Déficit : Paris aurait-il déjà plié face à Bruxelles ?

Par Romain Renier  |   |  451  mots
Même la Commission européenne ne croyait plus à un déficit public à 3% en 2015 pour la France. L'Allemagne s'était même montrée indulgente avec la France. Si le bras de fer est perdu par Paris, Manuel Valls et François Hollande auront à plancher sur des coupes budgétaires très importantes.(Photo : Reuters)
Alors que Paris a obtenu un délai pour la transmission de son programme de stabilité à la commission européenne -ce sera fait seulement le 7 mai-, Michel Sapin veut maintenir l'objectif de 3% de déficit public. En coulisse, tout le monde s'activait ces derniers jours pour que la France obtienne au contraire un nouveau délai. Cette sortie du ministre des Finances pose question sur l'issue du bras de fer.

Après l'inversion de la courbe du chômage, Michel Sapin, désormais ministre des Finances s'est trouvé un nouvel objectif réputé inatteignable : un déficit public en dessous des 3% du produit intérieur brut alors que celui-ci semble hors de portée pour 2015. "L'objectif dit des 3% est un objectif que nous devons maintenir", a-t-il en effet lâché lors d'une conférence de presse à Washington.

Plus personne n'y croyait

Sans doute doit-il avoir la sensation de prêcher dans le désert, tant cet objectif, avec un déficit à 4,3% en 2013, au dessus de ce à quoi la France s'était engagée, avait été ouvertement abandonné par l'exécutif pour l'exercice 2015. A l'Élysée comme à Matignon, ces derniers jours, le mot d'ordre était en effet de négocier avec Bruxelles pour obtenir un délai supplémentaire, après celui de deux ans accordé l'an dernier.

Délai que la Commission européenne, qui a tancé la France en mars lors de la remise de ses recommandations aux États-membres dans le cadre du semestre européen, n'aurait, pensait-on, probablement pas d'autre choix que d'accorder. Car elle même n'y croyait plus et prévoyait pour l'an prochain un déficit public à 3,9% sans des coupes budgétaires drastiques.

Bataille en coulisse

En façade, Michel Sapin explique que "l'on peut faire de très grosses économies sans toucher aux droits fondamentaux des Français". De quoi rendre plus douce la réduction des dépenses de 50 milliards d'euros déjà annoncée successivement par François Hollande, puis par son nouveau Premier ministre, Manuel Valls.

Ces derniers jours, en coulisse, on s'activait pour obtenir ce nouveau délai. La visite à Berlin la semaine dernière avait semblé fructueuse. Angela Merkel avait gratifié la France d'un message plutôt doux au regard de la situation. En marge de ses rencontres au G7, au G20, avec le Fonds monétaire international et la Banque mondiale, Michel Sapin doit s'entretenir avec Siim Kallas, vice-président de la Commission européenne.

Budget d'austérité ?

Dans ces conditions, on se demande vraiment pourquoi le ministre des Finances s'entête à promettre un chiffre que son prédécesseur le premier, Pierre Moscovici, et lui-même, s'évertuaientt à ne surtout jamais prononcer. Si cela signifie que Paris a plié face à Bruxelles, la France aura droit à un budget d'austérité sans précédent l'année prochaine.

D'après nos informations, l'exécutif aurait en tout cas obtenu un délai spécial pour travailler sur son programme de stabilité dans le cadre du semestre européen. Celui-ci devrait être transmis à Bruxelles autour du 7 mai, au lieu du 30 avril, date limite fixée par une directive européenne.