"30.000 demandeurs d'emplois supplémentaires, un très mauvais chiffre"

Par propos recueillis par Corentin Dautreppe  |   |  512  mots
". Le gouvernement a mis énormément d'énergie sur les contrats aidés, qui ne marchent pas depuis trente ans", estime l'auteur de "Chômage : inverser la courbe"
Lauréat du prix Turgot du meilleur livre d'économie pour "Chômage : inverser la courbe", Bertrand Martinot voit dans les mauvais chiffres du chômage en février (+0,9% de demandeurs d'emploi) un signal supplémentaire que la politique du gouvernement ne fonctionne pas.

Le gouvernement vient de rendre public les chiffres du chômage sur le mois de février, très mauvais avec un bond de 0,9%, soit 31.500 demandeurs d'emplois supplémentaires.

>> Lire : Chômage : très forte hausse de 0,9% en février

Bertrand Martinot, délégué général à l'Emploi et à la formation professionnelle de 2008 à 2012 auprès du Premier ministre est le tout récent lauréat du prix Turgot du meilleur livre d'économie 2014 pour "Chômage : inverser la courbe" (publié par l'Institut Montaigne aux éditions Les Belles Lettres). A ses yeux, c'est une invalidation de la politique du gouvernement en faveur des contrats aidés.

La Tribune - Une hausse de 0,9% du nombre de demandeurs d'emplois en février, c'est la fin définitive de l'objectif d'inversion de la courbe ?

Bertrand Martinot - L'affaire est entendue, la courbe du chômage n'a pas été inversée. Les fluctuations des demandeurs d'emploi au mois le mois sont difficiles à interpréter. Si vous êtes à plus de 30 000 supplémentaires, là c'est un chiffre significatif et très mauvais. Pas bon du tout. Ca fait des mois que je pense que le chômage se stabilise, il ne s'inverse pas, mais je pensais qu'il s'était stabilisé. La prévision de l'Insee selon laquelle le chômage va se stabiliser ou continuer à augmenter légèrement au cours du premier semestre 2014 semble plutôt pertinente. La faute à une croissance faible et à une politique inefficace.

Est-ce que c'est une invalidation de la politique du gouvernement ?

En partie. Le gouvernement a mis énormément d'énergie sur les contrats aidés, qui ne marchent pas depuis trente ans. C'est une réponse au chômage qui peut être pertinente quand celui-ci est conjoncturel. Or, en France, il est structurel, et vous pourrez mettre autant de contrats aidés que vous voudrez, cela pourra ralentir un peu la progression, mais ne résoudra pas le problème.

Quelle est selon vous la marche à suivre ?

Il faut faire tout ce qu'on ne fait pas depuis 30 ans. Freiner la dépense publique, baisser les charges de manière significative, rendre le service public d'aide à l'emploi plus efficace, développer l'apprentissage, réformer l'assurance chômage… Bien sûr, ce sont-là les douze travaux d'Hercule, en raison notamment d'un blocage aux niveaux politiques et sociaux. Mais la bonne nouvelle, c'est que l'on sait ce qu'il faut faire !

N'est-ce pas la direction prise par le gouvernement avec le pacte de responsabilité ?

Ecoutez, le Pacte de responsabilité, moi je ne sais pas où il est. Les 50 milliards d'économies, on veut en voir la liste ! Tout ce que je sais, c'est que baisser les charges de 10 milliards d'euros, c'est très insuffisant. Et les réformes pour résorber un chômage structurel prennent plusieurs années, il faut les faire en début de quinquennat. Sachant qu'on ne fait pas de réformes d'ampleur la dernière année du quinquennat, il est déjà trop tard pour celui-ci.

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>>> [LCI] Hollande face à la hausse du chômage