Le "tourisme social" banni dans l'Union européenne ?

Par Romaric Godin  |   |  505  mots
L'agence pour l'emploi de Lepizig a refusé une allocation à une ressortissante roumaine. L'affaire est devant la Cour de Luxembourg.
La Cour de justice de l'UE a donné raison à l'Allemagne qui avait refusé une prestation sociale à une Roumaine. Une victoire pour les opposants au "tourisme social".

L'Allemagne a le droit de refuser des aides sociales aux ressortissants de l'UE. C'est du moins l'avis de l'avocat général de la Cour de Justice de l'Union européenne (CJUE), Melchior Walthelet, publiée aujourd'hui. Ce refus est néanmoins fondé sur un critère « démontrant l'absence de lien réel avec l'Etat membre d'accueil » afin de viser à éviter « une charge déraisonnable pour le système national d'assistance sociale. » La prestation refusée ne doit pas non plus être « contributive », autrement dit ayant fait l'objet de cotisation de la part du demandeur.

L'affaire

Cette conclusion répond à l'interrogation du tribunal social de Leipzig, dans l'ex-RDA, qui avait été saisi par une ressortissante roumaine, madame Dano. Cette dernière, vivant avec son fils à Leipzig chez une sœur, avait demandé à bénéficié de l'allocation pour les chômeurs de longue durée (appelée « Hartz IV » en Allemagne). Cette allocation est l'équivalent allemand du RSA, mais il est soumis à des obligations de reprise d'emploi, même de façon précaire (travaux à 1 euro de l'heure, minijobs). Cette prestation pour une femme seule et son fils peut s'élever à 650 euros par mois, auxquels il faut ajouter le loyer et les frais de chauffage qui sont pris en compte (dans certaines limites) par la municipalité.

Règle générale

L'agence pour l'emploi de Leipzig avait refusé à madame Dano cette prestation. Madame Dano avait porté l'affaire devant le tribunal social de Lepizig, lequel a demandé l'avis de la CJUE. Cette dernière rappelle la règle générale dans l'UE : pendant trois mois, les ressortissants de l'UE peuvent s'installer dans un pays de l'Union avec leur famille en demandant les aides sociales qu'elles touchaient dans leur pays d'origine. Si ces aides « ne deviennent pas une charge déraisonnable pour le système d'assurance du pays membre d'accueil. » Au-delà, il faut pourvoir à ses besoins par ses propres moyens et « disposer de ressources suffisantes » pour rester dans le pays.

Eviter le « tourisme social »

L'avocat général de la CJUE a validé le critère retenu par l'agence pour l'emploi de Leipzig pour refuser tout versement à madame Dano : une arrivée sur le territoire allemand uniquement motivée par la recherche d'un emploi ou d'une prestation sociale. Selon lui, ce critère prouve « l'absence de lien réel avec le territoire de l'Etat membre d'accueil ainsi que le défaut d'intégration dans celui-ci. » Ce critère permet d'éviter le « tourisme social », et éviter de mettre en danger la viabilité économique du système conclut l'avocat général.

L'arrêt doit confirmer la conclusion

Cette conclusion n'est pas encore un arrêt de la Cour. Si celle-ci la suit, elle aura un caractère liant pour les autres juridictions européennes saisies du même problème dans l'UE. Elle serait alors une victoire pour tous ceux qui brandissent la menace du « tourisme social » au sein de l'Union. Une menace qui était brandie par une partie des conservateurs allemands et britanniques.