Quels scénarios pour la Grèce ?

Par Robert Jules  |   |  888  mots
Le président grec Karolos Papoulias demande à Alexis Tsipras, leader du parti de la gauche radicale Syriza, de rassembler une coalition pour former un gouvernement/Copyright AFP
La possibilité de constituer un gouvernement en Grèce s'éloigne, les partis Nouvelle Démocratie et Pasok, signataires de l'accord sur la rigueur imposée en échange de l'aide européenne, sont minoritaires. Les partis d'extrême gauche et d'extrême droite qui ont bénéficié du rejet de l'austérité sont trop divisés. De nouvelles élections pourraient se tenir dans un mois, avec comme enjeu : quitter ou rester dans la zone euro.

Les chances de la Grèce de sortir de l'impasse politique dans laquelle elle se trouve depuis les élections légisaltives semblaient bien minces mercredi. Antonio Samaras, le leader du parti conservateur Nouvelle Démocratie, arrivé en tête avec 108 sièges (dont 50 attribués automatiquement pour avoir obtenu le plus grand nombre de suffrages) sur les 300 que comporte le gouvernement a échoué à constituer une coalition de droite. En conséquence, et comme le veut la constitution, le président de la république hellénique a demandé à Alexis Tsipras, leader la formation arrivée en deuxième position, Syriza, qui représente la gauche radicale, avec 52 sièges, de mener la même mission. Si son leader a jusqu'à vendredi pour terminer sa mission, la fin de non recevoir opposée par le KKE, le parti communiste orthodoxe (26 sièges), réduit ses chances.
En effet, outre le parti de la Gauche démocratique (19 sièges), Syriza devrait faire appel au parti socialiste, le Pasok, qui a été lourdement sanctionné par les électeurs (41 sièges) pour sa gestion gouvernementale durant la crise.

Mission impossible pour le Pasok

De surcroît, le Pasok et la Nouvelle Démocratie sont les seuls partis à avoir signé le mémorandum sur les mesures de rigueur en échange de l'aide Europe-FMI, un choix qui a été largement rejeté dans les urnes par les Grecs.
Les deux partis totalisent 149 sièges, ratant la majorité absolue de 2 sièges. Mais si sur le papier la possibilité de la formation d'un gouvernement d'unité nationale existe - comme c'est le cas de l'équipe sortante du Premier ministre technocrate Lucas Papademos -, elle ne semble pas à l'ordre du jour, Antonio Samaras refusant une telle option.Elle pourrait néanmoins revenir sur le tapis, si le Syriza échoue, puisque la même mission serait alors confiée à Evangelis Venizelos, le chef du Pasok, arrivé en troisième position. Celui se dit prêt à former une large coalisation sur la base d'objectifs minimaux et un maintien dans la zone euro. Mais cela réserve plutôt de la mission impossible.

Vers de nouvelles élections dans un mois

Si le président de la république constate l'échec de la constitution d'un gouvernement, il convoquera alors de nouvelles élections qui pourraient se tenir au plus tôt dans un mois - la presse grecque avance la date du 19 juin -, avec le risque de ne faire que renforcer les formations ayant en commun le rejet de l'austérité imposée par Bruxelles.
Et en cas de constitution d'un gouvernement rejetant le mémorandum, comme en a déjà averti José Manuel Barroso, le président de la Commission européenne, la Grèce s'exposerait à un « défaut de paiement », lié à la suspension de l'aide.

Rester ou pas dans la zone euro?

Athènes a toutefois reçu l'assurance de Bruxelles de recevoir jeudi comme il était prévu la tranche d'aide d'un montant de 5,2 milliards d'euros lui permettant d'assurer le fonctionnement de l'Etat. Le pays doit honorer le 15 mai une échance de remboursement de 450 millions d'euros à ses créanciers privés. « Au bout du compte, la chose à accepter est la mort d'un système dans lequel un pays affiche une incapacité structurelle à recouvrir efficacement l'impôt et, de ce fait, vit de manière chronique très au-dessus de ses moyens grâce à un financement venant de l'extérieur », juge Bruno Cavalier, chez Oddo Securities. In fine, les Grecs devront répondre à une question simpmle : veulent-ils rester dane la zone euro ou non.

Si oui, la Grèce n'aura pas d'autre choix que de continuer à se soumettre pour continuer à recevoir l'aide financière de l'Europe, au mieux en obtenant un assouplissement des conditions. D'autres pays souhaitent également un tel aménagement qui tienne compte des conditions conjoncturelles actuelles : l'Espagne, l'Irlande, le Portugal et... la France. Cet aménagement pourrait se faire ad hoc selon la situation de chaque pays ou par en décalant dans le temps, un ou deux ans, l'objectif de déficits publics ramenés à 3% du PIB prévus en 2013. On sait que Berlin est fermement opposé à une telle option.

Dévaluation compétitive

Si non, soit qu'elle le choisit, soit que ses partenaires de la zone le lui imposent, la Grèce abandonnera l'euro et récupèrera sa souveraineté monétaire. L'avantage, ce sera de pouvoir faire une forte dévaluation qui lui permettra de retrouver une compétitivité sur le marché international. L'inconvénient, c'est que le pays insolvable, risque au moins durant un certain temps de ne pas attirer les investisseurs, et provoquer la fuite de ceux qui s'y trouvent actuellement. En outre, une bonne part des dettes grecques sont détenus par un secteur bancaires local qui se retrouverait de facto exangue.

Ce dernier scénario impliquerait également un choix politique difficile pour les autorités européennes, en particulier la chancelière allemande Angela Merkel. Des milliards d'euros des contribuables prêtés ne seront pas remboursés, démontrant que l'option d'un choix d'un défaut était plus réaliste dés le départ. Mais il est vrai également que les conditions ne sont plus les mêmes, en particulier le risque de contagion tant redouté à l'ensemble de la zone euro est désormais réduit aujourd'hui.