Attractivité : le classement de la Banque Mondiale vaut-il quelque chose ?

Par latribune.fr  |   |  586  mots
En un an, Paris a perdu quatre rangs dans le nouveau classement sur l'environnement des affaires publié lundi par la Banque mondiale, en dépit des critiques et de la farouche opposition de la Chine.
En un an, Paris a perdu quatre rangs dans le très controversé classement sur l'environnement des affaires publié lundi par la Banque mondiale. Un placement très critiqué par la Chine, reléguée au 96e rang. qui donne des résultats pour le moins surprenants.

La France décroche...un peu. Selon la 11e édition du classement sur l'environnement des affaires publié lundi par la Banque mondiale, Paris, notamment à la traine sur les procédures sur l'enregistrement des propriétés immobilières et les permis de construire, arrive au 38e rang, perdant quatre places par rapport à 2013.

Intitulé "Doing Business" ("faire des affaires"), ce rapport passe au crible le cadre réglementaire qui s'impose aux petites et moyennes entreprises dans 189 pays, évaluant notamment dans quelles conditions elles peuvent lancer leur activité, avoir accès au crédit ou payer leurs impôts.

Un classement qui peut surprendre

Mais quel crédit accorder à ce rapport qui est loin de faire l'unanimité ? Déjà en 2004, le gouvernement français faisait part de sa "stupéfaction" à la lecture du rapport. Et la réserve reste de mise dix ans plus tard. Notamment du côté de la Chine. Mécontente de son rang l'an dernier, elle était en effet montée au créneau pour fustiger un rapport qui "pourrait ruiner la réputation de la Banque":

"Le rapport utilise des méthodes erronées, ne reflète pas les faits, et n'accorde que peu de valeur à l'amélioration de l'environnement des affaires en Chine", avait accusé Bin Han, vice-représentant du pays à la Banque mondiale, lors d'une rare intervention publique fin 2012.

Il faut dire que certains résultats peuvent laisser songeur. Ainsi, Haïti, un des pays les plus pauvres du globe, arrive en 67e position en termes d'accès des PME à l'électricité alors que le Canada, pays du G20, pointe au 145e rang.

Par ailleurs, sur l'indicateur mesurant la "protection des investisseurs", le Sierra Leone, qui émerge de plusieurs décennies de guerre civile, occupe la 22e place du classement alors que la Suisse n'est que 170e.

"Un rapport d'extrême mauvaise qualité"

D'ailleurs, au sein-même de l'institution, le rapport est loin de faire consensus. Une source interne à la Banque, sous couvert de l'anonymat, a ainsi confié à l'AFP:

"C'est un rapport d'extrême mauvaise qualité. On classe des choses qui n'ont rien à voir entre elles. On n'est plus dans le domaine économique".

Face à la controverse, le président de la Banque, Jim Yong Kim, a dû se résoudre à mandater un audit externe. Et les conclusions, publiées en juin, ont été sans appel, pointant des faiblesses méthodologiques et appelant à la suppression du classement.

Jim Yong Kim a donc concédé quelques aménagements en plaçant les prochains "Doing business" sous l'autorité du chef économiste de la Banque mondiale. Mais il n'a pas cédé sur le classement qui constitue, selon lui, "un des ingrédients du succès" du rapport.

La Banque défend un aperçu "limité" mais instructif

La Banque assure que son rapport n'a pas vocation à refléter l'attractivité d'un pays ou le dynamisme de sa croissance. "Ce n'est qu'un aperçu limité d'un des aspects de la compétitivité" des pays, a expliqué Augusto Lopez-Claros, directeur des indicateurs mondiaux de la Banque, lors d'une conférence de presse téléphonique, mais il donne "une idée des meilleures pratiques" et il pousse les pays à se réformer.

C'est pourquoi il estime lui aussi que le classement doit être maintenu. Bref, ce n'est pas l'édition 2014 qui apaisera la colère de la Chine, la deuxième puissance économique mondiale étant reléguée de la 91e à la 96e place.

Pour aller plus loin: attractivité: et si la France commençait à décrocher?