposés soit de bénéficier d'un congé de formation, soit de passer à temps partiel, soit de partir à la retraite de façon anticipée.

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Le « niet » de la CGPME

Pour la CGPME, c'est « non ». Dans un communiqué, l'organisation patronale des PME dénonce ce projet gouvernemental qui "représenterait un coût supplémentaire de près de 2 milliards d'euros. Ainsi une réforme destinée avant tout à sécuriser le financement du régime des retraites se traduirait par des dépenses supplémentaires. En outre, ce « compte à points », fonction de la pénibilité estimée à partir d'un barème, s'apparenterait à une véritable usine à gaz d'une complexité administrative rarement atteinte. Les TPE/PME seraient les premières victimes de cette nouvelle paperasserie à laquelle elles chercheraient à échapper par tous moyens. Enfin, aux antipodes de l'indispensable réduction du coût du travail, une surcotisation viendrait s'ajouter aux augmentations déjà prévues jusqu'en 2017, accroissant d'autant les difficultés des petites entreprises ». La CGPME sera donc très claire lorsqu'elle rencontrera le Premier Ministre, le 26 août : elle dira « non » à un projet « ratant son objectif initial et risquant de faire des dommages collatéraux graves ».


Des comptes personnalisé de pénibilité donnant droit à des conversions ou des départs anticipés

Ces « comptes pénibilité » avaient été suggérés par le rapport Moreau sur la future réforme des retraites. De quoi s'agit-il ? Les salariés ayant été soumis à des emplois pénibles (travail de nuit, posté, exposition à des produits cancérigènes, etc.) seraient recensés dans la « déclaration de donnés sociales » que doit remplir chaque entreprise. Le salarié obtiendrait un point par trimestre d'exposition. Avec 10 points (soit dix trimestres ou 2,5 années d'exposition) accumulés, le salarié pourrait bénéficier d'un trimestre de droit à congé de formation pour changer de métier. Avec 20 points (soit cinq années), il bénéficierait d'un trimestre de travail à temps partiel avec maintien de la rémunération. Enfin, avec 30 points (soit après 7,5 années d'exposition), le salarié aurait le droit de racheter un trimestre au titre de la retraite. Ce qui lui permettrait donc une retraite anticipée. Un tel dispositif, d'après le rapport Moreau, coûterait environ 2,1 milliards d'euros (1,2 milliard au titre des dépenses de formation, 0,7 milliard pour le financement du temps partiel et 0,2 milliard pour financer les trimestres de retraite).


Quels financements ?

Selon le quotidien « Les Echos », dans son édition du 5 août, ces 2,1 milliards (mais le montant exact dépend du barème de points qui sera adopté in fine ainsi que des plafonds qui seront fixés) pourraient être financés par toutes les entreprises ( y compris celles où il n'y a pas d'emplois pénibles) via l'instauration d'un « forfait pénibilité ». S'y ajouterait une « surcotisation » de cotisation retraite employeurs sur les rémunérations des salariés exposés à la pénibilité, quand il y en a. Enfin, troisième source, il pourrait être fait appel à « la solidarité nationale », via des recettes fiscales ou des abondements de l'Etat à la Sécurité sociale. Mais il faudra bien trouver l'argent ! Alors, hausse de la CSG ? de certaines taxes ? On ne connaît pas encore les intentions du gouvernement, ni d'ailleurs les contours exacts du projet.
Une chose est sûre. Les organisations patronales sont vent debout devant un tel projet, non seulement en raison de son coût mais aussi de sa complexité. Il faut reconnaître que la gestion des « comptes personnels » ne va pas être une mince affaire.