Valls aime l'entreprise, et ne le cache pas

Par latribune.fr  |   |  936  mots
A l'université d'été du Medef, le premier ministre a prononcé une véritable ode aux entreprise. De quoi provoquer le trouble des "frondeurs" du PS, qui dénoncent un copié-collé de Tony Blair. Le premier ministre s'est prononcé en faveur d'une négociation sur les seuils sociaux dans l'entreprise et de l'assouplissement des règles du travail du dimanche

Un premier ministre de droite aurait-il prononcé un discours aussi favorable aux entreprises ? Aurait-il été à ce point ovationné par les chefs d'entreprise présents à Jouy en Josas? D'entrée de jeu, à l'occasion de son intervention lors de l'ouverture de l'université d'été du Medef, ce mercredi, Manuel Valls a donné le ton :
« Je sais qu'il est d'usage d'opposer la gauche et le monde de l'entreprise ... C'est un vieux refrain ... Mais justement, ce que je crois profondément, c'est que notre pays a besoin de sortir des postures, des jeux de rôle auxquels nous sommes tellement habitués. Alors, je le dis : cessons d'opposer systématiquement ! D'opposer Etat et entreprises ! D'opposer chefs d'entreprise et salariés ; organisations patronales et syndicats !  Je le dis et je l'assume : la France a besoin de vous ! La France a besoin de ses entreprises, de toutes ses entreprises. Car ce sont les entreprises qui, en innovant, en risquant les capitaux de leurs actionnaires, en mobilisant leurs salariés, en répondant aux attentes de leurs clients, créent de la valeur, génèrent des richesses qui doivent profiter à tous. »

« Moi, j'aime l'entreprise »

Et de déclarer, à deux reprises : « moi, j'aime l'entreprise ». Car « une immense majorité de nos concitoyens y travaillent. Beaucoup s'y épanouissent. (...) L'institution qui arrive en tête dans les sondages d'opinion, ce sont les PME, les PMI, et ce avant même la police ou l'armée. Ce sont les entreprises qui créent des emplois. Combien d'entre vous se battent pour préserver les emplois, motiver et rassurer, malgré une conjoncture morose. Je le dis depuis des années dans ma famille politique : il n'y a pas d'emplois sans employeurs. »

Les frondeurs abasourdis, qui dénoncent un "copié-collé de Tony Blair"

« C'est pourquoi », affirme Valls, « il est absurde de parler de « cadeaux fait aux patrons ». Une mesure favorable aux entreprises, c'est une mesure favorable au pays tout entier ».

De quoi faire réagir les députés PS frondeurs, qui se sont dits abasourdis. Laurent Baumel, l'un des leaders de ces députés,  a ainsi qualifié de "copié-collé" des discours de Tony Blair  le discours de Manuel Valls. "Moi qui connais assez bien l'évolution idéologique des partis socialistes depuis deux décennies, a dit Laurent Baumel sur BFMTV, je peux vous dire que c'est un copié-collé du type de discours que tenait Tony Blair dans les années 95-97-99 en Angleterre, c'est-à-dire que c'est une proposition idéologique pour rompre avec tout ce à quoi nous avons cru à gauche depuis des décennies." À la tête du Parti travailliste, puis comme chef du gouvernement, Tony Blair avait réformé en profondeur l'idéologie de son parti, désormais surnommé le New Labour, le convertissant à l'économie de marché. "Je peux difficilement cacher mon trouble", déclare le député d'Indre-et-Loire. "C'est la première fois, je crois, qu'un Premier ministre socialiste va faire applaudir des piques contre des députés socialistes par un syndicat patronal".  "Je connais bien Manuel Valls, je sais que sa posture est toujours d'abord politique, et là je pense qu'il a fait un discours politique", a-t-il conclu.

Pas de nouveaux allègements de charges annoncés

Favorable aux entreprises, le gouvernement va-t-il plus loin encore dans les allègements de prélèvements obligatoires à destination des employeurs ? Ce n'est pas le sens du propos de Manuel Valls.
Il a confirmé le pacte de responsabilité, avec « au total, ce sont plus de 40 milliards d'euros de baisse en quatre ans sur les prélèvements touchant les entreprises ». 40 milliards pour qu'elles gagnent en compétitivité, qu'elles puissent investir, repartir à la conquête de parts de marché, et embaucher. 40 milliards, ce n'est pas rien ! Cela représente 2 points de PIB. C'est plus de 15 points d'autofinancement supplémentaire. Dès 2015, ce sera pour nombre de salariés l'équivalent de 10 points de cotisations sociales en moins. »

Si Manuel Valls ne promet aujourd'hui pas d'aller plus loin, comme l'avait demandé Pierre Gattaz, le patron des patrons, s'agissant de la fiscalité, n'exclut pas de nouvelles avancées en faveur des employeurs, à la faveur de prochaines assises sur l'investissement. Pierre Gattaz réclame une baisse de la taxation du capital, le premier ministre ne semble pas l'exclure.

Moins de formalités, négociations sur les seuils sociaux

« Certaines formalités excessives sont aussi coûteuses et pénalisantes » estime Manuel Valls. Les entreprises comme les ménages en sont victimes. Nous nous y attaquons. Une charte du contrôle fiscal entrera prochainement en vigueur et un médiateur sera mis en place.»
Répondant à une revendication patronale, le gouvernement est prêt à approuver une réforme des seuils sociaux. « Vos représentants participeront à des négociations qui vont s'ouvrir sur la représentation des salariés et le dialogue social. Ces négociations poseront aussi la question des seuils. Cette réforme ne peut réussir que si la négociation réussit. Et la négociation doit réussir, comme les partenaires sociaux ont su réussir des réformes importantes depuis deux ans. Je pense notamment à la sécurisation de l'emploi ou la formation professionnelle. »

Des nouvelles réformes: travail du dimanche et urbanisme commercial

Il y a la négociation, et les réformes promises par le gouvernement. Il s'agit de "rendre notre économie plus souple, plus réactive". Et de promettre "d'accroître la concurrence, d'alléger certaines règles, je pense à celles relatives au travail du dimanche ou à l'urbanisme commercial". Manuel Valls estime que "des milliards d'euros de pouvoir d'achat peuvent être redonnés aux Français".