Samaras optimiste pour une Grèce toujours dans l'impasse

Par Romaric Godin  |   |  822  mots
Antonis Samaras, premier ministre grec, est optimiste. Avec raison ?
Le premier ministre grec a promis le retour à la croissance lors du trimestre en cours. Mais la Grèce reste sous de multiples menaces.

Antonis Samaras a tenté de tenir un discours de confiance dans l'avenir lors de l'ouverture officielle ce samedi de la Foire internationale de Thessalonique. Le premier ministre grec a assuré que le pays retrouverait une croissance annuelle de son PIB lors du troisième trimestre 2014 et qu'il trouverait une façon d'assurer la « viabilité » de son énorme dette publique qui représente 175,1 % du PIB. Il a aussi assuré qu'il prendra des mesures de stimulation de la croissance, notamment par des baisses d'impôts.

Une économie en fort déclin

Ce discours optimiste est compréhensible de la part d'un gouvernement qui est en grande difficulté politique, mais les faits semblent difficilement donner raison à Antonis Samaras. Certes, le pays a vu la baisse de son PIB ralentir aux premier et deuxième trimestres de l'année, puisque le déclin annuel a été de 1,1 % puis 0,3 %. Mais sont-ce des succès ? L'économie grecque a perdu près d'un quart de sa valeur depuis 2009. La baisse ne saurait être infinie et après la pluie vient le beau temps (et inversement), mais remonter la pente risque de prendre beaucoup de temps. Et pendant ce temps, la richesse nationale à partager restera à un niveau plus faible qu'avant la crise.

Importance du tourisme

En réalité, cette « reprise » est en trompe l'œil pour plusieurs raisons. D'abord, parce que les chiffres du troisième trimestre sont gonflés par le secteur du tourisme, le seul à véritablement avoir profité de « l'ajustement » grec. Ce secteur compte pour 17 % du PIB et a beaucoup profité de la désertion de certains pays comme la Tunisie ou l'Egypte par les touristes occidentaux. Mais cette bonne performance du tourisme ne règle pas la question du modèle économique d'un pays très faiblement industrialisé et qui ne saurait s'appuyer sur les exportations de biens seules pour redresser la barre. D'autant que la reprise européenne est très faible et que l'inflation négative pèse sur les marges des entreprises. Il n'est pas certain même que, à la fin de l'année, le gouvernement puisse obtenir les 0,6 % de croissance qu'il vise aujourd'hui. Dans ce cas, il devra revoir à la baisse ses objectifs budgétaires, demander de nouveaux l'aide européenne et serrer encore la vis. Des inquiétudes se font jour ces derniers temps sur ce sujet en Grèce.

La question de la dette

L'autre problème est évidemment celui du stock de dettes. Les Européens ont mis en place pour sauver la Grèce un système de « cavalerie financière », consistant à s'endetter auprès du FMI et des pays européens pour faire face à ses échéances privées. Mais lorsque la Grèce va devoir rembourser ces dettes, elles vont peser fort lourd dans son budget. Il faudra donc faire des réserves et continuer une politique budgétaire restrictive. Or, on voit mal le Mécanisme européen de stabilité, la BCE et le FMI accepter un défaut grec. Dans ce cas, les contribuables de plusieurs pays de l'UE seraient inévitablement mis à contribution. Athènes tente d'obtenir des délais, mais sans coupes franches dans le stock de dette, la reprise grecque sera soumise à une épée de Damoclès constante qui rend peu crédible les promesses de baisses d'impôts d'Antonis Samaras.

Le nœud gordien de la politique

Le troisième problème de la Grèce est politique. L'austérité a ravagé le système politique grec et l'a rendu fortement instable. L'actuelle coalition entre conservateurs et socialistes du Pasok est très impopulaire et semble peu à même d'être renouvelée. Le dernier sondage publié dans le pays et réalisé par l'institut Alco donne pas plus de 30 % des intentions de vote à ces deux partis qui, à la différence de 2012, ne pourront pas compter sur le « bonus » de 50 sièges sur 300 accordé au parti arrivé en tête. La coalition de la gauche radicale, Syriza, dispose en effet désormais d'une avance de 4 points qui grandit régulièrement sur les conservateurs, avec 28 % des voix et s'impose comme le premier parti de Grèce. Mais avec qui peut-elle gouverner ? Les Communistes du KKE (5 % des intentions de vote) restent très opposés à une entrée dans un gouvernement dirigé par Syriza. Enfin, les néo-nazis d'Aube Dorée restent forts avec 8 % des intentions de vote. Bref, la situation risque de se retrouver bloquée en cas d'élection.

Or, la Grèce doit faire face à une échéance importante : celle de l'élection du président de la république au début de l'an prochain. Si aucun candidat n'obtient la majorité des deux tiers requise, autrement dit un appui de la part de l'opposition et du gouvernement, la Vouli, le parlement sera de facto dissout et l'on ira vers de nouvelles élections. Antonis Samaras tente donc de rassurer, mais sa situation demeure des plus difficiles.