"Le défi, c'est concilier la bonne gestion des finances publiques avec la croissance"

Par Propos recueillis par Florence Autret, à Bruxelles  |   |  423  mots
Michel Barnier/Copyright Reuters
Michel Barnier, commissaire européen au Marché intérieur et aux Services, dans un entretien accordé à La Tribune et au quotidien allemand Die Zeit, indique quelles sont les pistes européennes qui peuvent favoriser la croissance économique : rôle accru de la BEI, meilleur usage des fonds structurels et lancement d'"obligations à projet".

On parle beaucoup de croissance mais on ne voit partout qu'austérité. Est-ce que l'Europe n'est pas en train de s'enfermer dans un cercle vicieux ?

Concilier la bonne gestion des finances publiques avec la croissance, c'est le défi du moment, en termes économique, humain et politique. C'est ce qu'attendent les citoyens au vu des résultats des élections. Je plaide pour que l'on complète le traité de gouvernance économique et budgétaire par une initiative européenne de croissance dans les semaines qui viennent. Celle-ci devrait comporter trois volets. D'abord des mesures de court terme qui soient une approche plus volontariste de la Banque Européenne d'Investissement (BEI), ce que fait la Banque centrale européenne (BCE) pour remettre en marche le marché interbancaire, et un meilleur usage des fonds structurels disponibles ou encore des "project bonds". Ces "obligations à projets" intéressent tous les pays y compris l'Allemagne et la France pour réaliser rapidement des investissements dans les réseaux, l'énergie, le numérique ou des transports propres.

Et à moyen terme ?

A moyen terme, il y a l'Acte pour le Marché Unique, ce que j'appelle l'écosystème des entreprises : la mobilité, l'exportation, le brevet européen ou encore le capital risque. Enfin, à long terme, je me bats pour des politiques industrielles en Europe sur les secteurs stratégiques pour qu'on reste ou qu'on redevienne une terre de production et pas seulement une terre de consommation des produits chinois ou américains.

Finalement, vous êtes relativement sur la ligne de François Hollande pour cette réorientation de la stratégie européenne...

Nicolas Sarkozy a lui aussi plaidé pour la croissance. Avec François Hollande, nous en avons parlé. Il plaide dans le même sens. Tant mieux. Je veux faire observer que cet Acte pour le Marché Unique, nous l'avons présenté il y a un an et que 30 des 50 propositions ont été déjà proposées.

Pensez-vous que le traité sur la gouvernance économique et budgétaire sera finalement ratifié par tous les pays qui l'ont signé ?

Je pense que ce traité est une condition de la confiance mutuelle des Européens entre eux. C'est donc un traité utile. Il faut le respecter, le ratifier et le compléter par cette initiative européenne de croissance. Si, à travers un manifeste pour la croissance ou cette initiative européenne de croissance, nous pouvons créer un environnement plus dynamique et plus favorable que la seule règle contrainte budgétaire et surveillance, alors cela facilitera la ratification.