Ces députés PS qui mènent la fronde contre Valls

Par Ivan Best et Jean-Christophe Chanut  |   |  976  mots
Ce mardi après-midi, le Premier ministre espère qu'une majorité de députés socialiste voteront le programme de stabilité. Tout va dépendre du nombre des "frondeurs". Portraits de certains d'entre eux.

Certes Manuel Valls devrait parvenir à ses fins cet après-midi avec le vote par une majorité de l'Assemblée du programme de stabilité des finances publiques qui sera transmis à Bruxelles. Un programme qui inclut le fameux pacte de responsabilité ainsi que le plan d'économies de 50 milliards d'euros sur trois ans.

Mais ce qui importe surtout au Premier ministre c'est que ce programme soit approuvé par une majorité de gauche. A priori, c'est jouable pour lui, sauf si le nombre de « frondeurs » s'avère plus élevé que prévu. Actuellement, le Parti socialiste détient , de justesse, la majorité absolue à l'Assemblée avec 291 sièges sur 577. Cette majorité ne tient donc plus qu'à 2 sièges. Certes, le Premier ministre peut aussi compter sur le soutien des Radicaux de gauche qui détiennent 16 sièges, voire, mais c'est nettement moins certain, sur l'apport de quelques députés Europe Ecologie-Les Verts (17 députés), même si ceux-ci ont décidé collectivement de voter contre le plan Valls. Déjà, le 8 avril, onze députés socialistes n'avaient pas voté la « confiance » à Manuel Valls. Combien-seront-ils cette fois ? C'est toute la question. S'ils sont plus de 40, le désaveu serait important pour le Premier ministre et compliqué pour la suite , avec des votes importants qui se profilent comme le collectif budgétaire en juin.

Certes, Manuel Valls va aussi pouvoir compter sur des votes positifs au centre et à droite. Ainsi, Benoist Apparu et Frédéric Lefebvre (UMP) pourraient voter pour. Yves Jégo, le président par intérim de l'UDI a quant à lui assuré vouloir mener une «opposition constructive»«Le gouvernement parle enfin de limiter la dépense publique (...), je ne vois pas comment nous pourrions voter contre», a indiqué le député dans le JDD… qui pourrait, in fine, plutôt s'abstenir. Mais le Premier ministre , politiquement parlant, ne souhaite pas s'appuyer sur des voix hors de son camp…

Portrait de quelques abstentionnistes au sein du PS.

Christian Paul, député de la Nièvre

Ce ancien de l'ENA, âgé de 54 ans, est un proche de Martine Aubry - un trait commun à plusieurs abstentionnistes, même si le mouvement est « trans-courant » - qui avait déjà annoncé qu'il s'abstiendrait lors du vote mardi. Pour lui, dans les concessions apportées par Manuel Valls «Il n'y a rien sur les allocations familiales et les allocations logement. Les contre-parties aux aides massives pour les entreprises, que nous réclamons, ne sont pas évoquées». Il est l'un des initiateurs de la lettre envoyée par une centaine de députés au Premier ministre fraichement nommé début avril. Christian Paul a aussi été secrétaire d'Etat à l'Outre-mer dans le gouvernement Jospin. Il s'est surtout rapproché de Martine Aubry à l'issue du houleux congrès de Reims de 2008 quand il a rejoint la nouvelle équipe dirigeante du PS dont elle était la Première secrétaire. Il participe d'ailleurs à l'élaboration du programme socialiste pour 2012. Et soutiendra Martine Aubry lors de la Primaire socialiste. Animateur de la tendance « Gauche durable », il réfléchit sur les nouveaux modèles de développement et les luttes contre les fractures territoriales

 

Jean-Marc Germain, député des Hauts-de-Seine

Agé de bientôt 48 ans, Jean-Marc Germain est Polytechnicien. Après un passage à Bercy, il rejoint en 1997 le cabinet de Martine Aubry, alors ministre de l'Emploi dans le gouvernement Jospin. Il se spécialise dans les questions liées à l'emploi et aux relations du travail dont il devient un fin connaisseur. Après le départ de Martine Aubry du gouvernement, en 2000, il intègre le cabinet de Lionel Jospin à Matignon. Dès 2003, il retrouve Martine Aubry à Lille et en 2008 il sera son directeur de cabinet, quand elle était à la fois maire de Lille, président de Lille Métropole et Première secrétaire du PS.

Il est pas ailleurs marié depuis 2004 avec Anne Hidalgo la nouvelle maire de Paris.

En 2012, il est élu député des Hauts- de- Seine. Il se distingue à l'Assemblée pour son gout pour les questions liées à l'emploi et aux relation sociales. Il sera rapporteur de la loi sur la sécurisation de l'emploi en 2013. Tout comme Christian Paul, il pense que les aides accordées aux entreprises ne sont pas assez ciblées et que l'on « pourrait faire aussi bien avec moins », ce qui dégagerait des marges de manœuvres pour le pouvoir d'achat des ménages. Lui aussi est d'ailleurs l'un des signataires de la lettre envoyée à Manuel Valls.

 

Laurent Baumel, député d'Indre et Loire

Il a été l'un des principaux initiateurs de la "fronde" contre le plan Valls, qui a réuni 100 signataires parmi les députés PS: plus d'un tiers du groupe. Pas étonnant que ce fondateur du collectif "gauche populaire", qui a théorisé les défaites de la gauche en 2002 et 2007 en insistant sur le sentiment d'abandon des classes populaires, avant d'être élu pour la première fois député en 2012 -en battant l'ex ministre UMP Hervé Novelli- , n'apprécie guère le tournant socio-libéral du gouvernement. Entre ceux qui soutiennent que la débâcle du PS aux municipales tient à une politique trop à droite et la thèse de certains -surtout au sein du gouvernement- qui défendent l'idée d'une sanction en raison de l'absence de résultats probants, il n'hésite pas: la première thèse a bien sûr sa faveur.

Pourtant ce chargé de mission à la Banque de France, qui a travaillé avec Pierre Moscovici sur les questions européennes, de 1997 à 2002, n'a pas toujours été à gauche du PS: il a soutenu Dominique Strauss-Kahn lors de la primaire de 2006 en vue de l'élection présidentielle de 2007.
Aujourd'hui, il affirme ne pas vouloir voter le programme de stabilité. Ni, à l'avenir, les textes avec lequel il est en désaccord.