Le plan d’économies de Manuel Valls effraie les hôpitaux publics et privés

Par Fabien Piliu  |   |  921  mots
La Sécurité sociale devra réaliser 20 milliards d'économies sur trois ans
Le gouvernement a décidé un plan d'économies de 50 milliards d’euros sur trois ans. l'effort de la Sécurité sociale sera de 20 milliards d'euros. Pour tenter d’inspirer – et dans le meilleur des cas - de contrôler l’action du gouvernement, la Fédération hospitalière de France (FHF) présente un vaste plan de réformes structurelles. La Fédération hospitalière privée (FHP) se met également à la disposition du gouvernement.

Dans le collimateur de Manuel Valls comme tous les autres acteurs de la santé, l'hôpital public redoute l'impact du nouveau plan d'économies imposé par le nouveau Premier ministre. Sur les 50 milliards d'euros d'économies prévues par Matignon, 20 milliards devront être réalisées par le secteur de la Santé. Pour tenter d'inspirer - et dans le meilleur des cas - de contrôler l'action du gouvernement, la Fédération hospitalière de France (FHF) présente un vaste plan de réformes structurelles qui doit permettre au secteur d'économiser 5 milliards d'euros sur cinq ans.

Mais pour Gérard Vincent, délégué général de la FHF, il sera difficile d'atteindre ces objectifs : 

" Ces économies doivent être murement pensées, réfléchies. Tous les ans, l'hôpital public fait déjà des efforts importants pour équilibrer ses comptes. En 2013, les dépenses ont été réduites de 650 millions d'euros. Cette année, ce sont 577 millions d'euros d'économies qui sont réclamées. Mais ces objectifs sont de plus en plus difficiles à atteindre"

Pour éviter la casse sociale et la dégradation du service public, la FHF a donc décidé de prendre les devants." Les réformes structurelles que nous réclamons ont un seul objectif : sauver l'essentiel, c'est-à-dire la capacité de l'hôpital public à soigner toujours mieux davantage de gens ", martèle Frédéric Valletoux, le président de la FHF.

Trois conditions requises

Pour que ce plan fonctionne, insiste la FHF, trois conditions sont requises. Il faut que " les efforts équitablement répartis entre les différents opérateurs de santé ", que ce plan soit élaboré " en concertation avec les professionnels concernés et les représentants des patients " et que le gouvernement renonce à la " méthode du rabot systématique qui consiste à répartir aveuglement les coupes budgétaires ", précise la Fédération.

Concrètement, la FHF plaide pour la mise en place de sept mesures. La première consiste à mettre en place une politique " déterminée " de lutte contre les actes et prescriptions inutiles. Selon plusieurs études et enquêtes, près de 30% du total des prescriptions en France apparaissent comme inutiles. Pour y parvenir, la Fédération réclame l'ouverture et la mise à disposition des données de l'assurance maladie pour repérer les anomalies de pratique et de réalisation d'actes inutiles. La FHF propose aussi de dédier le travail des médecins inspecteurs de l'assurance maladie à ces situations constatées ainsi que la mise à disposition des moyens de contrôle de l'Assurance Maladie aux Agences Régionales de Santé (ARS). Cette mesure permettrait d'économiser 2 milliards sur cinq ans selon la FHF. " Il serait inadmissible que l'on supprime des postes pour pouvoir continuer à financer des actes inutiles ", estime Frédéric Valletoux

Une permanence des soins assurée par tous ?

La FHF souhaite que les autorisations d'activités et d'équipements soient subordonnées aux seuls offreurs de soins engagés dans le service public. Dans le viseur ? Les cliniques privées très lucratives spécialisées dans une poignée d'actes médicaux. " Soyons clairs, il faut que la permanence des soins soit partagée par tous les acteurs, publics et privés ", estime Gérard Vincent. Cette mesure, toujours selon la FHF, permettrait une économie de 550 millions d'euros en cinq ans.

Rendre obligatoires les coopérations entre établissements à l'échelle des territoires et réguler la médecine de premier recours (500 millions d'euros d'économies sur cinq ans), accélérer le développement des pratiques médicales ambulatoires et à domicile (400 millions d'euros par an), moderniser les organisations de travail et soutenir les établissements de santé dans leurs efforts de maîtrise de la masse salariale (1 milliard sur cinq ans) sont également proposés.

Un choc de simplification est réclamé

La FHF réclame également une accélération du choc de simplification administrative afin de " restaurer les marges de manœuvre des acteurs de santé en supprimant la bureaucratie du système ". Avec cette mesure, ce sont 550 millions d'euros sur cinq ans, que la FHF compte économiser. " La production administrative est surréaliste ", regrette Frédéric Valletoux.

Exporter le savoir-faire français

Enfin, s'inspirant des rapports Gallois et Lauvergeon, la Fédération souhaite que le système de santé et hospitalier devienne un moteur de croissance et de développement économique à l'international pour augmenter les recettes de l'hôpital public. " Notre modèle d'organisation, notre excellence médicale peuvent être exportés. Chaque année, l'Allemagne engrange 1,5 milliard d'euros en exportant son savoir-faire dans le domaine de la santé ", avance Frédéric Valletoux qui plaide pour la création d'un label "Hôpitaux de France" pour lancer cette filière à l'export.

Les hôpitaux privés prêts à jouer le jeu, sous certaines conditions

Egalement dans le collimateur du gouvernement, la Fédération hospitalière privée (FHP) fait également preuve d'un certain volontarisme, comme le rappelle son président, Jean-Loup Durousset 

« Notre secteur hospitalier a su se restructurer. Il est reconnu performant dans la prise en charge des patients, innovant, et efficient sur le plan économique. Il est créateur d'emplois. Nous sommes prêts à apporter notre contribution au pacte de responsabilité et de solidarité, pour autant que le gouvernement agisse en toute transparence à égalité de traitement entre acteurs hospitaliers. Sortons des défiances, des postures, des caricatures, a déclaré le Premier ministre. Je le prends au mot.»