L’enthousiasme autour du cœur Carmat s'érode

Par Jean-Yves Paillé  |   |  559  mots
Le cinquième patient décédé était le premier à recevoir ce cœur artificiel dans le cadre de la "phase pivot" de l'essai clinique de Carmat, lancée fin août.
L'Agence nationale de sécurité du médicament a stoppé temporairement l'étude pivot devant permettre à Carmat d'obtenir à terme le feu vert pour la commercialisation de son cœur artificiel. L'action de la société française chutait de plus de 12%. Le titre grimpait à plus de 130 euros début 2013, contre 29 euros aujourd'hui.

Publié le 01/12/2016 à 10:30. Mis à jour le 01/12/2016 à 16:36.

Enième coup dur pour Carmat. Le cinquième patient ayant reçu cet été un cœur artificiel de la société française est décédé, a annoncé mercredi 30 novembre l'Agence nationale de sécurité du médicament (l'ANSM), ajoutant qu'on ne savait pas encore si le cœur greffé était "en cause". L'annonce a été accueillie froidement en Bourse. L'action Carmat chutait de 12,74 % à 16h21, tombant à 29,45 euros. Lors de l'ouverture d'Euronext Paris, Carmat perdait plus de 17%.

Carmat assure que le cœur artificiel n'est pas impliqué dans le décès

Une nouvelle fois, la société affirme "que les analyses réalisées n'ont pas montré d'implication de la prothèse dans le décès du patient".

Mais cette fois-ci, l'ANSM a demandé à Carmat d'arrêter temporairement l'étude pivot en cours: "Nous attendons les résultats des investigations qui sont conduites pour savoir si le cœur est en cause ou non dans la survenue de ce décès" et avant d'"éventuellement réautoriser de nouvelles implantations". Ainsi, l'autorité de santé peut aller plus loin et arrêter à tout moment l'étude pivot de Carmat, si elle estime que son cœur artificiel est responsable du décès.

Le cinquième patient décédé était le premier à recevoir ce cœur artificiel dans le cadre de la "phase pivot" de l'essai clinique de Carmat, lancée fin août, qui représente l'étape finale devant lui permettre d'obtenir à terme le feu vert pour la commercialisation de son cœur artificiel. Au total, autour de 25 patients devaient être concernés par cette étude dans dix centres d'implantation en Europe.

Pour cette dernière phase, les critères de sélection des patients avaient été élargis. En plus des malades souffrant d'insuffisance cardiaque biventriculaire terminale, la société française avait obtenu le droit d'implanter les patients éligibles à la transplantation dont la probabilité d'obtenir un greffon est très faible. Avec une possibilité pour que cela aide la société française à obtenir des taux de survie satisfaisants plus facilement, si du moins elle parvient à trouver des patients ayant ce profil, et qui sont prêts à se faire implanter un cœur artificiel.

Il y a 5 ans,  Carmat prévoyait une mise sur le marché en 2013...

Pour rappel, le premier patient n'avait survécu que deux mois et demi en 2014, le 2e neuf mois, le 3e patient 8 mois. Le quatrième était mort un mois après l'opération. Et le 5e a survécu environ deux mois, alors que l'étude pivot exige une survie de six mois.

Ce nouveau décès repousse la date de la potentielle mise sur le marché du cœur Carmat. Et ce n'est pas la première fois que la société décale la tenue de ses objectifs. En 2011, elle prévoyait une mise sur le marché européen de son cœur artificiel pour la mi-2013.

Si cette prothèse innovante pourrait générer un chiffre d'affaires élevé (Carmat espère en tirer un prix allant de 140.000 à 180.000 par implantation), l'enthousiasme des premiers jours s'est érodé, en particulier du côté des investisseurs. L'action Carmat atteignait 188 euros en juin 2011. En janvier 2013, elle valait 132 euros. Depuis cette date, elle a chuté de plus de cent euros.