Sauver les retraites complémentaires : les syndicats avancent leurs solutions

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  715  mots
Patronat et syndicats vont devoir arrêter en 2015 des mesures drastiques pour limiter le déficit des régimes de retraites complémentaires Arrco et Agirc
Patronat et syndicats vont négocier de nouvelles mesures en 2015 pour limiter le besoin de financement des régimes complémentaires Arrco et Agirc qui, selon la Cour des comptes, pourrait atteindre 5,35 milliards d'euros en 2018.

Quasi simultanément, la Cour des comptes puis le Conseil d'orientation des retraites (COR) viennent de tirer la sonnette d'alarme sur la situation financière des régimes complémentaires de retraite des salariés (Arrco) et cadres (Agirc). Pour le COR, les besoins de financement de ces deux régimes, gérés par les partenaires sociaux, vont se creuser jusqu'en 2018, passant de - 2,1 à -5,5 milliards d'euros.

De son côté, la Cour des comptes note une dégradation financière constante depuis 2009, avec des déficits qui ont atteint 4,4 milliards d'euros en 2013 et qui pourraient avoisiner 5,3 milliards cette année. A lui seul, le régime des cadres aurait connu un trou de 3,2 milliards d'euros.

Ceci étant dit, patronat et syndicats n'ont pas attendu la Cour des comptes pour prendre conscience de la situation difficile des régimes complémentaires, particulièrement de l'Agirc.

Des décisions prises il y a deux ans, mais insuffisantes

Ainsi, un premier train de mesures d'urgence a été arrêté dans un accord du 13 mars 2013. Pour freiner les dépenses, les partenaires sociaux avaient décidé un gel partiel durant deux ans (2014 et 2015) de la revalorisation des pensions. Et pour augmenter les recettes, ils sont convenus d'une revalorisation des cotisations retraites complémentaires de 0,1 point par an sur deux ans. La première augmentation a donc eu lieu le 1er janvier 2014 et la deuxième interviendra ce 1er janvier 2015.

Pour autant, cela ne suffira pas à renflouer les régimes du fait du prolongement de la crise et de la hausse du chômage qui affectent durement l'Arrco et l'Agirc. Patronat et syndicats doivent donc arrêter de nouvelles mesures courant 2015. Les négociations vont entrer dans le vif en février. Et ils espèrent bien boucler pour juin.

La Cour des comptes leur suggère de jouer sur tous les leviers : diminuer le montant des pensions servies, augmenter le niveau des cotisations et, surtout, reculer l'âge du départ à la retraite à 64 ans... Un dernier point qui correspond exactement à ce que suggère le Medef. Si une telle disposition était arrêtée, cela conduirait automatiquement les salariés à partir en retraite plus tard que l'âge légal actuel de 62 ans.

En effet, on ne voit pas les salariés percevoir leur simple retraite de base Sécurité sociale durant deux ans, avant de pouvoir obtenir une pension de retraite complémentaire à 64 ans... Et pour cause, les pensions servies par les caisses de retraite complémentaire Arrco et Agirc représentent approximativement un tiers de la retraite totale des non-cadres et deux tiers de celle des cadres.

La CGT suggère d'élargir l'assiette des cotisations à l'épargne salariale

Mais les syndicats ne l'entendent pas de cette oreille. Jean-Louis Malys, le "Monsieur retraites de la CFDT", rappelle dans le quotidien « Les Echos », que les « partenaires sociaux peuvent jouer sur de nombreux leviers", comme le taux de cotisation ou le taux d'appel (relèvement de la cotisation qui n'ouvre pas de nouveaux droits).

Pour sa part, la CGT et sa fédération des cadres (Ugict) ont rappelé dans un communiqué leurs anciennes revendications pour sauver le régime Agirc des cadres. La CGT propose ainsi « l'élargissement de l'assiette de cotisation à l'épargne salariale et une augmentation modulée de la part de cotisation dite patronale en fonction du rapport masse salariale sur valeur ajoutée et de la politique d'emplois et de salaires des entreprises".

L'égalité salariale entre hommes et femmes: "4 milliards d'euros dès 2017"

Par ailleurs, la CGT souligne que la progression vers l'égalité salariale entre les femmes et les hommes - selon l'Insee, les femmes gagnent actuellement en moyenne 19,2% de moins que les hommes - «aurait des conséquences très positives sur les ressources des régimes ». Elle estime même qu'une revalorisation des salaires des femmes pourrait conduire « à un solde positif de 4 milliards d'euros dès 2017 ».

Les idées commencent donc à fuser à l'approche des négociations qui s'annoncent difficiles. Le gouvernement va d'ailleurs les suivre attentivement. Il n'a jamais caché que, s'il devait y avoir une nouvelle réforme du régime des retraites de base, il s'inspirerait des décisions « courageuses » prises par les partenaires sociaux pour les retraites complémentaires où ils sont seuls compétents.