Ukraine : Bruxelles annonce un plan d'aide massif de 11 milliards d'euros

Par Florence Trainar  |   |  807  mots
Selon José Manuel Barroso, 610 millions d'euros d'assistance macro-économique pourrait déjà être libérés dans les semaines à venir. (Photo : Reuters)
La Commission européenne a présenté un plan de soutien étalé sur deux ans. Les propositions d'aide internationale à l'Ukraine se dessinent sur fond de rivalités géopolitiques. Le pays aurait besoin de 35 milliards d'euros.

Washington, Bruxelles, la Russie, le FMI... Qui va payer pour l'Ukraine et à hauteur de combien ? Après la proposition de prêt des Etats-Unis mardi, c'est au tour de la Commission européenne de présenter mercredi un plan d'aide massif "d'au moins 11 milliards d'euros", à la veille du sommet européen extraordinaire dédié à la crise ukrainienne.

Le plan de sauvetage comprend 1,6 milliard d'euros de prêts dans le cadre de l'assistance macro-économique, 1,4 milliard de dons et 3 milliards provenant de la Banque d'investissement européenne (BEI).

La Commission espère également dégager 5 milliards d'euros via la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD). Elle compte mobiliser 250 millions de fonds de la politique de voisinage afin de lever 3,5 milliards de prêts.

"Aujourd'hui, la Commission européenne a identifié un programme d'aide à l'Ukraine. Ceci est notre contribution au sommet des chefs d'Etat et de gouvernement de demain", a déclaré le président de l'exécutif européen, José Manuel Barroso.

610 millions d'euros dans les prochaines semaines

Un des volets de ce plan correspond à l'accord d'association et de libre-échange que Viktor Ianoukovitch avait refusé de signer fin novembre 2013 avec l'UE (déclenchant ainsi des manifestations à Kiev). Il y était prévu 610 millions d'euros d'assistance macro-économique. "Cette somme peut être déboursée très vite, dans les prochaines semaines", a précisé le président de la Commission.

Concrètement, cet accord se traduirait par "des millions d'économies" sur les importations via des baisses de tarifs douaniers. L'UE pourrait par ailleurs aider l'Ukraine dans le domaine de l'énergie, en inversant les flux des gazoducs pour fournir du gaz au pays, a également évoqué José Manuel Barroso.

Le dirigeant espère que les Etats membres de l'UE, y compris ceux qui ne sont pas sur la même longueur d'onde vis-à-vis de la Russie, resteront "unis et engagés" dans cette réponse à la crise.

Mardi, le secrétaire d'Etat américain John Kerry avait déjà promis un milliard de dollars de garanties de prêt pour aider l'Ukraine à redresser la barre.

Une "géopolitique" de l'aide financière ?

Si l'octroi de prêts est essentiel à l'Ukraine, dont l'économie est au bord de la faillite depuis un an et demi, il représente aussi un enjeu crucial pour ses futurs émetteurs. Car venir en aide à Kiev, c'est avoir une influence sur les réformes qui seront mises en place. Et donc pouvoir les orienter dans le sens de certains intérêts économiques.

La Russie est pour l'instant mal positionnée, puisqu'elle ne reconnaît pas la légitimité du gouvernement d'Arseni Iatseniouk. Depuis l'éviction de du président pro-russe Viktor Ianoukovitch, le Kremlin a suspendu le plan d'aide de 15 milliards de dollars signé avec Kiev en décembre 2013.

Moscou s'est dit malgré tout prêt à "participer, en tant que membre du FMI, à des négociations collectives visant à octroyer une aide financière à l'Ukraine", selon les propos d'une responsable russe rapportés mardi par l'agence de presse locale Ria Novosti. Le FMI aurait refusé cette offre de participation, a affirmé Vladimir Poutine.

L'UE et le FMI "main dans la main"

Ce même mardi, une équipe du FMI arrivait à Kiev pour discuter d'un plan de sauvetage. L'institution devrait imposer de douloureuses réformes conditionnelles, notamment une hausse du prix du gaz aux ménages, sujet très sensible pour la population.

"L'UE et le FMI travaillent ensemble", a commenté mercredi le président de la Commission européenne, interrogé sur ce qu'il pensait de conditions si drastiques. "Nous espérons que l'Ukraine signe un accord avec le FMI. Pour nous, si cet accord est signé, c'est déjà une condition".

Afin de coordonner les efforts de la communauté internationale, la Commission a notamment proposé la création d'un "mécanisme spécial de coordination des dons".

Besoin de 35 milliards de dollars

L'Ukraine doit déjà rembourser 4,5 milliards de dollars au FMI d'ici fin 2015. Les deux entités ont un lourd passif. En juillet 2010, le Fonds avait accordé au pays une ligne de crédit de 15,3 milliards de dollars, pour ensuite le bloquer début 2011 face au refus des autorités de mettre en place les réformes exigées. Depuis, toutes les missions qui se sont succédées en Ukraine ont été soldées par un échec.

Les responsables politiques ukrainiens affirment désormais avoir besoin de 35 milliards de dollars (25,5 milliards d'euros) de nouveaux prêts et crédits sur les deux prochaines années pour éviter un défaut. Un chiffre pris toutefois avec prudence par la communauté internationale.

A Kiev, la chasse aux économies est lancée. Geste symbolique, le gouvernement a mis en vente ce mercredi la plupart de ses quelque 1.500 voitures de fonction, espérant en tirer environ 3 millions d'euros.