Skype épinglé pour concurrence déloyale face aux opérateurs télécoms

Par latribune.fr  |   |  535  mots
Deux ans après le rachat de Skype par Microsoft en mai 2011, l'ARCEP saisit la justice. (Photo : Reuters)
Une enquête préliminaire a été ouverte sur le service téléphonique proposé par Microsoft via son logiciel Skype. Le groupe pourrait être soumis aux mêmes obligations de service public que les opérateurs comme Orange ou SFR.

Microsoft refuse de déclarer son service Skype comme opérateur de télécommunications en France, au même titre que SFR par exemple. Le groupe américain affirme qu'il n'est qu'un logiciel. Pourtant, il permet de communiquer depuis un ordinateur ou un smartphone connecté à internet, vers des téléphones fixes ou mobiles, à des tarifs très concurrentiels.

Esquiver les obligations de service public

En fait, le groupe Microsoft n'entend pas remplir les obligations de service public auxquelles sont soumis les opérateurs de téléphonie : permettre de passer des appels d'urgence, financer l'installation de cabines téléphoniques, la téléphonie fixe et la distribution d'un annuaire imprimé, ou encore collaborer avec les forces de l'ordre pour capter les conversations d'éventuels suspects. Les opérateurs "officiels" sont également soumis à des exigences de qualité. 

Microsoft a ignoré les injonctions de l'autorité française des télécoms

Microsoft a été saisi "plusieurs fois" par l'ARCEP, le gendarme français des télécoms. Selon les informations de L'Express, le directeur général de l'Autorité avait déjà dénoncé l'irrégularité de la situation en 2007, sans succès. Le procureur de la République de Paris, François Molins, a donc été saisi il y a un an par l'ARCEP et a ordonné l'ouverture d'une enquête préliminaire. L'infraction est punie d'un an d'emprisonnement et d'une amende de 75.000 euros pour non-respect de cette obligation.

Le groupe est déjà sous le coup d'un redressement fiscal

Interrogé par le New York Times, le porte-parole de l'ARCEP a également confirmé que ce statut rendrait Skype imposable sur ses revenus gagnés en France, même si cela n'est pas le but premier de l'Autorité. 

Or Microsoft est déjà en peine vis-à-vis du fisc français, qui lui réclame 600 millions d'euros, selon une estimation fournie par L'Express, suite à la perquisition de son centre de recherche et de ses bureaux en banlieue parisienne, à Issy-les-Moulineaux, en 2012. Le groupe, dont le siège européen est situé au Luxembourg, aurait déjà subi un redressement fiscal en 2010, et est en attente pour les exercices suivants.

Skype, Viber, Google, Whatsapp sont-ils des opérateurs ? 

D'autres services de communication pourraient également devoir se déclarer opérateurs de télécommunication. Whatsapp, récemment vendu à Facebook, qui va bientôt proposer des appels payants, ou Google et Viber, qui proposent déjà ce service, seraient concernés.

Qu'en disent les opérateurs "traditionnels" ? D'un côté, ils facturent les connexions mobiles qui permettent aux utilisateurs de ces services de se connecter à internet pour "skyper". Mais ils font également face à une concurrence accrue, à tel point que certains ont tenté d'empêcher leurs clients d'utiliser des services comme Skype sur leurs réseaux - ce qui va à l'encontre du principe de "neutralité du net". Le PDG de France Télécom, Stéphane Richard, a notamment critiqué la concurrence déloyale de logiciels comme Skype, qui revendique près de 300 millions d'utilisateurs connectés chaque mois.

Si la France obtient gain de cause, Microsoft pourrait être soumis aux obligations qui incombent aux opérateurs téléphoniques dans d'autres pays, notamment dans l'Union européenne.