Alfa Romeo Giulietta TCT : Une italienne pleine de charme et de caractère parfois agaçante

Par Alain-Gabriel Verdevoye  |   |  1503  mots
Elle est belle, originale, pleine de personnalité, plutôt plaisante à conduire. Une Alfa, en somme… avec quelques défauts irritants.

Alfa Romeo attend une nouvelle relance. Aux dernières nouvelles, le énième plan stratégique prévoit de vendre 400.000 voitures annuelles vers... 2018. Soit une multiplication par six des scores actuels ! Rude gageure, alors que la pauvre marque italienne a écoulé 74.000 véhicules à peine l'an dernier, dégringolant à ses niveaux de la fin des années 60. Sergio Marchionne, le tout puissant patron de Fiat Chrysler, a annoncé début mai un investissement pour la marque de cinq milliards d'euros d'ici à 2018, censé lui permettre de lancer huit nouveaux modèles... Souhaitons qu'une marque aussi emblématique puisse survivre !

Lignes toujours sculpturales

En attendant une hypothétique relance, celui qui fut le BMW italien il y a cinquante ans n'a que deux modèles de série à son catalogue. Faute de grande nouveauté, reprenons donc le volant de la compacte Giulietta, retouchée il y a peu, dans une très intéressante version diesel 2,0 JTDm de 175 chevaux couplée à une boîte à double embrayage six rapports TCT.

Les lignes sculpturales datant de 2010 n'ont heureusement pas pris une ride. Signe d'un superbe dessin originel avec des courbes racées et sensuelles. C'est simple, la Giuilietta est toujours aussi charmeuse. Rien à voir avec les carrosseries laborieuses, torturées, agressives à souhait et clinquantes de bien des concurrentes, qui passent si rapidement de mode - on vous laisse le soin de mettre les noms. Les poignées de portes arrière, dissimulées dans le prolongement des vitres, donnent l'impression d'un coupé à deux portes. Une astuce inventée par... Alfa Romeo sur la 156, à la fin des années quatre-vingt-dix. Seule faute de goût: le maillage insuffisant de la belle calandre, qui laisse voir le radiateur derrière. Pas terrible, ça.

Du charme, mais des plastiques bas de gamme

A l'intérieur, c'est moins réussi avec une inspiration à rechercher du côté de l'Alfasud des années soixante-dix. La planche de bord n'en reste pas moins originale. Lors du dernier restylage, Alfa y ajouté un bandeau de plastique souple, qui entoure ladite planche ainsi que l'instrumentation et s'harmonise avec les coloris de sièges en cuir (version Exclusive). Notre Giulietta à intérieur couleur tabac était chaleureuse et chic. Dommage : le skaï très plastique des contre-portes et du dos des sièges.

Non, le problème de cet habitacle ce n'est pas le dessin ni l'ambiance, ni même l'habitabilité et l'accessibilité étriquées à l'arrière, mais la finition. Les plastiques semblent aussi inspirés de l'Alfasud... qui passait déjà à l'époque pour une voiture peu qualitative. Oui, d'accord, on exagère, mais il y a un peu de ça. Si le haut de la planche de bord passe encore, les plastiques durs et creux ailleurs font bas de gamme. C'est mieux que lors du lancement en 2010. Mais loin de ce qu'on peut attendre d'une voiture à vocation « premium ».

Ceci dit, si, en roulant, des résonnances agacent, il n'y a ni crissements ni grincements à proprement parler. Ce qui prouve que le mobilier est correctement assemblé. On ne peut pas dire pareil de maintes rivales. La position de conduite est pour sa part bonne et facile à trouver.

Des détails qui fâchent

Des détails fâchent, comme l'impossibilité de faire un appel de phares quand on est en feux de croisement, la clé de contact qui accroche quand on l'enlève, le lave-glace qui n'enclenche pas forcément l'essuie-glaces - un défaut dangereux et traditionnel au sein du groupe Fiat - ainsi que le compteur de vitesses placé trop à gauche, difficilement lisible. La graduation inutile jusqu'à 260 a obligé Alfa à imprimer des chiffres trop petits et mal repérés. La plage utile de ce compteur (de 70 à 140 km/h) est en partie cachée par le haut du volant. En plus, comme c'est exactement à cet endroit qu'on met les mains sur ledit volant...

Le groupe Fiat doit d'urgence dédoubler les indications avec de gros chiffres pile devant les yeux du conducteur. La marque américaine du groupe, Jeep, le fait déjà. Critiquons aussi un "bip-bip" de ceinture strident insupportable. Comme on a du mal à trouver la boucle de ceinture, trop courte, en plongeant le long du siège, cette torture dure longtemps.

Du caractère, tant mieux

Le diesel de 175 chevaux se montre souple, élastique, assez performant et... sonore. Heureusement, il distille une tonalité assez rauque, agréable. La boîte à double embrayage TCT maintient la vitesse inférieure suffisamment longtemps et rétrograde aisément, même en mode normal. Pour  plus d'allant;  le petit levier « DNA » permet de passer en mode « Dynamic », qui modifie sensiblement la cartographie du moteur et les lois de passage des vitesses. Même si la différence n'est pas aussi flagrante qu'avec un moteur à essence. En conduite normale de tous les jours, l'ensemble moteur-boîte se montre doux et plaisant.

Malheureusement, quand on adopte une conduite plus dynamique, avec des relances ou accélérations plus franches, cette boîte se révèle assez lente avec des temps de réponse trop marqués. D'où un ralentissement, suivi d'une poussée un peu trop brutale. De même, la boîte s'emmêle un peu les pédales lorsqu'on se livre à des injonctions contradictoires, ce qui est souvent le cas dans les embouteillages urbains. Disons qu'il n'y a rien de rédhibitoire et que l'ensemble est globalement agréable. Mais, le temps de réaction empêche cette Alfa d'être considérée comme une sportive. Or, c'est ce qu'on attend d'une Alfa, non ? On ne peut donc pas exploiter les ressources de la mécanique. Les  boîtes montées sur les Volkswagen ou Ford sont plus réactives.

Les consommations sont moins basses que ce que l'on pouvait espérer à la lecture de la fiche d'homologation. La Giulietta TCT est homologuée en effet avec des émissions de CO2 - corrélées aux consommations - de 116 grammes seulement au kilomètre. Récemment, nous avions avalé 6,7 litres de gazole aux cents durant l'essai d'une Giulietta diesel 150 à boîte mécanique . Ici, comptez 8 litres sur un parcours mixte, avec beaucoup de ville !

Un châssis très sain

Le châssis est sain. Toutefois, la voiture est un brin lourde de l'avant et rechigne parfois à virer, surtout en position « Dynamic » qui durcit aussi la direction, ce dont on serait passé volontiers. Le rayon de braquage, excessif, n'arrange rien. La Giulietta n'est donc pas extrêmement agile. En cas de forte accélération, le train avant absorbe de surcroît parfois difficilement la puissance.

Ledit train avant est assez sensible à l'état du bitume. Avec un certain manque de rigueur sur chaussée abîmée. Ce n'est pas une 308. Curieusement, nous avons trouvé ce train avant bien plus sensible à l'état de la chaussée que sur la version diesel 150 à boîte manuelle... La  voiture demeure plutôt sûre, mais on attendait un peu plus de précision pour un vrai plaisir. Notre modèle était équipé de pneus taille basse (45R17) et d'une suspension sport. Les trains roulants sont assez raides, tout comme les sièges. Sur chaussée dégradée, ça secoue. Mais, sur une Alfa à vocation sportive, on ne critiquera pas un confort ferme

Des progrès petit à petit

La belle italienne offre charme, personnalité et  un certain agrément de conduite. Même si ce n'est pas une sportive. La voiture n'a pas la rigueur des meilleures rivales, mais elle reste assez homogène. Un choix original. Alfa Romeo pourrait quand même peaufiner le train avant et ses réglages de boîte, changer certains plastiques et faire comme tout le monde, en proposant sur le compteur une fenêtre affichant la vitesse à laquelle on roule en gros chiffres...

La Giulietta coûte moins cher que ses concurrentes. La gamme démarre à 21.090 euros avec un petit moteur à essence et une présentation très spartiate. Comptez 32.150 euros dans notre version diesel 175 et boîte à double embrayage en finition "Distinctive" et 34.900 en finition haute "Exclusive" dotée d'une sellerie cuir magnifique, d'un GPS avec régulateur de vitesse, d'une climatisation automatique bi-zone. Pas de surtaxe dite "malus" à prévoir. Ceci dit, en « Distinctive », on peut avoir le sellerie pour 1.600 euros en option. Reste à composer avec des pièces détachées dont les tarifs sont élevés et un service après-vente peu réputé pour ses prestations...

Modèle d'essai : Alfa Romeo Giulietta 2,0 JTDm 175 TCT Exclusive: 34.900 euros

Puissance du moteur : 175 chevaux (diesel)

Dimensions : 4,35 mètres (long) x 1,80 (large) x 1,46 (haut)

Qualités : esthétique sculpturale, intérieur chaleureux (version Exclusive), forte personnalité, moteur vivant, boîte à double embrayage plaisante...

Défauts : ...mais lente en conduite dynamique, train avant pas assez précis, compteur de vitesses illisible, défauts d'ergonomie, plastiques médiocres

Concurrentes : Citroën DS4 Sport Chic HDi 160 (boîte auto)  35.170 euros ; BMW Série 1 Lounge Plus 120d (boîte auto) : 37.500 euros ; Audi A3 Sportback Ambition Luxe TDi 184 Quattro S-Tronic : 41.850 euros

Note : 14 sur 20