Concurrence : « il faut s’attaquer aux tabous sinon la technologie l’imposera »

Par Delphine Cuny  |   |  449  mots
Bruno Lasserre, le président de l'Autorité de la concurrence, plaide en faveur de « ceux qui innovent. »
Le président du gendarme de la concurrence, Bruno Lasserre, s’est fait l’avocat de réformes de secteurs réglementés pour déverrouiller l’économie française et s’attaquer aux « rentes ». Des taxis à la pharmacie, en passant par les transports, le président des « Sages » soutient « ceux qui innovent et bousculent l’ordre établi. »

L'Autorité de la concurrence ne veut pas être qu'un gendarme infligeant des sanctions, parfois très lourdes : 160,5 millions d'euros d'amendes cumulées en 2013 et 55,2 millions d'euros depuis le début de l'année. Son président, Bruno Lasserre, qui dressait le bilan annuel de l'activité de l'autorité ce jeudi, a présenté une liste de propositions de réformes dans un vibrant plaidoyer en faveur de « ceux qui innovent. »

« Nous sommes un gendarme mais nous voulons aussi être un avocat de la concurrence, une autorité de propositions. Oui, la concurrence dérange, elle crée un désordre transitoire. Mais si l'on ne s'attaque pas aux rentes, nous risquons de rater ce défi de la compétitivité » a lancé Bruno Lasserre.

L'Autorité de la concurrence se voit donc en « réservoir d'idées pour stimuler le débat public, explorer des gisements de croissance ou d'innovation et déverrouiller l'économie française. » En particulier sur les secteurs touchant « au pouvoir d'achat, aux dépenses contraintes des ménages français comme le transport. »

VTC et Uber contre les taxis

Le président des « Sages » de la rue de l'Echelle a énuméré une série de « points de blocage » et de secteurs où l'ouverture à la concurrence est souhaitable. Par exemple, dans la santé et la pharmacie : il préconise la vente des médicaments non remboursables en grandes surfaces et parapharmacies, sous le contrôle d'un pharmacien diplômé, et de réinventer la rémunération des pharmaciens, qui ne soit plus seulement fonction du volume et du prix mais soit en partie forfaitisée et prenne en compte les objectifs de prévention de l'assurance maladie. Il a également évoqué la libéralisation du transport par autocar sur les lignes de plus de 200 km ou celle des pièces automobiles de rechange, l'encouragement de l'enseignement en ligne du code de la route. Sans oublier les professions réglementées, en distinguant missions de service public et logique économique.

« Il faut s'attaquer aux tabous. Nous avons assez attendu sur certaines réformes. Il faut donner leurs chances à ceux qui innovent, qui bousculent l'ordre établi, sinon c'est la technologie qui l'imposera » a fait valoir Bruno Lasserre.

Or dans beaucoup de secteurs où « rien n'a été fait, pour protéger la rente », « tout est en train de tomber, sous la force d'Internet. » Il a cité les exemples « des sites de covoiturage qui bouleversent la stratégie tarifaire de la SNCF » mais aussi des « VTC et Uber qui perturbent le modèle économique des taxis. » Il faut donc selon lui « encadrer ces changements » qui menacent de balayer « ceux qui ont préféré la rente au risque de l'innovation. »