Chômage : la Cour des comptes fustige le régime "privilégié" d'indemnisation des intermittents

Par latribune.fr  |   |  722  mots
Dans ce "référé" rendu public à l'approche des négociations sur l'assurance chômage, la Cour note que l'indemnisation à l'issue des emplois précaires (CCD, intérim, intermittents) constitue une "composante importante du déficit de l'assurance chômage" (4,1 milliards d'euros en 2013, selon les chiffres de l'Unédic) qu'elle impute notamment à l'augmentation de la part des emplois de courte durée sur le marché du travail.
Dans un rapport, les Sages jugent que le mode de calcul spécifique aux intérimaires n'est "ni justifié, ni équitable au regard des règles appliquées aux CDD", d'autant qu'il représente un coût élevé pour la collectivité.

La Cour des comptes n'y va pas avec le dos de la cuillère. Dans un rapport adressé ce mardi au gouvernement, les Sages estiment qu'il faut remettre à plat le système d'indemnisation chômage pour les emplois précaires. La raison ? Il favoriserait trop les intérimaires par rapport aux CDD et privilégierait les intermittents du spectacle.

Dans ce "référé" rendu public à l'approche des négociations sur l'assurance chômage, la Cour note que l'indemnisation à l'issue des emplois précaires (CCD, intérim, intermittents) constitue une "composante importante du déficit de l'assurance chômage" (4,1 milliards d'euros en 2013, selon les chiffres de l'Unédic et 18,6 milliards en déficit cumulé) qu'elle impute notamment à l'augmentation de la part des emplois de courte durée sur le marché du travail. De fait, si le solde (rapport entre contributions perçues et prestations versées par l'Unedic) est positif à hauteur de 12,5 milliards d'euros pour les CDI, il s'avère négatif pour les CDD (-5,9 milliards), les intermittents (-1 milliard) et les intérimaires (-1,5 milliard). Au passage, la Cour confirme une donnée contestée et qui a fait polémique: les besoins de financement du régime des intermittents atteignent un milliard d'euros (1,2 milliard d'allocations versées et seulement 239 millions de contributions perçues. Et ce malgré l'augmentation de la cotisation chômage - qui est passée de 4% à 7% en 2003 -  des entreprises employant des intermittents.

La Cour estime que le mode de calcul spécifique aux intérimaires n'est "ni justifié, ni équitable au regard des règles appliquées aux CDD"

Dans le détail, les Sages estiment que le mode de calcul spécifique existant pour les intérimaires n'est "ni justifié, ni équitable au regard des règles appliquées aux CDD" qui relèvent du régime général, moins favorable.

Dans d'autres pays européens, les règles d'indemnisation sont les mêmes pour les intérimaires et les autres contrats courts, relève la Cour, qui juge "souhaitable" leur "rapprochement". Selon elle, cela permettrait à l'assurance chômage de réaliser une économie d'au moins 300 millions d'euros.

Les intermittents: la "catégorie des demandeurs d'emplois indemnisés bénéficiant de loin des règles les plus favorables".

La Cour se penche ensuite sur le régime des intermittents. Elle ne remet "pas en cause l'existence d'un régime spécifique" et juge "inévitable" qu'il soit déficitaire, vu la nature de leur activité.

Mais elle constate qu'il s'agit de la "catégorie des demandeurs d'emplois indemnisés bénéficiant de loin des règles les plus favorables". Alors que les intermittents, les CCD et les intérimaires sont tous "en situation de précarité". Ce constat pose la question, à ses yeux, du "bon niveau de solidarité interprofessionnelle".

Lire aussi : "Et si le nouveau CDI intérimaire était étendu aux intermittents du spectacle"

Elle propose de différencier artistes et techniciens

Elle remarque aussi que les intermittents quittent pour la plupart leur travail "quelques jours après avoir effectué le nombre de jours nécessaire pour être titulaires de droits et qu'ils retrouvent souvent une activité au moment où ils ont épuisé leurs droits". La Cour préconise donc d'augmenter les cotisations des employeurs (déjà supérieures aux autre entreprises, comme cela est écrit plus haut)  et de les rendre variables "en fonction du nombre d'heures d'intermittence" utilisées.

Elle propose aussi de mieux  différencier les artistes des techniciens (les premiers relèvent de l'annexe 10 de l'Unedic et les seconds de l'annexe 8) , "principaux bénéficiaires de ce régime". Étant souvent dans une situation moins précaire que les artistes, les techniciens pourraient, selon la Cour, se voir appliquer des règles plus proches de celles des intérimaires.

Négociation sur l'indemnisation du chômage à compter de janvier

L'ouverture des  difficiles négociations entre le patronat et les syndicats sur la refonte des règles de l'assurance chômage a pris du retard. Elle devaient débuter cet automne. Mais il y avait embouteillage avec la négociation en cours sur la formation professionnelle. Aussi, elles débuteront finalement en janvier. Un décret à paraitre bientôt va donc proroger, normalement jusqu'au 31 mars 2014, les actuelles règles d'indemnisation du chômage valables, initialement, jusqu'au 31 décembre 2013.