Moody's envisage d'abaisser la note de la dette américaine

Par latribune.fr  |   |  875  mots
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Moody' s est la première des trois grandes agences de notation à placer la note des Etats-Unis sous surveillance avec risque d'un déclassement, lequel pourrait alors intervenir dans les semaines à venir.

Les Etats-Unis risquent de perdre leur note de crédit maximale AAA dans les semaines qui viennent si le Congrès ne parvient pas à trouver un accord pour relever le plafond de la dette nationale, a annoncé l'agence de notation Moody' s Investors Service mercredi.  Faute d'un tel accord, les Etats-Unis pourraient manquer certains remboursements sur les obligations publiques en circulation, ajoute-t-elle.

Moody' s est la première des trois grandes agences de notation à placer la note des USA sous surveillance avec risque d'un déclassement, lequel pourrait alors intervenir dans les semaines à venir. Standard & Poor's avait assigné en avril une perspective négative à la note des Etats-Unis, impliquant un probable déclassement dans les 12 à 18 mois.

Le dollar a aggravé ses pertes et les emprunts d'Etat américains ont baissé à la suite de cette annonce. Les futures de Wall Street ont également reculé après la clôture.

L'agence perçoit, dans un communiqué, "une possibilité de plus en plus grande que le plafond légal de la dette ne soit pas relevé en temps voulu, débouchant sur un défaut sur les obligations du Trésor".

UNE ISSUE PAS TRES POSITIVE

Même si les Etats-Unis parviennent à éviter un défaut technique en août, la probabilité augmente d'une révision de la perspective à négative dans les semaines qui suivront, a dit à Reuters Steven Hess, analyste de Moody's.

L'agence entend mettre un terme à la surveillance dès qu'elle pourra conclure si un défaut est évitable ou pas. Elle décidera alors si les Etats-Unis peuvent prétendre conserver une perspective stable sur leurs notes, sur la base du projet de budget négocié entre Démocrates et Républicains.

"Le fait qu'ils ne se soient pas entendus sur cela (le plafond de la dette) nous montre que l'issue des négociations sur la situation de la dette à long terme risque de ne pas être très positive", a noté Hess.

"Nous sommes disposés à attendre le résultat des négociations", a-t-il ajouté. "Si elles ont bien progressé dans le sens d'un accord sur le budget qui rompe avec la trajectoire ascendante de la dette, alors nous envisagerons d'assigner une perspective stable".

Le sous-secrétaire au Trésor chargé des Finances intérieures Jeffrey Goldstein a réagi en déclarant que l'annonce de Moody' s était un rappel opportun de la nécessité pour le Congrès d'éviter un défaut de paiement des Etats-Unis et de sceller un accord de réduction sérieuse du déficit budgétaire.

Les risques d'un défaut de paiement sur les obligations d'Etat américaines, qui passent pour être l'investissement le plus sûr au monde, ont augmenté depuis que l'Etat a atteint, le 16 mai, le plafond légal d'endettement de 14.294 milliards de dollars.

Les chefs de file du Congrès et le président américain Barack Obama poursuivent des négociations tendues afin de relever ce plafond d'ici la date limite du 2 août. Pour l'instant le Congrès refuse de s'exécuter tant qu'il n'y aura pas d'accord sur la réduction d'un déficit budgétaire qui atteignait 1.290 milliards de dollars lors du dernier exercice budgétaire.

Le Trésor américain a fait savoir qu'en cas de non-renouvellement du plafond, il devrait installer un système de priorités dans les remboursements.

DANGER IDEOLOGIQUE

Le député démocrate Chris Van Hollen a estimé que les annonces de Moody' s attestaient du danger idéologique dans les débats en cours. "Le fait que Moody' s place les Etats-Unis sous surveillance et puisse déclasser notre rating AAA souligne le danger de ceux qui voudraient faire de notre économie et de nos emplois les otages d'une idéologie rigide au lieu d'agir au mieux des intérêts de notre pays", a-t-il dit.

A la différence de Fitch, qui a promis de placer la note en "défaut limité" après plusieurs remboursements passés, Moody' s a dit qu'elle déclasserait, le cas échéant, les Etats-Unis dans la catégorie AA, qui reste une catégorie d'investissement. L'agence ajoute que la probabilité d'un défaut sur le service de la dette est faible mais "n'est plus de minimis".

"Si le plafond de la dette est à nouveau relevé et un défaut évité, la note AAA sera vraisemblablement confirmée", observe-t-elle. "Toutefois, la perspective assignée à ce moment-là à la note de la dette publique sera très vraisemblablement changée à négative en fin de période de surveillance à moins d'un accord budgétaire d'envergure et crédible, comportant une réduction du déficit à long terme".

La décision de Moody' s a un précédent. En 1996, l'agence avait déjà placé sous surveillance dans la perspective d'un déclassement certaines émissions du Trésor américain. La Maison Blanche et la Congrès n'avaient pu se mettre d'accord sur un relèvement du plafond.

Un déclassement des Etats-Unis pourrait avoir des répercussions dans des pays tels qu'Israël et l'Egypte. Moody' s a dit que les emprunts émis par ces pays et comportant une garantie de Washington "sont également placés sous surveillance avec risque de déclassement".