Le gouvernement veut miser sur l’entrepreneuriat. Chiche ?

Par Fabien Piliu  |   |  709  mots
Pour réduire le taux de chômage des jeunes, Najat Vallaud-Belkacem compte sur l'entrepreneuriat
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, souhaite développer l’entrepreneuriat pour réduire le chômage des jeunes. A-t-elle les moyens de ses ambitions ?

En juillet 2013, un sondage réalisé par Ipsos défrayait la chronique. Il indiquait que 75% des 15-30 ans interrogés souhaitaient devenir fonctionnaires. Ne leur en déplaise, austérité oblige, le gouvernement a d'autres projets pour eux.

Dans un entretien accordé mercredi aux Echos, Najat Vallaud-Belkacem, la ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, est plutôt favorable au développement de l'entrepreneuriat pour leur permettre d'intégrer le marché du travail. Il y a urgence. Actuellement, le taux de chômage des jeunes de moins de 25 ans tutoie les 25% de la population active…

La colère  des Pigeons et des Poussins

La ministre a-t-elle les moyens de ses ambitions ? Après l'affaire des Pigeons, puis des Poussins, ce discours pro-entrepreneuriat peut-il porter ? Le gouvernement n'a-t-il pas été obligé de demander à un parlementaire, en l'occurrence Laurent Grandguillaume, le député socialiste de Côte d'Or, de déminer le dossier de l'auto-entreprise après les tentatives de Sylvia Pinel, alors ministre de l'Artisanat, de limiter un régime fiscal qui a séduit près d'un million de personnes depuis 2009 ?

L'apprentissage à la rescousse

Quels sont les leviers que la ministre compte actionner ? L'apprentissage et le statut d'étudiant entrepreneur. En plaidant pour un renforcement de l'apprentissage, Najat Vallaud-Belkacem adopte un discours qui contredit les récentes mesures prises par le gouvernement dans ce domaine, les crédits accordés à l'apprentissage ayant été réduits dans la loi de finances 2014. Parmi les mesures décidées par le gouvernement, qui permettraient selon certains de financer les contrats d'avenir, citons la réduction du crédit d'impôt apprentissage accordé aux entreprises et la suppression du régime des indemnités compensatrices forfaitaires au profit d'une prime à l'apprentissage moins coûteuse pour les finances publiques.

Moins d'apprentis

Conjuguée aux difficultés économiques des entreprises qui n'ont plus les moyens de prendre des jeunes, même en alternance, cette diminution des moyens devrait rendre l'objectif du gouvernement de former 500.000 apprentis d'ici 2017 compliqué à atteindre. D'autant plus que l'apprentissage est en perte de vitesse. L'année dernière, 273.000 jeunes sont entrés en apprentissage, soit 8,1% de moins qu'en 2012. Ce recul est inédit depuis 2005, le nombre d'apprentis s'inscrivant toujours en hausse depuis cette date, à l'exception de 2009.

La question du financement est-elle la seule à laquelle il convient de répondre en urgence ? Il faudrait également envisager de réformer l'enseignement professionnel. Selon un sondage IFOP pour AGEFA-PME récemment publié, 51 % des patrons de PME, bien qu'ils plébiscitent l'apprentissage, estiment en effet que l'enseignement professionnel n'est pas assez adapté à leurs besoins.

La création d'un statut d'étudiant entrepreneur est l'une des autres solutions avancées par Najat Vallaud-Belkacem. Il doit permettre aux étudiants de conserver leur Sécurité sociale un an après la fin de leurs études. Il devrait être lancé dès la prochaine rentrée. Il était temps ! Cette mesure avait en effet été annoncée par François Hollande en conclusion des Assises de l'entrepreneuriat le 29 avril 2013. Comment expliquer ce retard ? " Les remous politiques et le remaniement du gouvernement ont détourné l'attention de l'exécutif de ces questions. Il a également fallu convaincre les universités et mettre en place et voter les budgets des Pepites ", explique Philipe Hayat, le fondateur de 100.000 entrepreneurs et d'Entreprendre demain qui fédère les principaux acteurs de la sensibilisation des jeunes à l'entrepreneuriat.

Lancées par Geneviève Fioraso, la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, aujourd'hui secrétaire d'Etat, à l'automne, ces 30  Pôles pour l'innovation, le transfert et l'entrepreneuriat (Pepites) disposent d'un budget d'une dizaine de millions d'euros. Descendantes directes des 30 Pôles de l'entrepreneuriat étudiant (PEE) lancés en 2010, Valérie Pécresse, qui occupait le poste de Geneviève Fioraso dans le gouvernement Fillon, ces structures ont vocation à accueillir et accompagner les étudiants-entrepreneurs aux premiers stades de leur projet entrepreneurial.

Comment s'articuleront ces Pepites avec les 20 « Maisons de l'entrepreneuriat » dont la création a été annoncée par Najat Vallaud-Belkacem ? Pour l'instant, la réponse n'est pas connue. Une chose est certaine. Alors que la Cour des comptes dénonce la multiplication des structures publiques de soutien à l'entrepreneuriat, il semble que le gouvernement ait décidé de se passer de son avis…