Les Européens aux urnes : combien de sièges pour les europhobes ?

Par latribune.fr  |   |  928  mots
Après les Britanniques et les Néerlandais jeudi, les Tchèques et les Irlandais vendredi, les Slovaques, les Lettons et les Maltais samedi, les Européens des 21 autres pays de l’Union européenne se rendent aux urnes ce dimanche pour désigner près de 600 eurodéputés sur un total de 751. Dominé par des enjeux nationaux, le vote est menacé par l'abstention et la montée des anti-européens.

Après les Britanniques et les Néerlandais jeudi, les Tchèques et les Irlandais vendredi, les Slovaques, les Lettons et les Maltais samedi, les Européens des 21 autres pays de l'Union européenne se rendent aux urnes ce dimanche pour désigner près de 600 eurodéputés sur un total de 751. Les électeurs grecs, roumains et lituaniens ont été les premiers à se rendre aux urnes à 04H00 GMT. Aucun résultat ne pourra être révélé avant la fermeture des derniers bureaux de vote en Italie à 21H00 GMT. Le Parlement européen diffusera vers 20H00 (GMT) une première projection basée sur des sondages sortie des urnes.

Election présidentielle en Ukraine

Ce scrutin se déroule le même jour que l'élection présidentielle en Ukraine, au bord de la guerre civile entre le gouvernement pro-européen et les pro-Russes dans l'Est du pays. Et au lendemain de la fusillade meurtrière dans un musée juif à Bruxelles, qualifiée par le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, "d'attaque contre les valeurs mêmes de l'Europe".

Abstention

Dominé par des enjeux nationaux, le vote est menacé par l'abstention et la montée des eurosceptiques après des années de crise, et pleines d'incertitudes sur la prochaine Commission. Considéré dans la plupart des pays comme de second rang car sans conséquence directe, peine traditionnellement à mobiliser. Le taux d'abstention, déjà à un record de 57% en 2009, pourrait être battu. Il a atteint environ 80% en République tchèque, selon l'agence de presse CTK.

Poussée des anti-européens

Mais ce qui inquiète plus encore est la poussée attendue des anti-européens. Si le parti anti-islam PVV a subi un échec aux Pays-Bas, en n'obtenant que 12% des voix contre près de 18% il y a cinq ans, l'Ukip britannique semble en passe de réaliser un score historique, si l'on en juge par ses résultats aux élections locales.

Une percée de l'extrême droite est attendue en France (qui élit 74 députés), où le Front national se voit déjà premier parti de France lundi . Selon le baromètre quotidien Ipsos/Steria publié vendredi soir, le Front national, avec 24% d'intentions de vote, devance toujours l'UMP à 21% et le PS est en recul d'un point à 16,5%, Selon la dernière vague de cette enquête réalisée pour Le Monde, le Cevipof et Terra Nova, l'alliance UDI-MoDem est créditée de 9,5%, EELV de 8,5% (-1) et le Front de gauche de 7,5% (-1). Debout la France (droite souverainiste) est donné à 3%, Nouvelle Donne (centre gauche) serait à 2,5% (+1).

Une centaine de sièges pour les anti-européens

 La défiance vis-à-vis de l'Europe s'exprimera aussi à travers le populiste Beppe Grillo en Italie, les anti-euro de l'AfD en Allemagne ou la gauche radicale de Syriza en Grèce. L'euroscepticisme ambiant va être "renforcé par le vote contestataire contre les partis de gouvernement", souligne Jean-Dominique Giuliani, le président de la Fondation Robert Schuman.

Au total, les forces anti-européennes pourraient décrocher une centaine de sièges. Pas assez pour bloquer la construction européenne, mais suffisamment pour donner de la voix et bousculer les partis traditionnels.

Une poussée de ces partis "ne va pas changer la façon dont le Parlement travaille", estime Jan Techau, le directeur de Carnegie Europe. Mais cela aura des conséquences "sur les scènes politiques nationales et sur la façon dont les dirigeants nationaux agiront au sein de l'UE", ajoute-t-il.

La concurrence va être rude entre les europhobes pilotés par l'Ukip et l'extrême droite emmenée par le FN de Marine Le Pen pour former un groupe, puisqu'il faut pour cela un minimum de 25 députés issus de sept pays. D'autant que Beppe Grillo serait lui aussi tenté de créer un groupe autour de sa vingtaine de députés. "C'est une grosse pagaille qui s'annonce", souligne M. Giuliani.

Quel président de la Commission 

Et ce ne sera que le début. Une autre bataille se profile pour la présidence de la Commission.

Les trois groupes centraux du Parlement européen ne devraient plus peser que 60% des sièges, contre plus de 70% dans le Parlement sortant. La seule majorité possible sera donc une grande coalition entre la droite et la gauche modérées, avec ou sans l'appoint des centristes. Malgré une légère progression des socialistes, le PPE (qui réunit la CDU allemande et l'UMP française, mais aussi les troupes de Silvio Berlusconi qui a mené une campagne très anti-allemande et le Fidesz hongrois de Viktor Orban en délicatesse permanente avec l'Union européenne) devrait rester le premier groupe.

Pour tenter de motiver les électeurs, les principaux partis ont présenté des candidats. Sur le bâtiment de la Commission européenne, une grande bannière proclame: "Cette fois, c'est différent, votre vote compte".

Parlement fragmenté

Mais plusieurs dirigeants européens, à commencer par Angela Merkel et son homologue britannique David Cameron, refusent cette logique parlementaire et les postulants, que ce soit le chrétien-démocrate Jean-Claude Juncker, le social-démocrate Martin Schulz ou le centriste Guy Verhofstadt.

Face à un Parlement plus fragmenté que jamais, les chefs d'Etat et de gouvernement devraient tenter de garder la main sur la Commission, en trouvant une autre personnalité acceptable par les députés. Ils se réuniront dès mardi prochain, deux jours seulement après les élections.

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