A quoi ressemblera l'Agence nationale de développement économique  ?

Par Fabien Piliu  |   |  973  mots
La future Agence nationale pour le développement économique devra lutter contre le chômage des jeunes dans les quartiers
Lors de sa cinquième conférence de presse, François Hollande a annoncé le lancement de l'Agence de développement économique. En attendant les détails précis de sa mission, à quoi peut servir exactement cette nouvelle structure ? Le soutien public est-il insuffisant dans ce domaine ?

François Hollande a réservé une surprise aux Français. Alors que la plupart des thèmes abordés lors de sa cinquième conférence de presse - laïcité, école, lutte anti-terrorisme... -  étaient déjà connus, de façon plus surprenante, le chef de l'Etat a annoncé le lancement d'une Agence de développement économique pour relancer l'activité dans les territoires et lutter contre le chômage dans les quartiers, notamment des jeunes, qui frappe près de 25% des 15-24 ans.

Les détails précis, les missions, la gouvernance de cette nouvelle structure que le chef de l'Etat a comparé à l'Agence nationale de la rénovation urbaine (ANRU) sont encore flous. La seule chose que l'on sait, c'est que Bpifrance et la Caisse des dépôts participeront au montage de cette agence chargée de stimuler l'économie et l'entrepreneuriat dans les quartiers.

C'est légitime. Via le Fonds d'expérimentation pour la Jeunesse, la Caisse des Dépôts et Consignations a déjà prévu de consacrer une enveloppe de 25 millions d'euros qui sera investie dans le programme « La France s'engage » dont l'objectif est d'inciter les jeunes à s'investir dans la vie économique, sociale et associative.

Des structures et des dispositifs de financement existent déjà

Le programme des investissements d'avenir (PIA), dont la gestion est en partie assurée par La Caisse devrait aussi être dans la boucle. Il reste 13,4 milliards d'euros à engager, sur les 46,6 milliards prévus par les PIA 1, créé en 2010, et PIA 2, lancé en 2013.

" Le PIA ne doit pas concerner seulement la recherche scientifique « dure » ! L'avenir de notre économie et plus largement de notre société ne passe pas seulement par une augmentation des moyens financiers des laboratoires scientifiques. Il faut également parier sur les hommes. C'est par exemple la raison pour laquelle la CDC a cofinancé le développement de Formagraph, un organisme de formation aux arts graphiques implanté à Besançon. Ce projet est extraordinairement utile puisqu'il offre la possibilité aux personnes ayant du mal à lire et écrire de combler leurs lacunes. En luttant contre l'illettrisme, dont souffre 7% de la population française selon l'Agence nationale contre l'illettrisme, le PIA ne participe-t-il pas au redressement de la compétitivité des entreprises françaises ? Par ailleurs, il faut bien avoir à l'esprit que l'innovation est au centre de nombreux pans de l'économie sociale et solidaire. Outre la formation avec la création de nouveaux logiciels, l'ESS peut également concerner l'économie circulaire, en lien avec le développement durable, ou encore de la domotique. Mais la question pourrait également se poser pour la formation professionnelle en alternance. Nous la finançons dans le cadre du PIA car elle est un véritable levier pour notre économie et elle peut présenter un caractère innovant " a expliqué Odile Renaud-Basso, la directrice générale adjointe de la Caisse des dépôts dans un entretien accordé à La Tribune Hebdo du 29 janvier.

Une holding de tête

Reste une question. La création d'une nouvelle structure était-elle nécessaire ? Entre les institutions, comme la Caisse des dépôts, Bpifrance, les réseaux associatifs très présents dans les territoires, les agences locales de développement, L'Agence pour la création d'entreprise (APCE), les collectivités territoriales, les réseaux consulaires (CCI, Chambres des métiers..) les entrepreneurs en herbe ne manquent pas de structures et de dispositifs de soutien.

S'il s'agit de les fusionner au sein d'une même entité, comme l'a laissé entendre le Président, la création de cette agence a du sens. En revanche, s'il s'agit de créer une « holding de tête » en laissant l'ensemble des structures exister sous leur marque propre, la création de cette agence semble discutable. Or, historiquement, l'exécutif a, à de rares exceptions, privilégié la seconde option.

Quelle articulation avec les Régions ?

Par ailleurs, comment s'articulera cette nouvelle agence avec les nouvelles grandes régions créées par la réforme territoriale. Cette question a également du sens. Le projet de loi sur la nouvelle organisation territoriale de la République - dite " loi NOTRe " -  est actuellement débattue au Parlement. Elle met fin à la clause de  "compétence générale" et confie de nouvelles compétences aux régions dans le domaine du développement économique, de l'attractivité, du développement des territoires et de l'emploi.

L'Association des Régions de France a immédiatement réagi

Sans surprise, l'Association des Régions de France (ARF) a réagi, demandant que cette nouvelle agence soit "un outil commun entre l'Etat et les Régions".

"L'agence nationale de développement économique dont la création a été annoncée aujourd'hui par le président de la République doit être un outil commun entre l'Etat et les régions, pour la création et la croissance des entreprises sur tous les territoires. Aux côtés de Bpifrance et de la Caisse des dépôts et consignations dont le Président de la République a annoncé la participation (...), les régions doivent être étroitement associées à la gouvernance et au choix des orientations stratégiques de ce nouvel organisme", précise  un communiqué de l'association.

Sinon, le risque existe  que " cette agence ne serait qu'une structure de plus, qui doublonnerait avec les moyens mis en œuvre par toutes les régions pour assurer le développement économique de leurs territoires et l'accompagnement des PME et ETI au risque de gaspiller l'argent public et d'être inefficace ".

" La nouvelle agence créée par l'Etat doit donc réunir les moyens de l'Etat et les Régions pour cette mission essentielle : offrir les mêmes chances en matière d'emploi à tous les citoyens de la République et une espérance à tous nos jeunes ", écrit l'ARF.