Les retraites privées allemandes en question

Par Marc Meillassoux, à Berlin  |   |  528  mots
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En Allemagne, en plein débat sur les retraites, les assurances complémentaires privées sont critiquées. Les fortes incitations de l'Etat pour les mettre en avant sont à double tranchants.

D?après un sondage paru dans le très populaire Bild, quatre allemands sur dix ne pensent pas pouvoir vivre de sa future retraite. Parmi ceux-ci, 20% des Allemands gagnent plus de 3000 euros par mois. La problématique n?est pas nouvelle, le déficit démographique datant du milieu des années 70, mais les politiques peinent à trouver la bonne formule.« Depuis une dizaine d?années, l?Etat a diminué les droits liés à la retraite publique qu?il a cherché à compenser par une assurance privée viadesincitations fiscales. Aujourd?hui, la seule retraite publique suffit à peine à survivre, pour avoir une bonne retraite il faut cumuler les trois piliers : l?assurance d?Etat, celle de l?entreprise et une personnelle » explique un conseiller en assurance berlinois.


Des complémentaires retraites subventionnées


Mais voilà, en plein débat sur une réforme des retraites, ces complémentaires privées font de plus en plus débat. C?est notamment le cas de la populaire « assurance-entreprise » (Betriebsrente), qui permet à l?employeur de verser une partie du salaire brut de l?employé, exonérée d?impôt et de cotisations sociales, dans une pension de retraite. Dans les Lander de l?ouest, 20% des actifs en ont souscrit une. Or,une étude du professeur en Sciences sociales Ulrich-Arthur Birk, de l?Université de Bamberg, parue hier, conclut que « pour les actifs qui ont cotisé pour une retraite publique et qui ont signé un contrat après 2005 (date de changement de la fiscalité, ndlr) sans bénéficier d?une contribution supplémentaire de l?entreprise ?non obligatoire-, l?opération n?est pas rentable».Un placement sur un compte épargne serait, selon lui, plus avantageux.


De nombreux souscripteurs cessent leurs cotisations


Concernant, les complémentaires privées, comme la Riester-Rente (salariés) ou la Rürup-Rente (indépendants), elles donnent lieu à d?importantes dérives. Les assureurs privées qui les vendent, incitent leurs clients à cotiser un maximum pour profiter des crédits d?impôts, qui sont progressifs. Mais face aux aléas professionnels ou familiaux, de nombreux souscripteurs ne peuvent plus assumer les cotisations et les sanctions financières sont alors drastiques.«Les souscripteurs sont peu informés des risques d?un contrat Rürup, que l?on ne peut pas résilier (?) En cas de d?arrêt des cotisations, le capital accumulé est progressivement rongé par les frais d?administration, très élevés » assure Kerstin Becker-Eiselen, avocate et conseillère de l?Association des consommateurs de Bargteheide. Selon un cadre de la Confédération Syndicale d?Allemagne (DGB), « le problème de ces assurances privées, comme la Riester-Rente, c?est qu?elles sont inaccessibles pour les bas salaires, ceux qui en ont pourtant le plus besoin. Les primes d?assurances et les frais de gestions sont bien plus élevées que pour la retraite publique et les pensions versées très inférieures».D?après l?Association des consommateurs d?Hambourg, sur les 1,5 millions de polices Rürup souscrites, la moitié des bénéficiaires ne peuvent plus cotiser. Le gouvernement a promis d?imposer plus de transparence aux assureurs.