Le candidat Hollande ne promet pas que des lendemains qui chantent

Par Jean-Christophe Chanut et Agathe Machecourt  |   |  697  mots
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Devant 4.000 militants réunis à Paris, François Hollande a endossé officiellement son costume de candidat à la présidentielle de 2012. Dans un discours mêlant envolées lyriques et nécessaire rigueur, il a réaffirmé ses priorités économiques: baisse des déficits et encadrement du secteur bancaire.

J- 197. La page de la primaire citoyenne s'est définitivement tournée samedi 22 octobre, à la Halle Freyssinet de Paris, avec la convention d'investiture de François Hollande comme candidat à l'élection présidentielle de 2012. Le PS a tenu à afficher un grand moment d'unité où chacun des cinq autres candidats - Martine Aubry en tête et avec insistance - a manifesté son ralliement derrière François Hollande. Chacun, à sa façon, a défendu un seul et unique principe: l'heure n'est plus au débat à l'intérieur de la gauche mais au combat contre la droite. Tous les ténors actuels du PS et des radicaux de gauche étaient présents, ainsi que les grands anciens comme Pierre Mauroy et Lionel Jospin, pour afficher cette unité.

Prenant la parole à la fin de la convention, François Hollande lui même a tenu à remercier chacun des ex-candidats à la primaire pour leur contribution. Puis, le député de Corrèze, endossant son tout nouveau costume de candidat officiel, s'est adressé pendant plus d'une heure à environ 4.000 militants enthousiastes avec des accents plus mitterrandiens que jamais. Le neocandidat s'est lancé dans une grande diatribe contre "la gestion du président sortant (...) jamais la gauche n' a été susceptible d'arriver au pouvoir à un moment aussi grave". Il a dénoncé la politique de Nicolas Sarkozy qui a conduit "à 700 milliards d'euros de dettes publiques en plus, à un déséquilibre du commerce extérieur de plus de 75 milliards, à une croissance limitée à 1% et à 40 milliards de prélèvements obligatoires supplémentaires". Et de lancer: "La droite compte sur la crise pour se sauver. Je propose que les Français puissent compter sur la gauche pour les sauver". Et de rejeter sur la majorité en place la responsabilité du risque de la perte du "triple A": "ce n'est pas notre projet qui coûte cher, mais leur [la droite] politique, avec la distribution d'avantages fiscaux, les déséquilibres des comptes sociaux".

Prudent, François Hollande a immédiatement prévenu qu'il faudra de "la volonté pour réduire les comptes publics, rassurer les entrepreneurs, mettre en cause le pouvoir de la finance". "L'activité des banquiers est trop sérieuse pour la laisser aux seuls banquiers", a-t-il affirmé, plaidant ainsi pour une régulation de la finance, ce qui devrait satisfaire Arnaud Montebourg. Il s'est dit aussi favorable à l'installation d'une taxe sur les transactions financières, à la création d'une agence européenne de notation et à la séparation des activités spéculative et de dépôt. Bien entendu, il a encore une fois défendu son projet de grande réforme fiscale, englobant une nouvelle assiette pour les cotisations sociales (avec une dimension écologique), un impôt sur les sociétés modulé en fonction des dépenses d'investissement et une évaluation de toutes les niches fiscales existantes.

Sous les applaudissements, François Hollande a proposé trois grands pactes : un "pacte de productivité" d'abord, favorisant l'investissement, la recherche, la formation et les nouvelles technologies. A cet égard, il a réitéré son idée de créer une grande banque publique d'investissement permettant de redistribuer l'épargne dans l'économie réelle. Pour en finir avec les effets défavorables de la démondialisation, le candidat a repris la notion de "juste-échange", tendant à rééquilibrer les relations commerciales de la France avec les pays à bas coût de main-d'?uvre. Un pacte éducatif ensuite, la jeunesse étant sa "grande priorité", avec la création de 60.000 postes d'enseignants et la création d'une "allocation jeunes" entre autres.

Enfin, un pacte concernant la place de la France dans le monde, jurant d'en finir avec "le néocolonialisme et la Françafrique". Surtout, sur l'Europe, il a repris l'idée d'instituer des "cercles concentriques". Un premier réunissant les "pays fondateurs" de l'Union européenne pour aller plus loin dans l'intégration, mettant en exergue au passage les nécessaires relations franco-allemandes : "Il faut tendre la main à l'Allemagne mais avoir la main ferme". Un second composé de l'ensemble des pays adhérents qui "participeront selon leur choix à la politique commune". Et de donner rendez-vous à l'ensemble des militants au soir du 6 mai 2012.