L'oligarque Prokhorov se voit dans le costume de Premier ministre russe

Par Emmanuel Grynszpan, à Moscou  |   |  401  mots
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Le milliardaire russe s'est fait élire samedi à la tête du nouveau parti libéral pro-Kremlin avec l'ambition de convaincre 15% des électeurs aux élections législatives de décembre.

Le milliardaire Mikhaïl Prokhorov, 46 ans, avoue admirer le président du conseil italien Silvio Berlusconi et se dit prêt à prendre le poste de Premier ministre après les élections législatives, qui se tiendront en décembre prochain. Devenu riche grâce à la privatisation controversée en 1993 du géant minier Norilsk Nickel puis à travers une série d'investissements astucieux dans la deuxième partie des années 2000, Mikhaïl Prokhorov déboule comme une météorite sur la scène politique russe. Comme il l'a confié au quotidien Vedomosti, "le Berlusconi d'il y a dix ans me plaît : il est très brillant", estime l'homme d'affaires reconverti dans la politique. Les deux hommes ont d'ailleurs un autre point commun : ils ont tous les deux été impliqués dans des affaires de proxénétisme.

Classé 39ème fortune mondiale avec 18 milliards de dollars (selon le journal Forbes), Prokhorov aurait, selon le journal russe New Times, investi 100 millions de dollars de sa fortune personnelle pour financer le parti Juste Cause. Le programme, encore à l'état d'ébauche, consiste à libéraliser l'économie et le système politique du pays. Le milliardaire stipule que les gouverneurs et maires doivent être élus au suffrage universel (des scrutins supprimés par Vladimir Poutine en 2004), ainsi que l'instauration d'élections locales pour les dirigeants de la police et du fisc, et  pour les juges et les procureurs.

Ses propositions restent modérées et privées de critiques acerbes à l'intention du pouvoir actuel. Ce qui explique que la télévision d'Etat russe ait largement couvert la nomination de Mikhaïl Prokhorov, alors qu'elle exclu systématiquement des ondes la véritable opposition, c'est-à-dire celle dont les représentants attaquent les autorités et plus précisément Vladimir Poutine. Autre signe flagrant de la collusion entre Juste Cause et le Kremlin, l'entretien qui s'est tenu lundi au cours d'une "visite de travail" entre le président Dmitri Medvedev et Mikhaïl Prokhorov, devant les caméras de la télévision d'Etat.

Le président russe n'a pas fait mystère de son intérêt pour le parti Juste Cause. Dmitri Medvedev a encouragé l'oligarque à poursuivre et a noté que "ces idées sont en résonnance avec les miennes. D'une certaine façon, elles ont un caractère révolutionnaire et exigent d'être examinées avec attention".