Italie : la sortie de l'euro soumise à une pétition

Par latribune.fr avec AFP  |   |  753  mots
Selon le mouvement populiste, pour qui cette monnaie "anti-démocratique" était condamnée, la nécessité de sortir de l'euro concerne par ailleurs tous les pays européens.
Le Mouvement 5 étoiles fondé par l'ex-comédien Beppe Grillo appelle les citoyens à signer une pétition pour l'organisation d'un référendum anti-monnaie unique. Il dit avoir mobilisé 50.000 signatures en deux jours.

La sortie de l'euro, un débat aussi inépuisable que destiné à rester confiné aux pages des journaux et aux tribunes politiques? En Italie il s'est désormais déplacé -physiquement- aussi dans les rues. Le Mouvement 5 étoiles (M5S) de l'ex-comédien Beppe Grillo, qui lors des élections législatives de 2013 a recueilli près de 25% des voix, a lancé le 13 décembre à Gênes une pétition visant à obtenir l'organisation d'un référendum pour la sortie du pays de la monnaie unique européenne.

"C'est un sondage entre ceux qui veulent s'en aller et ceux qui veulent rester avec la corde au cou", expliquait le leader du M5S.

"On n'a pas le choix"

Jeudi 18 décembre, devant la presse étrangère à Rome, le mouvement, qui a fondé son succès sur sa fibre populiste et anti-partis, affirmait avoir recueilli 50.000 signatures en deux jours. Rien d'étonnant, selon Beppe Grillo, bien au contraire:

"On est en train de couler, pouvons-nous penser d'une autre manière ? Réfléchir à un plan de sauvetage ? On n'a pas le choix, il faut imaginer autre chose", souligne-t-il. L'humoriste n'a pas manqué d'ironiser: "Aujourd'hui le gouvernement italien est comme Willy le coyote, qui a dépassé la falaise et ne s'est pas encore rendu compte qu'il n'y a que du vide sous lui".

"Nous souhaitons qu'un M5S se lève dans chaque pays européen"

Selon le M5S, pour qui cette monnaie "anti-démocratique" était condamnée, la nécessité de sortir de l'euro concerne par ailleurs tous les pays européens. Luigi di Maio, présenté comme le dauphin du comique, insiste:

"La monnaie européenne est destinée à disparaître. Le premier qui comprendra cette situation sera le premier à en profiter et à pouvoir recommencer à respirer".

Giorgio Sorial, un autre responsable du mouvement renchérit:

"Nous souhaitons qu'un M5S se lève dans chaque pays européen pour lancer des référendums" contre l'euro.

Pas de catastrophe en vue

Aucun doute de la part des membres du mouvement quant aux conséquences qu'entraînerait une telle sortie de l'euro. Beppe Grillo assure:

"On nous dit que ce serait une catastrophe de sortir de l'euro, qu'on paiera les matières premières 30 à 40% plus cher, que l'épargne se volatilisera. Ça n'a pas le moindre sens!"

Si le prix du pétrole brut augmentait de 30%, la hausse à la pompe ne serait que de 5% "parce que l'Italie est un pays de transformation" qui se charge du raffinage, est-il convaincu.

La question du remboursement de la dette italienne pas abordée

Un retour à une monnaie nationale rendrait au contraire sa souveraineté au pays, qui disposerait d'une banque centrale nationale comme prêteur en dernier ressort, selon le M5S. Giorgio Sorial explique:

"La nouvelle monnaie sera (au départ) à parité avec l'euro. Elle perdra peut-être 25 à 30%, mais elle représentera l'économie de notre pays".

L'homme politique ne précise toutefois pas comment le pays rembourserait sa dette colossale, qui resterait en euros.

Les traités internationaux exclus du référendum abrogatif

Reste également ouverte la question de savoir quels pourraient être les effets concrets de la pétition organisée par Grillo. La Constitution italienne prévoit en effet le droit pour les citoyens de demander, après avoir recueilli 500.000 signatures, l'organisation d'un référendum abrogatif, ayant justement pour objet l'abrogation d'une disposition législative.

Toutefois, sont explicitement exclues de cette abrogation par initiative populaire les lois qui autorisent la ratification des traités internationaux. La Cour constitutionnelle italienne s'est en outre toujours opposée à ce que de tels référendums interfèrent avec l'application d'obligations communautaires.

Le référendum consultatif très limité

L'autre référendum, consultatif, prévu par la Constitution italienne, est limité à l'hypothèse de modification de la carte des collectivités locales. Certes, en 1989, afin de consulter la population sur l'attribution au Parlement européen du mandat de rédiger un projet de Constitution de l'UE, le Parlement a organisé une autre forme de consultation populaire, dénommée "référendum d'orientation".

Il s'est toutefois agi d'une expérience unique (qui s'est soldée par une réponse positive à 88%), qui a demandé l'adoption d'une loi constitutionnelle ad hoc, dérogeant à la Constitution et exigeant le soutien d'une large majorité. Mais surtout, le résultat du référendum ne serait pas juridiquement contraignant pour le Parlement qui, en cas de prévalence des euro-sceptiques, ne serait pas obligé de suivre leur avis.