Politique de la mer : quand la Marine nationale veut mettre tout le monde sur le pont

Par Fabien Piliu  |   |  684  mots
L'Ecole de guerre organise quatre séminaires de deux jours, programmés entre octobre 2014 et janvier 2015.
L’Ecole de guerre organise en octobre un cycle de sensibilisation sur les problématiques de l'économie maritime et de la "maritimisation". Pour la première fois, cette formation sera ouverte à un auditoire élargi. Les chefs d’entreprises, les investisseurs et les cadres des administrations sont les bienvenus.

En attendant que le gouvernement - ou les prochains - mette en place une véritable politique de la mer et de ses ressources, la Marine nationale a décidé de prendre le taureau par les cornes.

A la rentrée prochaine, en octobre précisément, l'Ecole de guerre ouvrira ses portes à quelques privilégiés du grand public. L'association Mars, qui regroupe les 5.000 anciens de la prestigieuse institution et ses amis, organise un cycle de sensibilisation sur les problématiques de l'économie maritime et de la "maritimisation". Créé en 2013, cette formation récente sera pour la première fois ouverte à un auditoire élargi. Le monde de la finance, les chefs d'entreprises, les responsables des grandes administrations sont les bienvenus. Au total, une trentaine de places leur est réservée pour participer aux quatre séminaires de deux jours, programmés entre octobre 2014 et janvier 2015 à l'Ecole militaire, à Paris. 

Seront abordés les enjeux et l'action de l'Etat en mer, les ressources accessibles par la mer, le transport maritime et la construction navale, la mer, un potentiel français, une culture propre. Chacun de ses thèmes sera présenté et orchestré par un référent parmi lesquels l'armateur Philippe Louis-Dreyfus, Jean-Georges Malcor, le directeur général de CGG Veritas, l'un des premiers fournisseurs mondiaux de services et de produits géophysiques destinés aux compagnies pétrolières et gazières.

Favoriser le dialogue

" Cette initiative sert plusieurs objectifs. Elle doit permettre de rapprocher les différentes marines (marchande, pêche, marine nationale, plaisance...). Elle doit aussi permettre d'attirer d'autres publics, notamment des investisseurs et des entreprises pour que la mer devienne une priorité économique, une issue possible à la crise qui frappe l'économie française ", explique Emmanuel Gouraud, capitaine de vaisseau, chef du groupement marine de l'Ecole de Guerre, vice-président de l'association MARS.

Outre son domaine maritime, le deuxième au niveau mondial, la France a de nombreux atouts à faire valoir. Un certain nombre de ses sociétés, que ce soit dans l'activité portuaire, la prospection, la logistique, la construction navale, sont des leaders  mondiaux. " En appui de l'action du cluster maritime, il faut maintenant que tous ces acteurs entrent en contact pour tirer pleinement bénéfice de leurs atouts et des nouvelles opportunités qu'offriront bientôt l'élargissement du canal de Panama et l'ouverture des nouvelles routes maritimes au passage du Nord-Ouest ", avance Emmanuel Gouraud.

Plusieurs initiatives sont actuellement en cours de réflexion. En Guadeloupe, les acteurs publics et privés réfléchissent à la création d'un " hub ", c'est-à-dire une plate-forme portuaire qui profiterait du doublement prochain du canal de Panama. Ce hub de déploiement des containers pourrait desservir à la fois la cote est américaine, les Antilles et une partie de l'Amérique du sud.

Des milliers d'emplois en jeu

Concrètement, quel sont les enjeux économiques ? Le rapport des sénateurs Jeanny Lorgeoux et André Trillard publié en 2011 est éclairant. Après avoir rappelé que l'économie maritime représentait un chiffre d'affaires mondial de 1.500 milliards d'euros annuels, le rapport précise que sur ces 1.500 milliards, 190 milliards provenaient de secteurs qui n'existaient pas il y a dix ans, citant notamment, les hydrocarbures offshore profonds, le secteur des minerais et du dessalement de l'eau de mer, l'aquaculture industrielle et les algues, les énergies marines et les services associés.

Un doublement du chiffre d'affaires d'ici 2020 ?

Selon leurs calculs, ces activités nouvelles devraient représenter 500 milliards de dollars environ d'ici 2020, et seront comparables au volume de l'industrie mondiale du luxe ou du transport aérien: 400 milliards pour la première et 600 pour la seconde. " Si l'industrie française, qui représente déjà une part significative de ce marché, ne capte que 10 % de ces nouveaux marchés, elle pourrait dégager un chiffre d'affaires supplémentaire de l'ordre de 50 milliards d'euros ", précise les deux parlementaires, c'est-à-dire un quasi-doublement du chiffre d'affaires actuel de l'économie maritime tricolore, " avec les conséquences positives que l'on peut imaginer en termes d'emplois ". Actuellement, la mer offre du travail à 310.000 personnes.