Laurence Parisot tentée par l'action politique

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  771  mots
L'ancienne présidente du Medef, Laurence Parisot, prépare son arrivée à l'UDI
L'ancienne présidente du Medef soutient les listes centristes pour l'élection européenne. Prémices d'une entrée prochaine dans l'arène politique?

L'ancienne présidente du Medef, Laurence Parisot, s'apprête à franchir le Rubicon et entamer une nouvelle carrière politique. Dimanche 18 mai, elle a officiellement apporté son soutien aux listes centristes de « l'Alternative » (le regroupement du Modem et de l'UDI). Invitée du meeting de « l'Alternative » à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), Laurence Parisot y a défendu l'euro, dont une sortie  "serait un piège mortel" et a a plaidé en faveur de l'Europe « première puissance économique du monde ».

Une première dans l'histoire du Medef

Si cet engagement du prédécesseur de Pierre Gattaz venait à s'intensifier - et ça devrait être le cas -, ce serait la première fois qu'un ancien président de l'organisation patronale agirait ainsi. Certes, de nombreux présidents de fédérations patronale ou des caciques du Medef exercent (ou ont exercé) des mandats politiques, locaux ou nationaux. Ainsi, Yvon Jacob, ancien président du Groupe des fédérations industrielles et candidat malheureux a la présidence du Medef en 2005 a été député. Ou encore Charles Beigbeder, candidat UMP en 2012 aux législatives à Paris.

Mais pour un ancien président du Medef, le fait est inédit. De la part de Laurence Parisot, ce n'est pas étonnant, surtout à l'occasion d'une élection européenne. Quand elle était encore présidente de l'organisation patronale, elle n'a eu de cesse de parler de l'Europe, effectuant de nombreux déplacements dans les États membres ou à Bruxelles pour plaider l'harmonisation fiscale et sociale. Elle aussi multiplié les échanges avec ses homologues des organisations patronales des autres États de la zone. Elle fût aussi à l'origine du « B 8 » (B comme " bizness"), pendant du G 8 regroupant les dirigeants des 8 plus grands pays du monde, pour défendre les intérêts des entrepreneurs français et européens dans la mondialisation. Enfin, avant la fin de la présidence de Nicolas Sarkozy, elle avait caressé l'espoir que celui-ci la soutienne pour devenir commissaire européen. Mais l'élection de François Hollande a changé la donne.

Un très ancien intérêt pour la politique

Mais ce goût pour la politique remonte à bien plus loin. A sa sortie de Sciences Po Paris, Laurence Parisot a travaillé aux cotés d'Alain Lancelot, le politologue alors directeur de l'Institut d'études politique. Ensuite, au sein de l'Institut de sondage Ifop, elle était aux premières loges pour observer ce monde politique qui l'a toujours fasciné. Un poste où elle a pu également affirmé son intérêt pour les grandes questions sociétales. .

D'ailleurs, une fois à la tête du Medef, Laurence Parisot n'a eu de cesse que de faire venir des membres de la majorité ou de l'opposition à l'Université d'été du Medef. A commencer par Nicolas Sarkozy qu'elle avait justement connu à Sciences Po.

Selon son entourage d'alors au Medef, Laurence Parisot affichait sans retenu son bonheur d'avoir rencontré le Président de la République à l'Elysée ou le Premier ministre à Matignon. « Elle jubilait comme une petite fille », se souvient l'un d'eux…

Sa prise de distance avec le Medef

Sur le fond, divers signaux récents trahissaient l'envie de Laurence Parisot de rejoindre l'arène politique et de se retrouver sous les feux de la rampe... qui lui manquent.  D'abord, elle a quitté le groupe « employeurs » au Conseil économique social et environnemental (Cese), où elle siège depuis qu'elle a perdu la présidence du Medef, pour rejoindre celui des « personnalités qualifiées », plus consensuel et moins marqué. Ensuite, ces dernières semaines, elle s'est continuellement opposé à Pierre Gattaz qui lui a succédé au Medef. Certes, il y a beaucoup d'animosité entre ces deux là, ce qui explique les « sorties » de Laurence Parisot, alors que, d'habitude, un ancien président du Medef s'abstient de commenter en public les propos du président en place. Mais, l'irrésistible envie de Laurence Parisot d'entrer en politique explique surtout pourquoi elle a critiqué l'idée de Pierre Gattaz d'instituer un « sous-Smic temporaire ». Pour elle, une telle décision confinerait à de  « l'esclavagisme » .

Manifestement, elle cherche à policer son image et ne plus apparaître comme la patronne d'une organisation patronale qui déclarait a propos du travail « que dans la vie tout est précaire »…Ou pour ne plus se faire affubler du surnom de "Poutine" qui lui colle à la peau depuis qu'elle avait tenté en 2013 de modifier les statuts du Medef pour rester à sa tête.

Gageons donc que dans les semaines à venir, Laurence Parisot va annoncer officiellement son entrée chez les centristes de l'UDI qui vont bientôt se choisir un nouveau président pour succéder à Jean-Louis Borloo.