Médecins et infirmiers hospitaliers, lavez vous les mains, sinon...

Par Garance Cherubini  |   |  710  mots
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Selon un article du New York Times, des études montrent qu'avant de traiter les patients, le personnel hospitalier ne se laverait les mains en moyenne que moins d'une fois sur trois. Un manque d'hygiène qui se traduit par une augmentation des infections contractées par les patients, et pénalise financièrement les hôpitaux. Face à ce problème, l'hôpital North Shore de Long Island a mis en place un système d'incitation, en employant des méthodes... pour le moins attractives. Et ça marche.

Big Brother is watching you. A l'hôpital de l'Université North Shore de Long Island, des détecteurs de mouvement et des caméras sont installés aux coins des murs des salles de soin. Celles-ci transmettent des images en Inde, où des salariés sont employés pour vérifier régulièrement si les infirmiers... se lavent les mains.

Ce nettoyage, principe de base pour le corps médical du maintien de l'hygiène n'est pourtant pas bien respecté, loin s'en faut : selon le New York Times, des études montrent que le personnel hospitalier ne se lave les mains que moins d'une fois sur trois avant d'interagir avec un patient.

Un manque à gagner de 30 milliards de dollars

Avec des bactéries de plus en plus résistantes, cette négligence peut avoir des conséquences déplorables sur la santé des patients ... mais aussi sur les finances des hôpitaux. Selon un rapport récemment publié par les Centres fédéraux de contrôle et prévention des maladies, les infections nosocomiales (infections contractées au sein même d'un établissement de santé) coûteraient 30 milliards de dollars par an aux établissement hospitaliers.

Face à ce constat, les hôpitaux ont décidé d'agir. D'où l'installation de caméras pour surveiller de près les infirmiers et médecins. Ce n'est pas tout : pour encourager le personnel médical à se laver les mains plus souvent, les hôpitaux a mis en place un système de récompenses : à l'instar des bons points, les employés ont droit à des coupons pour un café ou une pizza gratuite, en échange d'un nettoyage de mains. Plusieurs hôpitaux du pays ont aussi formé des « coachs » chargés de motiver le personnel au lavage de mains, et les mauvais élèves sont pénalisés avec un "carton rouge".

La "guerre" contre les bactéries

La détermination des hôpitaux est forte : leur économie est en jeu. En effet, en vertu de nouvelles règles fédérales, les hôpitaux seront dorénavant pénalisés si certains de leurs patients contractent des infections qui auraient pu être évitées. Les subventions versées par Medicare, le système d'assurance et santé géré par le gouvernement américain, ne seront plus perçues par les établissements responsables.

Ceci explique les efforts fournis et les méthodes insolites utilisées à l'hôpital North Shore. "Ce n'est pas une solution miracle, c'est une guerre", explique ainsi le Dr Bruce Farber, directeur des maladies infectieuses de l'hôpital.

La technologie au profit des hôpitaux

L'hôpital a aussi eu recours à la technologie pour assurer la surveillance des employés. La société General Sensing fournit au personnel médical des tenues équipées de badges électroniques qui "traquent" le nettoyage de mains. Le système utilise une technologie similaire à une connexion Wifi : le badge communique avec un capteur installé sur chaque désinfectant ou distributeur de savon. Si l'infirmier ne sa lave pas les mains, le badge vibre, et l'employé est rappelé. Le système est sophistiqué : agiter simplement ses mains devant le capteur ne suffit pas : « Nous savons si vous avez pris une dose de savon » explique M.Liang, fondateur de la société.

Le programme de vidéosurveillance installé dans l'hôpital de North Shore, géré par la société Arrowsight, est basé sur les modèles utilisés dans l'industrie de la viande. Les caméras surveillent si les travailleurs qui sont en contact avec les animaux lavent correctement leurs mains et les couteaux qu'ils utilisent, afin d'éviter de contaminer la viande.

Les résultats sont édifiants. L'étude réalisée au sein de l'hôpital de North Shore, publiée dans la revue Clinical Infectious Diseases, a révélé que durant une première période, où les employés ne savaient pas qu'ils étaient filmés, le taux d'hygiène des mains était inférieur à 10%. Mais lorsqu'ils ont été informés et qu'ils ont eu accès à des rapports sur leurs comportements filmés, les taux ont bondi à 88%. L'hôpital a donc maintenu le système, mais a dû le limiter à l'unité de soins intensifs, en raison d'un coût trop élevé...