La "folie des loyers" s'invite dans la course à la chancellerie allemande

Par Marc Meillassoux, à Berlin  |   |  436  mots
Le candidat du SPD, Peer Steinbrück. Copyright Reuters
Marché de l'immobilier qui s'enflamme, exclusion des moins riches des centres-villes: l'accès au logement devient une préoccupation de premier ordre en Allemagne et pèsera dans la course à la Chancellerie.

«La folie des loyers». Mietenwahnsinn, c'est ainsi que les Allemands nomment la montée en flèche des loyers dans les grandes villes allemandes ces dernières années. Une étude récente de l'institut berlinois DIW dans les plus grandes villes du pays atteste de cette envolée: le prix du mètre carré à l'achat a ainsi augmenté de 72% à Berlin (loyers: +28%), de 50% Hambourg (+23%) ou de 37% à Munich (+16%). La croissance de la population et des salaires ainsi que la faible construction de logements neufs donnent lieu dans certains quartiers à de véritables «remplacements de population». Témoin de l'effervescence qui règne autour de la pierre, le volume d'échanges du marché a augmenté de 25% en 2012, à 36 milliards d'euros.

En décembre 2012, la Banque fédérale allemande s'est même inquiétée de la naissance d'une bulle immobilière, inquiétude partagée par plusieurs organismes privés (Allianz, Cushman & Wakefield, Immobilienscout). Pour Konstantin A. Kholodilin, spécialiste de la question au DIW, l'Allemagne n'en est pas encore là: «le caractère spéculatif est marginal et les crédits hypothécaires n'ont pas explosé comme en Irlande ou en Espagne avant la crise. Mais on ne peut exclure que ce boom immobilier se transforme en une bulle, notamment si les banques, faute de rentabilité suffisante sur d'autres marchés, abandonne leur politique conservatrice en termes de crédits».

Un thème phare pour la course à la Chancellerie

Et cette question de l'accès au logement est en passe de devenir un thème de campagne majeur. Notamment pour le candidat SPD, Peer Steinbrück, au plus bas dans les sondages et qui n'a plus d'autres choix que de se recentrer sur son pré-carré social (logement, retraites, précarité de l'emploi). Toujours aussi incisif, Peer Steinbrück taxe Angela Merkel d'«immobilisme», lui reproche une «loi sur les loyers scandaleuse» et a promis de réguler davantage les augmentations de prix pour les loyers (15% en quatre ans contre 20% maximum en trois ans aujourd'hui). Une agitation feinte pour la CDU. «Nous avons déjà régulé la hausse des loyers, mais nous pensons qu'une «sur-régulation» des acteurs et notamment des bailleurs, conduira à un blocage du marché, ce qui augmentera in fine les prix. Peer Steinbrück a par ailleurs beau jeu de critiquer la CDU, alors que la politique du logement, notamment en matière de construction, se fait au niveau des communes», explique Esther Uleer, porte-parole de la CDU, à La Tribune. Or, par exemple, dans de la capitale allemande où les loyers ont le plus augmenté depuis 2007, le maire Klaus Wowereit est socialiste.