Les entreprises du CAC 40 sont-elles vertueuses avec leurs fournisseurs ?

Par Fabien Piliu  |   |  582  mots
Pour limiter les abus en matière de délais de paiement, le gouvernement a décidé de durcir la loi.
Dix entreprises du CAC 40 n’ont pas encore signé la charte Relations fournisseur responsables. En 2013, les délais de paiement dépassaient de 12 jours en moyenne les délais fixés par la loi.

Ce sont les entreprises les plus puissantes de France. Sont-elles également les plus vertueuses avec leurs fournisseurs ? Peut-être.

Toutes n'ont néanmoins pas encore signé la charte Relations fournisseur responsables. Plusieurs grands noms de la cote manquent encore à l'appel. Il s'agit de LVMH, Unibail-Rodamco, Essilor, Arcelor-Mittal, Carrefour, Technip, Renault, Publicis, Accor et Vallourec.

Lancée en 2010, la charte Relations fournisseur responsables a été créée afin d'inciter les entreprises à adopter des pratiques responsables vis-à-vis de leurs fournisseurs, et de construire, dans un cadre de confiance réciproque, une relation durable et équilibrée entre ces derniers. Elle compte aujourd'hui plus de 460 entreprises et organismes signataires, ce qui représente un volume d'achats de plus de 450 milliards d'euros.

Faire respecter la loi

Son principal combat ? Inciter les entreprises à respecter les délais de paiement autorisés par la loi de modernisation économique (LME) votée en 2008. Celle-ci fixe les délais de paiement maximum à 60 jours calendaires, c'est-à-dire de date à date, ou 45 jours fin de mois.

Or, des mauvaises habitudes, des relations déséquilibrées entre les donneurs d'ordre - quelles que soient leurs tailles - et les fournisseurs, des tensions sur les trésoreries allongent à l'excès ces délais de paiement. Selon l'Observatoire des délais de paiement, ils se sont élevés à 72 jours en moyenne. " Ce sont 15 milliards d'euros qui manquent dans les trésoreries des PME, et c'est la cause de 25% des faillites ", estime Pierre Pelouzet, le médiateur national des relations Inter-entreprises et de l'Innovation.

Les constructeurs automobiles sont rétifs

On le voit, les non-signataires sont présents dans tous les secteurs. Toutefois, certains secteurs peuvent souffrir du manque d'adhésion des principaux donneurs d'ordre. C'est notamment le cas du secteur automobile. Certes, Valeo - longtemps dans le collimateur de la médiation -, Renault Trucks et Michelin ont signé la Charte relations fournisseurs responsables. Mais le groupe PSA et Renault font toujours de la résistance. " Certes, la filière possède son code de bonne conduite, mais il n'est pas toujours respecté. Ce n'est pas de la mauvaise volonté de leur part mais plutôt un blocage psychologique. C'est regrettable car, dans ce secteur, les médiations se passent plutôt bien ", constate Pierre Pelouzet, précisant que 50% des dossiers de médiations déposés dans le domaine industriel concernent l'automobile.

La loi Hamon sera-t-elle efficace ?

Pour limiter les abus, le gouvernement a décidé de durcir la loi. L'article 123 de la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation, dite loi Hamon, renforce à partir du mois de juin le dispositif de lutte contre les retards de paiement. En cas de non-respect des délais ou des modalités de calcul convenues entre les parties constaté par la DGCCRF, une amende administrative peut être délivrée. Son montant peut atteindre 75.000 euros pour une personne physique et 375.000 euros pour une personne morale, contre 75.000 euros précédemment. Ce montant peut être doublé en cas de nouveau manquement dans un délai de deux ans.

La loi prévoit également que les factures périodiques doivent désormais être payées dans un délai de 45 jours maximum à compter de leur date d'émission. Le durcissement de cet arsenal peut-il être efficace ? Il faudrait que les agents de la DGCCRF soient plus nombreux. Il faudrait également convaincre les fournisseurs de porter plainte. Même quand le donneur d'ordre - qu'il soit malveillant, laxiste ou en difficultés financières - est leur principal client ?