Immigration : l'Italie se plaint "du grave manque de solidarité de la France"

Par Robert Lavéran, à Rome  |   |  471  mots
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Confrontée à l'arrivée de milliers d'immigrés tunisiens sur son île de Lampedusa, Rome met en cause le manque de solidarité de ses partenaires européens, en premier lieu la France.

"Lampedusa sera libérée d'ici 48 à 60 heures". Après l'arrivée, depuis le début de l'année, d'environ 22.000 personnes sur la petite île au sud de la Sicile, Silvio Berlusconi a promis de désengorger cette porte d'accès à l'Europe d'ici vendredi soir.

Alors qu'il restait, mardi, plus de 6200 immigrés sur place ? pour la plupart Tunisiens ? pour une population locale de 5300 habitants, le chef du gouvernement italien qui a effectué une visite éclair et très médiatique sur ce bout de terre méridional, a promis de mettre sept ferries à disposition pour déplacer les étrangers et les répartir dans des structures d'accueil dans le reste du pays.

Cette décision a provoqué de vifs mécontentements de la part de certains administrateurs locaux. Mais surtout, elle n'a pas plaqué la polémique entre Rome et ses partenaires européens.

L'Italie estime en effet que "le fardeau" de cet afflux massif d'immigrés lié à la situation dans les pays arabes devrait être partagé.

Si les autorités italiennes parlent du risque d'un "exode biblique", en réalité le chiffre de 22.000 immigrés depuis le début de l'année est à mettre en rapport avec le nombre de 100.000 permis de séjour qui seront accordés par l'Italie pour 2011 à des étrangers entrés par d'autres moyens, moins visibles, dans la péninsule. Ce qui fait dire à l'opposition de gauche que le gouvernement exploite la situation à Lampedusa et "l'alarme immigration" à des fins électorales.

"L'Europe nous a laissés seuls", répète en tout cas le ministre (Ligue du Nord) de l'Intérieur, Roberto Maron,i tandis que du côté de la Commission européenne, on précise: "les migrants économiques qui arrivent en Italie en provenance de Tunisie sont pris en charge par les autorités italiennes et, dans ce cas précis, ce sont elles qui sont responsables".

"Il y a de l'argent disponible pour aider l'Italie", ont précisé les services de la commissaire chargé de ce dossier, Cecilia Malmström, rappelant que 18 millions d'euros ont été mis à disposition pour la période 2010 -2011 afin de co-financer, jusqu'à 75% le coût du rapatriement des clandestins.

L'an dernier, l'Italie a utilisé ce fonds à hauteur de 6,9 millions d'euros. Un autre fonds d'urgence de 25 millions d'euros est par ailleurs prévu. Mais l'Italie se heurte pour l'heure au refus de Tunis de récupérer ses ressortissants. C'est pourquoi, le ministre des affaires étrangères Franco Frattini a réitéré jeudi la demande qu'ils soient "répartis entre plusieurs pays européens".

Mais, a-t-il déploré, "nous assistons à une absence de solidarité éclatante, en particulier de la part de la France".

A la frontière, du côté de Ventimille, les gendarmes français massivement mobilisés renvoient régulièrement les Tunisiens du côté italien.